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12/12/2013 | FRANCE | N°12NC01120

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 12 décembre 2013, 12NC01120


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 2 juillet 2012, présentée pour M. A... B..., demeurant au..., par Me Bergmann, avocat au barreau de Colmar ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903838,0903839,0904114,0904117 en date du 12 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes en décharge des compléments d'impôt sur le revenu, en droits et pénalités, auxquels il a été assujetti au titre des années 2002, 2003, 2004, 2005 et 2006, et des rappels de TVA (droits et pénalités) mis à sa charge au

titre des périodes du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 et du 1er janvier 2...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 2 juillet 2012, présentée pour M. A... B..., demeurant au..., par Me Bergmann, avocat au barreau de Colmar ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903838,0903839,0904114,0904117 en date du 12 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes en décharge des compléments d'impôt sur le revenu, en droits et pénalités, auxquels il a été assujetti au titre des années 2002, 2003, 2004, 2005 et 2006, et des rappels de TVA (droits et pénalités) mis à sa charge au titre des périodes du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 et du 1er janvier 2005 au 31 octobre 2007 ;

2°) de prononcer les décharges demandées ;

Il soutient que les opérations de visite et de saisie pratiquées le 30 mai 2006 sont irrégulières et emportent l'annulation de tous les actes subséquents ; qu'en effet, l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, tel qu'il est issu de l'article 164 de la loi du 4 août 2008, méconnaît la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'il institue des dispositions transitoires ; que, de plus, en vertu de l'arrêt Ravon rendu par la Cour européenne des droits de l'homme, toutes les perquisitions intervenues avant le 4 août 2008 sont irrégulières ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2012, présenté par le ministre délégué chargé du budget ;

Le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, et de l'article 164 de la loi du 4 août 2008, sont compatibles avec les dispositions de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que dès lors, les visites domiciliaires effectuées sont régulières ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 novembre 2013 :

- le rapport de M. Commenville, président,

- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public ;

1. Considérant que Monsieur B...a fait l'objet, le 30 mai 2006, de trois procédures de visite et de saisie sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur ; qu'au vu des documents ainsi obtenus, Monsieur B...s'est vu notifier des rehaussements d'impôt portant sur les années 2002 à 2006 au titre des bénéfices non commerciaux, de l'impôt sur le revenu, et de la taxe sur la valeur ajoutée ; que par deux ordonnances des 26 novembre 2009 et 7 janvier 2010, les présidents des Cours d'appel de Colmar et de Paris ont rejeté les recours formés par M. B... contre les ordonnances des juges de la liberté et de la détention autorisant les opérations de visite et de saisie domiciliaires ; que le requérant demande la décharges des impositions supplémentaires mises à sa charge ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales dans sa rédaction issue de l'article 164 de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie : " I. Lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou de la taxe sur la valeur ajoutée (...) elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l'administration des impôts, ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des impôts, à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support. II. Chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter. (...) L'ordonnance peut faire l'objet d'un appel devant le premier président de la cour d'appel. (...) Suivant les règles prévues par le code de procédure civile, cet appel doit être exclusivement formé par déclaration remise ou adressée, par pli recommandé ou, à compter du 1er janvier 2009, par voie électronique, au greffe de la cour dans un délai de quinze jours. Ce délai court à compter soit de la remise, soit de la réception, soit de la signification de l'ordonnance. Cet appel n'est pas suspensif. (...) L'ordonnance du premier président de la cour d'appel est susceptible d'un pourvoi en cassation, selon les règles prévues par le code de procédure civile. Le délai du pourvoi en cassation est de quinze jours. (...) III. (...) Le premier président de la cour d'appel connaît des recours contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie. (...). Suivant les règles prévues par le code de procédure civile, ce recours doit être exclusivement formé par déclaration remise ou adressée, par pli recommandé ou, à compter du 1er janvier 2009, par voie électronique, au greffe de la cour dans un délai de quinze jours. Ce délai court à compter de la remise ou de la réception soit du procès-verbal, soit de l'inventaire, mentionnés au premier alinéa. Ce recours n'est pas suspensif. L'ordonnance du premier président de la cour d'appel est susceptible d'un pourvoi en cassation, selon les règles prévues par le code de procédure civile. Le délai de pourvoi en cassation est de quinze jours (...) " ; qu'aux termes du IV du même article 164 : " 1. Pour les procédures de visite et de saisie prévues à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales pour lesquelles le procès-verbal ou l'inventaire mentionnés au IV de cet article a été remis ou réceptionné antérieurement à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, un appel contre l'ordonnance mentionnée au II de cet article, alors même que cette ordonnance a fait l'objet d'un pourvoi ayant donné lieu à cette date à une décision de rejet du juge de cassation, ou un recours contre les opérations de visite ou de saisie peut, dans les délais et selon les modalités précisées au 3 du présent IV, être formé devant le premier président de la cour d'appel dans les cas suivants : (...) d) Lorsque, à partir d'éléments obtenus par l'administration dans le cadre d'une procédure de visite et de saisie, des impositions ont été établies (...) et qu'elles font (...) l'objet, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, d'une réclamation ou d'un recours contentieux devant le juge, sous réserve des affaires dans lesquelles des décisions sont passées en force de chose jugée. Le juge, informé par l'auteur de l'appel ou du recours ou par l'administration, sursoit alors à statuer jusqu'au prononcé de l'ordonnance du premier président de la cour d'appel (...) 3. Dans les cas mentionnés aux 1 et 2, l'administration informe les personnes visées par l'ordonnance ou par les opérations de visite et de saisie de l'existence de ces voies de recours et du délai de deux mois ouvert à compter de la réception de cette information pour, le cas échéant, faire appel contre l'ordonnance ou former un recours contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie. Cet appel et ce recours sont exclusifs de toute appréciation par le juge du fond de la régularité du déroulement des opérations de visite et de saisie. Ils s'exercent selon les modalités prévues respectivement aux articles L. 16 B et L. 38 du livre des procédures fiscales et à l'article 64 du code des douanes. En l'absence d'information de la part de l'administration, ces personnes peuvent exercer, selon les mêmes modalités, cet appel ou ce recours sans condition de délai. (...) " ;

3. Considérant que l'article 164 précité de la loi du 4 août 2008 a modifié les dispositions, dont il a été fait application en l'espèce, de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales en conséquence de l'arrêt Ravon et autres c/ France du 21 février 2008 par lequel la Cour européenne des droits de l'homme a jugé que les voies de recours alors ouvertes aux contribuables pour contester la régularité des visites et saisies opérées sur le fondement dudit article ne garantissaient pas l'accès à un procès équitable au sens du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il a, en particulier, instauré un appel devant le premier président de la cour d'appel contre l'ordonnance autorisant la visite et un recours devant ce même juge contre le déroulement des opérations de visite et de saisie, soumis aux règles du code de procédure civile, les ordonnances rendues en appel étant susceptibles d'un pourvoi en cassation ; que le d) précité du 1 du IV de l'article 164 a par ailleurs prévu que cet appel et ce recours étaient rétroactivement ouverts pour les procédures de visite et de saisie ayant permis, comme en l'espèce, à l'administration d'obtenir des éléments à partir desquels des impositions faisant l'objet d'un recours contentieux ont été établies ; que le caractère rétroactif de cette faculté a pour effet de rendre inopérant le moyen tiré par le requérant de l'incompatibilité des dispositions de l'article L. 16 B, dans leur rédaction antérieure à la date d'entrée en vigueur de la loi du 4 août 2008, avec le droit à un procès équitable garanti par l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par ailleurs, le IV de l'article 164 de la loi susvisée n'a pas eu pour objet ni pour effet de valider rétroactivement les ordonnances et procédures de visite et de saisie contestées, dès lors que le requérant pouvait saisir le premier président de la Cour d'appel, ainsi qu'il l'a d'ailleurs fait ; que la possibilité pour le contribuable de contester par tout moyen le bien-fondé des impositions mises à sa charge ne s'en est donc trouvée nullement affectée ; que le requérant n'est par suite pas fondé à soutenir que ces dispositions, qui permettent aux contribuables ayant fait l'objet d'une procédure de visite et de saisie sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales avant leur entrée en vigueur, d'exercer les voies de recours nouvellement instaurées pour assurer la compatibilité dudit article avec la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, nonobstant leur portée rétroactive, auraient pour conséquence de modifier, au détriment des contribuables et en violation du droit de toute personne à un procès équitable garanti par cette convention, les règles que le juge de l'impôt doit appliquer ; que, dès lors, si le requérant se prévaut de l'état du droit résultant de la décision susmentionnée Ravon de la Cour européenne des droits de l'homme, qui aurait dû conduire selon lui à la décharge des impositions en litige dès lors que les éléments à partir desquels ont été établies lesdites impositions auraient été obtenus à l'issue d'une procédure de visite et de saisie dépourvue de base légale, il ne s'est pas trouvé privé, par l'effet des dispositions de l'article 164 de la loi du du 4 août 2008 , de la possibilité d'obtenir dans la présente instance la décharge de ces impositions en suite, notamment, de l'annulation éventuelle par le premier président de la Cour d'appel, dûment saisi, de l'ordonnance autorisant la visite et les saisies domiciliaires ; qu'en l'espèce, il a d'ailleurs saisi le Premier Président de la Cour d'appel de Colmar et le Premier Président de la Cour d'appel de Paris qui chacun, par une ordonnance en date du 26 novembre 2009 et du 7 janvier 2010, a rejeté l'appel qu'il avait formé contre les ordonnances des 24 mai 2006, 26 mai 2006 et 29 mai 2006 ayant autorisé les visites et saisies, ainsi que son recours contre le déroulement des opérations de visite et de saisie ; qu'ainsi, il n'est pas fondé à soutenir que la procédure de recours prévue par l'article 164 de la loi du 4 août 2008 demeure contraire à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'économie et des finances.

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12NC01120


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC01120
Date de la décision : 12/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-01-03-01 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Contrôle fiscal.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: M. Bernard COMMENVILLE
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : BERGMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-12-12;12nc01120 ?
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