Vu le recours enregistré le 14 mai 2007, complété par mémoire enregistré le 22 janvier 2008, présenté par le MINISTRE DE l'INTERIEUR ET DE l'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ; le ministre demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 1er février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé, à la demande de la commune de Wittelsheim, l'arrêté en date du 23 décembre 2003 par lequel le préfet du Haut-Rhin a décidé la dissolution de la communauté de communes du bassin potassique (CCBP) ;
Il soutient que le tribunal a commis une erreur en estimant que le préfet du Haut-Rhin était tenu, en application, de l'article L. 5211-26 du code général des collectivités territoriales, de nommer un liquidateur dès lors que la communauté de communes ne s'était pas prononcée sur l'adoption du compte administratif et sur les conditions de transfert de l'actif et du passif à ses communes membres avant sa dissolution ; que la nomination d'un liquidateur n'est prévue que si deux conditions sont cumulativement remplies, ce qui n'était pas le cas s'agissant des conditions de liquidation de l'actif et du passif de la communauté ; que le conseil communautaire avait la capacité d'adopter le compte administratif après la date de l'arrêté de dissolution puisqu'il est réputé garder sa personnalité juridique pour les actes nécessaires à sa liquidation ; que plusieurs arguments pratiques imposent que les arrêtés de dissolution interviennent au 31 décembre de l'année de l'exercice ; que le moyen tiré de la tardiveté de la requête manque en fait ; que l'interprétation pragmatique de l'article L. 5211-26 du code général des collectivités territoriales a été confirmée par la jurisprudence récente du Conseil d'Etat ; que l'absence de notification de la délibération du conseil communautaire du 12 décembre 2003 n'a pas d'incidence sur la légalité de l'arrêté de dissolution ; que l'article L. 5211-25 du code général des collectivités territoriales n'interdit pas l'indivision ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 5214-28 du code général des collectivités territoriales est inopérant à l'égard de l'acte entérinant la dissolution ; que les membres du conseil communautaire ont été régulièrement convoqués à la séance du 12 décembre 2003 et reçu une information suffisante ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2007, présenté pour la commune de Wittelsheim, représentée par son maire en exercice, par Me Bergeron, avocat ; la commune conclut :
- au rejet de la requête ;
- à ce que soit mis à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que la requête est irrecevable ; que les conditions posées par l'article L. 5211-26 du code général des collectivités territoriales ne sont pas cumulatives ; qu'en tout état de cause, si elles devaient être regardées comme telles, les conditions de dissolution, supposées fixées par la délibération du 12 décembre 2003, sont incomplètes et ne permettent pas d'organiser le transfert du passif et de l'actif aux communes membres ; que le non-respect de la loi ne peut être justifié au motif du respect de la continuité du service public, laquelle n'a jamais été remise en cause ; que l'arrêté du 23 décembre 2003 est illégal en ce qu'il opère une motivation par référence sans joindre les documents nécessaires ; que l'arrêté de dissolution méconnaît les dispositions des articles L. 5214-28, L. 5211-25-1 et L. 5211-26 du code général des collectivités locales ; que l'arrêté est illégal en ce qu'il se fonde sur une délibération elle-même illégale puisqu'elle est intervenue en méconnaissance des règles de convocation et d'information des membres de l'assemblée délibérante ; que les formalités spécifiques de dissolution d'un établissement public de coopération intercommunale n'ont pas été respectées ; que le schéma de liquidation présente un contenu non conforme au respect du principe d'équité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mai 2008 :
- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été notifié au MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE le 14 mars 2007 ; que la requête d'appel enregistrée le 14 mai 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel est, dès lors, recevable ;
Au fond :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 5211-26 du code général des collectivités territoriales : (...) Lorsque l'organe délibérant d'un établissement public de coopération intercommunale ne s'est pas prononcé sur l'adoption du compte administratif et sur les conditions de transfert de l'actif et du passif à ses communes membres avant la dissolution dudit établissement, l'arrêté ou le décret de dissolution prévoit la nomination d'un liquidateur, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, et détermine, sous la réserve des droits des tiers, les conditions dans lesquelles il est chargé d'apurer les dettes et les créances et de céder les actifs. (...) ;
Considérant que, par arrêté du 23 décembre 2003, le préfet du Haut-Rhin a prononcé, à la demande de l'ensemble des 11 communes composant la communauté de communes du bassin potassique, à l'exclusion de la commune de Wittelsheim, la dissolution de la communauté de communes avec effet au 31 décembre 2003 et approuvé les modalités et conditions de sa liquidation ; que s'il est constant qu'à la date dudit arrêté, le conseil communautaire ne s'était pas prononcé sur l'adoption du compte administratif de l'exercice 2003, il avait en revanche adopté, par délibération du 12 décembre 2003, les conditions de sa liquidation ; que le préfet pouvait, dès lors, légalement prononcer la dissolution de l'établissement public de coopération intercommunale sans être tenu de nommer un liquidateur ; que le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a estimé que l'absence d'approbation du compte administratif faisait obstacle à ce que le préfet prononce la dissolution de la communauté de communes ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la commune de Wittelsheim tant devant la Cour que devant le tribunal administratif ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 5214-28 du code général des collectivités territoriales : (...) L'arrêté (...) de dissolution détermine, dans le respect des dispositions de l'article L. 5211-25-1 et sous la réserve des droits des tiers, les conditions dans lesquelles la communauté de communes est liquidée. La répartition des personnels concernés entre les communes membres est soumise, pour avis, aux commissions administratives paritaires compétentes. Elle ne peut donner lieu à un dégagement des cadres. Les personnels concernés sont nommés dans un emploi de même niveau et en tenant compte de leurs droits acquis. Les communes attributaires supportent les charges financières correspondantes. ; qu'aux termes de l'article L. 5211-25-1 dans sa rédaction alors en vigueur : En cas de retrait de la compétence transférée à un établissement public de coopération intercommunale : (...) 2° Les biens meubles et immeubles acquis ou réalisés postérieurement au transfert de compétences sont répartis entre les communes qui reprennent la compétence ou entre la commune qui se retire de l'établissement public de coopération intercommunale et l'établissement ou, dans le cas particulier d'un syndicat dont les statuts le permettent, entre la commune qui reprend la compétence et le syndicat de communes. Il en va de même pour le produit de la réalisation de tels biens, intervenant à cette occasion. Le solde de l'encours de la dette contractée postérieurement au transfert de compétences est réparti dans les mêmes conditions entre les communes qui reprennent la compétence ou entre la commune qui se retire et l'établissement public de coopération intercommunale ou, le cas échéant, entre la commune et le syndicat de communes (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la communauté de communes du bassin potassique a demandé sa dissolution en vue de permettre l'adhésion des communes membres à la communauté d'agglomération Mulhouse Sud Alsace ; que les modalités et conditions financières et patrimoniales de la liquidation de la communauté de communes ainsi que la répartition de l'actif et du passif ont été déterminées par le préfet selon les principes définis par la délibération du conseil communautaire du 12 décembre 2003 ; que si, par cette délibération, il a été prévu de partager les ressources communautaires en fonction de la capacité contributive de chaque commune, il a cependant été décidé, sans qu'il soit prévu de compensation pour la commune de Wittelsheim qui refuse l'adhésion à la communauté d'agglomération, de mettre à la disposition gratuite de cette dernière l'ensemble des biens utilisés pour l'exercice des compétences de l'établissement public dissous, de transférer à cette même communauté d'agglomération les opérations d'équipement en cours avec le solde de leur financement, et de répartir entre les seules communes désireuses d'adhérer à la nouvelle structure le mobilier, autre que celui nécessaire et affecté au centre de création et d'activités nouvelles, utilisé par les personnels et considéré comme l'accessoire des contrats de travail ; qu'en outre, le principe de l'affectation des voiries et réseaux divers des zones d'activités communautaires à la commune d'implantation a été acté sans donner lieu à contrepartie au profit des autres communes membres, dont la commune de Wittelsheim, qui ont contribué à la réalisation et au financement de ces ouvrages d'intérêt communautaire ; qu'il ressort, au surplus, des termes de la délibération que la maison du bassin potassique et le centre de création et d'activités nouvelles seront, pour partie, mis à la disposition de la communauté d'agglomération, pour partie maintenus en situation d'indivision, laquelle ne constitue pas une modalité de répartition des biens ou du produit de ces biens au sens de l'article L. 5211-25-1 précité du code général des collectivités territoriales ; que s'il a été décidé, à propos de ces mêmes actifs, d'ailleurs non valorisés, d'accorder une compensation à la commune de Wittelsheim par l'attribution d'un terrain de valeur équivalente à celle des biens transférés, les modalités de cette compensation, non clairement définies, ne sont pas de nature à garantir que les droits de la commune de Wittelsheim seraient respectés ; qu'enfin, il ne ressort ni de l'arrêté du préfet ni de la délibération susmentionnée que la répartition des personnels de la communauté de communes se soit effectuée dans le respect des conditions énoncées à l'article L. 5214-28 précité du code général des collectivités territoriales ; que, pour l'ensemble de ces motifs, la communauté de communes du bassin potassique a méconnu les règles de répartition des personnels et des biens définies par les dispositions précitées des articles L. 5214-28 et L. 5211-25-1 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, la décision du préfet qui valide les options de l'assemblée délibérante de la communauté de commune sans prévoir de mesures propres à pallier les carences constatées, est entachée d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté susmentionné du préfet du Haut-Rhin ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à la commune de Wittelsheim de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à la commune de Wittelsheim la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTREMER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES et à la commune de Wittelsheim.
Copie en sera donnée pour information à la communauté de communes du bassin potassique.
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N° 07NC00596