Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 février 2013, complétée par un mémoire enregistré le 28 octobre 2013, présentée pour la SARL Toutimmo, dont le siège est 15 rue Thiers, à Epinal (88000) par Me Angelot, avocat ;
La société demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1101508 en date du 4 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge qu'elle avait déclarée au titre des années 2007 et 2008 pour un montant de 215 053 euros ;
2°) d'ordonner la restitution de cette somme ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient :
- que le 7° de l'article 257 du code général des impôts n'est pas compatible avec l'article 135 de la directive n° 206/112/CE en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée applicable aux cessions de terrain à bâtir aux particuliers ; que le 6° de l'article 257, présentant un caractère subsidiaire par rapport au 7° et utilisant la taxe sur la valeur ajoutée comme un impôt direct, ne peut dès lors davantage servir de fondement à l'application de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge ; qu'en conséquence, sa demande de restitution de la taxe sur la valeur ajoutée est fondée ;
- que la taxe sur la valeur ajoutée n'étant pas due, il n'y a pas lieu de rechercher qui doit être son redevable ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances ;
Le ministre conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que les opérations en litige, opérées par un professionnel de l'immobilier, ont à bon droit et conformément au droit communautaire, été soumises à la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge sur le fondement du 6° de l'article 257 du code général des impôts, sans qu'ait d'influence la circonstance que le 7° du même article serait en partie incompatible avec le droit communautaire ;
Vu la lettre du 3 décembre 2013 par laquelle les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience du 16 janvier 2014 et que l'instruction pourrait être close à partir du 18 décembre 2013 sans information préalable ;
Vu l'avis d'audience portant clôture de l'instruction immédiate pris le 20 décembre 2013 en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive n° 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 janvier 2014 :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public ;
1. Considérant que pour les périodes allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2007 et du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008, la SARL Toutimmo a déclaré selon le régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge, la taxe qu'elle avait collectée à raison de ventes de terrains à bâtir effectuées auprès de particuliers en qualité de lotisseur ; qu'au motif que le régime de taxation sur la marge prévu par la loi fiscale pour ces ventes, serait incompatible avec les objectifs de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de la taxe sur la valeur ajoutée, la SARL Toutimmo a adressé à l'administration fiscale, le 23 décembre 2010, une réclamation tendant notamment à la restitution de la taxe qu'elle avait ainsi déclarée, pour un montant total de 215 053 euros ; que par une décision du 22 juin 2011, le service a rejeté la réclamation en tant qu'elle concernait ces opérations au motif que la redevable avait appliqué un régime conforme au droit communautaire ;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 12 de la directive 2006/112/CE : " 1. Les États membres peuvent considérer comme assujetti quiconque effectue, à titre occasionnel, une opération relevant des activités visées à l'article 9, paragraphe 1, deuxième alinéa, et notamment une seule des opérations suivantes (...) b) la livraison d'un terrain à bâtir " ; que l'article 135 de cette directive dispose que : " 1. Les États membres exonèrent les opérations suivantes : (...) les livraisons de biens immeubles non bâtis autres que celles des terrains à bâtir visés à l'article 12, paragraphe 1, point b) " ; qu'en application de son article 392 : " Les États membres peuvent prévoir que, pour les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n'a pas eu droit à déduction à l'occasion de l'acquisition, la base d'imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d'achat " ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 257 du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : " Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée (...) 6° Sous réserve du 7° : a. les opérations qui portent sur des immeubles (...) et dont les résultats doivent être compris dans les bases de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux 7° Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles. Ces opérations sont imposables même lorsqu'elles revêtent un caractère civil. 1. Sont notamment visés : les ventes (...) de terrains à bâtir, des biens assimilés à ces terrains par l'article 691 (...) " ; que l'article 268 alors en vigueur de ce même code dispose que : " En ce qui concerne les opérations visées au 6° de l'article 257, la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée est constituée par la différence entre : a. D'une part, le prix exprimé et les charges qui viennent s'y ajouter, ou la valeur vénale du bien si elle est supérieure au prix majoré des charges ; b. D'autre part (...) les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l'acquisition du bien " ;
4. Considérant que la SARL Toutimmo soutient que les dispositions du 7° de l'article 257 du code général des impôts, dans leur rédaction alors en vigueur, sont incompatibles avec les objectifs de la directive 2006/112/CE ; que, toutefois, cette circonstance est par elle-même sans incidence sur la compatibilité des dispositions du 6° de l'article 257 sur le fondement duquel la société Toutimmo a été imposée, alors même que le 6° présente un caractère subsidiaire par rapport au 7° ; qu'ainsi, alors qu'il résulte de l'instruction et n'est pas contesté que les opérations à raison desquelles la société Toutimmo a déclaré la taxe sur la valeur ajoutée dont elle demande la restitution ont été assujetties à cette taxe sur le fondement du 6° de l'article 257 du code général des impôts, le moyen invoqué par la société requérante est sans incidence sur le bien-fondé de sa demande en restitution ;
5. Considérant, au surplus, qu'il résulte des stipulations de la directive 2006/112/CE que, lorsque l'assujetti n'a pas eu de droit à déduction lors de l'acquisition d'un terrain à bâtir, les États membres peuvent assujettir à la taxe sur la valeur ajoutée les cessions de terrains à bâtir en prévoyant que la base d'imposition de la taxe sera égale à la différence entre le prix de vente et le prix d'achat du terrain ; qu'ainsi, le régime alors prévu par les dispositions combinées du 6° de l'article 257 du code général des impôts et de l'article 268 du même code, en tant qu'il prévoyait que les professionnels assujettis effectuant des livraisons de terrains à bâtir n'ayant entraîné aucune déduction lors de l'acquisition, étaient redevables de la taxe sur la valeur ajoutée calculée sur la marge, n'était pas incompatible avec les objectifs de cette directive ; que par suite, alors qu'il résulte de l'instruction que les opérations à raison desquelles la SARL Toutimmo a déclaré la taxe sur la valeur ajoutée dont elle demande la restitution étaient constituées par de telles livraisons de terrains à bâtir, la demande en restitution n'est en tout état de cause pas fondée ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL Toutimmo n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la SARL Toutimmo la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Toutimmo est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Toutimmo et au ministre de l'économie et des finances.
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