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20/03/2014 | FRANCE | N°13NC01482

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 20 mars 2014, 13NC01482


Vu la décision n° 361033 du 25 juillet 2013 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, saisi d'un pourvoi présenté par le ministre de l'économie et des finances, annulé l'arrêt n° 11NC00400 de la Cour administrative d'appel de Nancy en date du 21 juin 2012 statuant sur la requête de MmeB..., et a renvoyé l'affaire devant la Cour ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 mars 2011, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me C... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701002 en date du 27 janvier 2

011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa deman...

Vu la décision n° 361033 du 25 juillet 2013 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, saisi d'un pourvoi présenté par le ministre de l'économie et des finances, annulé l'arrêt n° 11NC00400 de la Cour administrative d'appel de Nancy en date du 21 juin 2012 statuant sur la requête de MmeB..., et a renvoyé l'affaire devant la Cour ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 mars 2011, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me C... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701002 en date du 27 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande en restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittés au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ;

2°) de prononcer la restitution demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la taxe qu'elle a versée a méconnu l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 et le principe de neutralité fiscale ;

- ayant obtenu le 9 décembre 2000 un diplôme en ostéopathie délivré par un établissement agréé, l'Ecole supérieure d'ostéopathie d'Emerainville, après avoir suivi un cursus de 5 050 heures sur six ans et ayant soutenu une thèse de troisième cycle devant un jury international à la Faculté de médecine de Genève, elle apporte ainsi les éléments démontrant qu'elle a prodigué des soins d'un niveau équivalent à ceux d'un médecin au cours de la période en litige ;

- postérieurement à la période en litige, elle a obtenu, le 17 mars 2008, la reconnaissance de la qualité d'ostéopathe ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 juillet 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- les dispositions de l'article 75 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé sont sans influence en matière fiscale ;

- la reconnaissance de l'ostéopathie par la loi ne lui confère pas le caractère d'une profession médicale ou paramédicale réglementée ;

- la requérante ne démontre pas que les actes qu'elle a pratiqués étaient équivalents à ceux d'un médecin au cours de la période en litige ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

Vu le décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 relatif aux actes et aux conditions d'exercice de l'ostéopathie ;

Vu le décret n° 2007-437 du 25 mars 2007 relatif à la formation des ostéopathes et à l'agrément des établissements de formation ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 février 2014 :

- le rapport de Mme Bonifacj, président,

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme B..., qui exerce l'activité d'ostéopathe, a demandé la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a spontanément acquittés au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006, en estimant pouvoir bénéficier des dispositions de l'article 261 du code général des impôts relatives à l'exonération de cette taxe ; que, par un arrêt n° 11NC00400 en date du 21 juin 2012, la Cour administrative d'appel de Nancy a annulé le jugement du 27 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande Mme B...tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée litigieux et a fait droit à sa demande ; que, par une décision n° 361033 du 25 juillet 2013, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté par le ministre de l'économie et des finances, annulé cet arrêt, et renvoyé l'affaire devant la Cour ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un contribuable ne peut obtenir la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés conformément à ses déclarations qu'à la condition d'en établir le mal-fondé ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 13, A, paragraphe 1 de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires : " Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : / (...) c) les prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l'exercice des professions médicales et paramédicales telles qu'elles sont définies par l'Etat membre concerné (...) " ; qu'en vertu du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : " Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées (...) " ; qu'en limitant l'exonération qu'elles prévoient aux soins dispensés par les membres des professions médicales et paramédicales soumises à réglementation, ces dispositions ne méconnaissent pas l'objectif poursuivi par l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de la sixième directive, précité, qui est de garantir que l'exonération s'applique uniquement aux prestations de soins à la personne fournies par des prestataires possédant les qualifications professionnelles requises ; qu'en effet, la directive renvoie à la réglementation interne des Etats membres la définition de la notion de professions paramédicales, des qualifications requises pour exercer ces professions et des activités spécifiques de soins à la personne qui relèvent de telles professions ;

4. Considérant toutefois que, conformément à l'interprétation des dispositions de la sixième directive qui résulte de l'arrêt rendu le 27 avril 2006 par la Cour de justice des Communautés européennes dans les affaires C-443/04 et C-444/04, l'exclusion d'une profession ou d'une activité spécifique de soins à la personne de la définition des professions paramédicales retenue par la réglementation nationale aux fins de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée prévue à l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de cette directive serait contraire au principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de taxe sur la valeur ajoutée s'il pouvait être démontré que les personnes exerçant cette profession ou cette activité disposent, pour la fourniture de telles prestations de soins, de qualifications professionnelles propres à assurer à ces prestations un niveau de qualité équivalente à celles fournies par des personnes bénéficiant, en vertu de la réglementation nationale, de l'exonération ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 75 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dans sa version applicable au présent litige : " L'usage professionnel du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur est réservé aux personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation spécifique à l'ostéopathie ou à la chiropraxie délivrée par un établissement de formation agréé par le ministre chargé de la santé dans des conditions fixées par décret. Le programme et la durée des études préparatoires et des épreuves après lesquelles peut être délivré ce diplôme sont fixés par voie réglementaire. (...) / Les praticiens en exercice, à la date d'application de la présente loi, peuvent se voir reconnaître le titre d'ostéopathe ou de chiropracteur s'ils satisfont à des conditions de formation ou d'expérience professionnelle analogues à celles des titulaires du diplôme mentionné au premier alinéa. Ces conditions sont déterminées par décret. (...) / Un décret établit la liste des actes que les praticiens justifiant du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur sont autorisés à effectuer, ainsi que les conditions dans lesquelles ils sont appelés à les accomplir. / Ces praticiens ne peuvent exercer leur profession que s'ils sont inscrits sur une liste dressée par le représentant de l'Etat dans le département de leur résidence professionnelle, qui enregistre leurs diplômes, certificats, titres ou autorisations " ;

6. Considérant que le décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 relatif aux actes et aux conditions d'exercice de l'ostéopathie et le décret n° 2007-437 du même jour relatif à la formation des ostéopathes et à l'agrément des établissements de formation, pris pour l'application de cet article, n'ont été publiés que le 27 mars 2007 ; qu'ainsi, durant la période allant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006, les actes d'ostéopathie ne pouvaient être pratiqués que par les docteurs en médecine et, pour certains actes, sur prescription médicale, par les masseurs-kinésithérapeutes, en vertu de la réglementation de leur profession, notamment des articles R. 4321-5 et R. 4321-7 du code de la santé publique ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, pour obtenir la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittés sur ses prestations d'ostéopathie, l'intéressée doit démontrer qu'elle disposait, pour la fourniture de ces prestations, de qualifications professionnelles propres à leur assurer un niveau de qualité équivalente à celles fournies, selon le cas, par un médecin ou par un masseur-kinésithérapeute ; qu'une telle appréciation ne peut être portée qu'au vu de la nature des actes accomplis sous la dénomination d'actes d'ostéopathie et, s'agissant des actes susceptibles de comporter des risques en cas de contre-indication médicale, en considération des conditions dans lesquelles ils ont été effectués ; qu'est, en revanche, sans incidence, pour apprécier la nature de ces actes au regard de leur assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période en cause, la circonstance que l'intéressée a pu ultérieurement faire valoir certains éléments relatifs à sa pratique professionnelle, lors de la mise en oeuvre des mesures transitoires prévues à l'article 16 du décret n°2007-435 du 25 mars 2007 en vue d'autoriser l'usage du titre professionnel d'ostéopathe par les praticiens en exercice à la date de publication de ce décret ;

8. Considérant qu'il appartient, dès lors, à Mme B..., pour mettre le juge à même de s'assurer que la condition tenant à la qualité des actes était remplie, de produire, d'une part, et sous réserve de l'occultation des noms des patients, des éléments relatifs à sa pratique permettant d'appréhender, sur une période significative, la nature des actes accomplis et les conditions dans lesquelles ils l'ont été et, d'autre part, tous éléments utiles relatifs à ses qualifications professionnelles ;

9. Considérant que Mme B...se borne à se prévaloir de l'obtention, le 9 décembre 2000, d'un diplôme en ostéopathie délivré par un établissement agréé, l'Ecole supérieure d'ostéopathie d'Emerainville, après avoir suivi un cursus de 5 050 heures sur six ans et de l'obtention d'une thèse de troisième cycle de la Faculté de médecine de Genève, et de l'autorisation d'user du titre professionnel d'ostéopathe qui lui a été délivrée le 17 mars 2008 ; qu'elle n'a, en revanche, produit aucun élément relatif à sa pratique professionnelle, entre 2004 et 2006, de nature à apprécier la nature des actes accomplis et les conditions dans lesquelles ils l'ont été ; que l'intéressée n'établit pas ainsi que ces actes d'ostéopathie auraient pu être considérés comme d'une qualité équivalente à ceux qui, s'ils avaient été effectués, selon le cas, par un médecin ou par un masseur-kinésithérapeute pratiquant l'ostéopathie, pour bénéficier de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, les moyens tirés de la violation du principe de neutralité fiscale, de l'article 13, A, paragraphe 1 de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires et des objectifs définis par cet article ne peuvent qu'être écartés ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Melle B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au ministre de l'économie et des finances.

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N° 13NC01482


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01482
Date de la décision : 20/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Julienne BONIFACJ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : FLAICHER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-03-20;13nc01482 ?
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