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18/12/2008 | FRANCE | N°06NC01301

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 18 décembre 2008, 06NC01301


Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 15 septembre 2006 et 18 février 2008, présentés pour Mme Denise X demeurant ..., M. Simon X demeurant ...,

Mme Marie-Noëlle Y, demeurant à ... et Mme Colette Z demeurant ... par Me Suissa, avocat ;

Les consorts X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0300082 du 20 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 24 septembre 2002 par laquelle la commission départementale d'aménagement foncier du Doubs a statu

é sur leur réclamation dirigée contre le remembrement de leurs terres situées sur l...

Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 15 septembre 2006 et 18 février 2008, présentés pour Mme Denise X demeurant ..., M. Simon X demeurant ...,

Mme Marie-Noëlle Y, demeurant à ... et Mme Colette Z demeurant ... par Me Suissa, avocat ;

Les consorts X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0300082 du 20 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 24 septembre 2002 par laquelle la commission départementale d'aménagement foncier du Doubs a statué sur leur réclamation dirigée contre le remembrement de leurs terres situées sur le territoire de la commune de La Chenalotte ;

2°) d'annuler la décision du 24 septembre 2002 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- le jugement est entaché d'irrégularité tenant à l'absence de réponses à des moyens soulevés en 1ère instance,

- la décision de la commission est entachée d'illégalité tenant à la violation des articles

L. 123-1 , L. 123-2 , L. 123-3 et L. 123-4 du code rural ainsi que de détournement de pouvoir ;

Vu le jugement et la décision attaquée ;

Vu enregistrés les 1er août 2007 et 10 juillet 2008, les mémoires présentés par le ministre de l'agriculture et de la pêche tendant au rejet de la requête, à ce que soit mise à la charge des consorts X la somme de 713 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le ministre fait valoir que tant en ce qui concerne les omissions à statuer de la part du tribunal que les illégalités énoncés à l'encontre de la décision, les moyens sont infondés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2008 :

- le rapport de M. Job, président,

- les observations de Me Suissa, avocate des consorts X,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le 15 avril 2002, la commission départementale d'aménagement foncier du Doubs a statué sur la réclamation concernant le remembrement des terres situées dans la commune de La Chenalotte, présentée conjointement, d'une part, par Mme Denise X concernant son compte propre n° 16, d'autre part, par l'indivision X issue de la communauté formée par Mme X et son défunt mari représenté par ses héritiers compte n° 15 ; que si ces réclamations non individualisées concernaient deux comptes, et portaient sur la violation des seules dispositions des articles L. 123-1 et L. 123-3 du code rural, il est constant que la commission départementale, rejetant implicitement la réclamation portant sur le compte n° 15, a procédé à la modification des attributions du compte n° 16 par agrandissement de la parcelle ZB 14 dit « Clos Charlemagne » ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'en se prononçant en application de l'article L. 121-1 du code rural sur la contribution de l'aménagement communal par la mise en oeuvre d'un remembrement, puis en précisant le caractère définitif acquis par l'arrêté du 10 août 1999 du préfet du Doubs, publié au journal officiel le 27 janvier 2000, ordonnant le remembrement en cause et fixant son périmètre, le tribunal a répondu au moyen relatif à l'utilité du remembrement ;

Considérant, en deuxième lieu, que, compte tenu de ce qui précède et en précisant encore que les consorts X ne pouvaient utilement invoquer les attributions qu'ils jugeaient plus favorables, faites à d'autres agriculteurs, le Tribunal a répondu au moyen tiré du détournement de pouvoir ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en jugeant irrecevables certains moyens soutenus par les intéressés, le tribunal y a nécessairement répondu ;

Considérant, en dernier lieu, qu'en précisant qu'un remembrement s'appréciait par compte et non par parcelles, puis en répondant aux réclamations, d'une part, en fonction de moyens communs, d'autre part, en fonction de moyens propres à chaque compte, le tribunal a écarté le moyen erroné tiré de la propriété d'un seul tenant située sur le territoire de la commune ; qu'il résulte de tout ce qui précède que les moyens tirés de l'irrégularité du jugement ne peuvent qu'être écartés ;

Sur la légalité de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier :

En ce qui concerne le compte d'indivision X n° 15 :

Considérant en premier lieu, qu'ainsi qu'il est ci-dessus rappelé, les consorts X n'ont pas porté leur réclamation devant la commission départementale sur la violation des dispositions de l'article L. 123-4 du code rural, et ladite commission n'a pas modifié leurs attributions; que la circonstance qu'ils aient évoqué cette contestation devant les sous-commissions puis devant la commission communale est inopérante; que, par suite, le tribunal n'a pas commis d'erreur en écartant comme irrecevable le moyen tiré de l'application de cet article ;

Considérant, en deuxième lieu, que le remembrement s'apprécie par compte ; que les parcelles cadastrées anciennement 107 et 117 ( compte n° 16) ne formaient pas avec les parcelles 112, 262 et 264 ( compte n° 15 ) une propriété continue d'un seul tenant ; que le moyen qui pourrait en être tiré de la violation de l'article L. 123-6 du code rural manque en fait ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 123-3 du code rural dans sa rédaction alors en vigueur : « Doivent être réattribués à leurs propriétaires, sauf accord contraire, et ne subir que les modifications de limites indispensables à l'aménagement : (...) . / 4° Les immeubles présentant, à la date de l'arrêté fixant le périmètre de remembrement, les caractéristiques d'un terrain à bâtir au sens du 1° du paragraphe II de l'article L. 13-15 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; / 5° De façon générale, les immeubles dont les propriétaires ne peuvent bénéficier de l'opération de remembrement, en raison de l'utilisation spéciale desdits immeubles » ;

Considérant, d'une part, que la circonstance que certaines parcelles d'apports avaient une « valeur constructible à court ou moyen terme » du fait qu'elles étaient attenantes à la zone bâtie du village n'est pas de nature à leur conférer le caractère d'immeuble justifiant l'application de l'alinéa 4 de l'article L. 123-3 du code rural ;

Considérant, d'autre part, qu'il est constant que les consorts X ne sont propriétaires d'aucune source située sur leurs terres ; que le moyen qui pourrait être tiré de la violation de l'article L. 123-3 du code rural manque en fait ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L.123-1 du code rural : «Le remembrement, applicable aux propriétés rurales non bâties, se fait au moyen d'une nouvelle distribution des parcelles morcelées et dispersées. Il a principalement pour but, par la constitution d'exploitations rurales d'un seul tenant ou à grandes parcelles bien groupées, d'améliorer l'exploitation agricole des biens qui y sont soumis. Il doit également avoir pour objet l'aménagement rural du périmètre dans lequel il est mis en oeuvre. Sauf accord des propriétaires et exploitants intéressés, le nouveau lotissement ne peut allonger la distance moyenne des terres au centre d'exploitation principale, si ce n'est dans la mesure nécessaire au regroupement parcellaire» ;

Considérant que si les consorts X font valoir que l'eau consommée pour l'abreuvage de leurs animaux tirée d'abreuvoirs qui seront alimentés par le réseau communal leur sera désormais facturée, alors qu'ils bénéficiaient, avant le remembrement, des points d'eau alimentés par la source provenant d'un fonds voisin, ils n'établissent pas qu'une telle circonstance serait à l'origine d'une aggravation des conditions d'exploitation ;

Considérant, enfin que le moyen tiré du détournement de pouvoir n'est pas établi ;

En ce qui concerne le compte de Mme X n° 16 :

Considérant, en premier lieu, que les parcelles cadastrées anciennement 107 et 117 ( compte n° 16) ne formaient pas avec les parcelles 112, 262 et 264 ( compte n° 15 ) une propriété continue d'un seul tenant; que le moyen qui pourrait en être tiré de la violation de l'article L. 123-6 du code rural manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, d'une part, que la circonstance que certaines parcelles d'apports avaient une « valeur constructible à court ou moyen terme » du fait qu'elles étaient attenantes à la zone bâtie du village n'est pas de nature à leur conférer le caractère d'immeuble justifiant l'application de l'alinéa 4 de l'article L. 123-3 du code rural ; qu'au surplus, l'ancienne parcelle cadastrée section A n° 178 jouxtant le village a été entièrement réattribuée sous le n° ZA 19 ;

Considérant, d'autre part, qu'il est constant que Mme X n'est propriétaire d'aucune source située sur ses terrains ; que le moyen qui pourrait être tiré de la violation de l'article L. 123-3 du code rural manque en fait ;

Considérant, en troisième lieu, d'une part, que si Mme X fait valoir que l'eau consommée pour l'abreuvage des animaux, tirée d'abreuvoirs qui seront alimentés par le réseau communal, lui sera désormais facturée, alors qu'elle bénéficiait, avant le remembrement, des points d'eau alimentés par la source provenant d'un fonds voisin, elle n'établit pas qu'une telle circonstance serait à l'origine d'une aggravation des conditions d'exploitation ;

Considérant, d'autre part, que la propriété de Mme X se trouvait, avant remembrement morcelée en 4 îlots dont deux repartis au nord du village ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'elle énonce, sa propriété ne formait pas une unité d'exploitation ;

Considérant enfin, que la circonstance que le chemin d'exploitation n° 3 qui mène à la parcelle ZB 14 desservirait également le terrain de football de la commune n'est pas de nature à faire regarder cette parcelle comme difficilement exploitable ; qu'ainsi, le moyen tiré de la violation de l'article L. 123-1 du code rural n'est pas fondé ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 123-4 du code rural dans sa rédaction alors applicable : « Chaque propriétaire doit recevoir, par la nouvelle distribution, une superficie globale équivalente, en valeur de productivité réelle, à celle des terrains qu'il a apportés, déduction faite de la surface nécessaire aux ouvrages collectifs mentionnés à l'article L. 123-8 et compte tenu des servitudes maintenues ou créées. (...) / Sauf accord exprès des intéressés, l'équivalence en valeur de productivité réelle doit, en outre, être assurée par la commission communale dans chacune des natures de culture qu'elle aura déterminées. Il peut toutefois être dérogé, dans les limites qu'aura fixées la commission départementale pour chaque région agricole du département, à l'obligation d'assurer l'équivalence par nature de culture» ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en échange de 5 parcelles formant 4 îlots, apports réduits d'une superficie de 10 ha 26 ares 49 centiares valant 92196 points,

Mme X a reçu en attributions, 3 lots d'une superficie de 10 ha 53 ares 60 centiares valant 89 909 points ; que, d'une part, en soutenant que les parcelles attribuées anciennement communales n'ont qu'une valeur agronomique restreinte à nulle sans possibilité de mise en valeur par des travaux adéquats sans préciser le compte intéressé ni les parcelles d'attributions en question, l'intéressée ne met pas la Cour à même d'apprécier la pertinence de la contestation ; que, d'autre part, Mme X se borne à renvoyer la Cour à l'étude d'un rapport qu'elle produit pour soutenir que le principe d'équivalence en valeur de productivité réelle a été méconnu pour l'une des parcelles d'attributions alors que ce principe s'apprécie globalement par compte de propriété ; que, nonobstant cette observation, l'étude à laquelle elle renvoie présente un caractère partiel et tendancieux dans la mesure où elle est composée de simples réflexions plus à dominante urbanistique qu'à vocation culturale, sans comparaison réelle et chiffrée ni avec l'ensemble des terrains d'apports, dont une bonne partie appelée « champs de la roche ... », située dans le même compartiment de terrains, ni avec leur valeur culturale, ni avec les parcelles étalons; qu'ainsi, Mme X n'établit pas l'erreur qu'aurait commise la commission départementale d'aménagement foncier en maintenant la parcelle ZB 14 dans ses attributions et en augmentant encore sa superficie ;

Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré du détournement de pouvoir n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X et les consorts X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête présentée par Mme X et les consorts X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le ministre de l'agriculture et de la pêche tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3: Le présent arrêt sera notifié à Mme Denise X, à M. Simon X, à Mme Marie-Noëlle Y. à Mme Colette Z et au ministre de l'agriculture et de la pêche.

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06NC01301


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC01301
Date de la décision : 18/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DESRAME
Rapporteur ?: M. Pascal JOB
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : SCP DUFAY SUISSA CORNELOUP

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-12-18;06nc01301 ?
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