Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...A...épouse D...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2013 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et la décision du 30 août 2013 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté son recours gracieux.
Par un jugement n° 1302668 du 11 février 2014, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 avril et 3 octobre 2014, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1302668 du tribunal administratif de Nancy en date du 11 février 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle en date du 23 juillet 2013 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer une carte de séjour temporaire ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme A...soutient que :
- l'arrêté est entaché d'incompétence ;
- il est insuffisamment motivé ;
- la décision portant refus de séjour aurait dû être précédée d'une saisine de la commission du titre de séjour ;
- l'article L. 313-11 (4°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ont été méconnus ;
- l'arrêté porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 août 2014, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que l'ensemble des moyens invoqués sont infondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord du 27 décembre 1968 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stefanski, président.
1. Considérant que MmeA..., ressortissante algérienne née en 1985, est entrée en France le 28 mai 2011 sous couvert d'un visa de court séjour à destination de l'Allemagne ; qu'elle a épousé, le 30 juillet 2011, un ressortissant français, M.D... ; que le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a délivré un titre de séjour mention " vie privée et familiale " valable du 30 juillet 2011 au 29 juillet 2012 ; que, le 23 juillet 2013, le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que Mme A...relève appel du jugement du 11 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle et de la décision du 30 août 2013 rejetant son recours gracieux ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté litigieux a été signé par M. Jean-François Raffy, secrétaire général de la préfecture de Meurthe-et-Moselle, qui, aux termes de l'article 1er de l'arrêté n° 12.BI.36 du 10 juillet 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de Meurthe-et-Moselle du 10 juillet 2012, a reçu délégation " à l'effet de signer tous les arrêtés, décisions, circulaires, rapports, documents et correspondances relevant des attributions de l'État dans le département de Meurthe-et-Moselle, à l'exception des arrêtés de conflit " ; que cette délégation, qui comporte une exception, ne revêt pas le caractère d'une délégation générale de signature ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué n'est pas fondé et doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, les décisions individuelles défavorables doivent comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement ; que l'arrêté contesté vise les textes dont il fait application et mentionne les faits qui en constituent le fondement, tirés principalement d'éléments concordants propres à démontrer une rupture de la vie commune entre la requérante et son mari ; qu'ainsi, cette décision répond aux exigences de motivation posées par la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-12 du même code : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français (...) " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 2. Au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...). Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux " ;
5. Considérant que lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée ; qu'une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point ;
6. Considérant qu'en l'espèce, la décision par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé à la requérante le renouvellement de son titre de séjour trouve son fondement légal dans les dispositions précitées de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, qui peuvent être substituées à celles de l'article L. 313-11 (4°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers cité dans la décision dès lors que, d'une part, cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressée d'aucune garantie et, d'autre part, que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces dispositions ;
7. Considérant que le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé à Mme A... le renouvellement de son titre de séjour au motif qu'elle ne partageait pas une communauté de vie avec son époux, M.D... ; qu'il ressort d'un rapport d'enquête produit par le préfet que lorsque son mari purgeait une peine d'emprisonnement, Mme A... ne lui a pas rendu visite puisqu'elle n'apparaît pas sur le registre des visiteurs ; qu'il ressort de ce même rapport que lorsque les agents de police l'ont accompagnée au domicile conjugal le 18 avril 2013, alors que son époux bénéficiait d'une permission de sortie chaque week-end depuis le 24 janvier 2013, la requérante ne connaissait pas le code d'entrée de l'immeuble, n'était pas en possession de la clef de la boîte aux lettres et qu'aucune de ses affaires personnelles ne se trouvait dans l'appartement ; que si Mme A...se prévaut d'attestations de parents et amis affirmant qu'elle vit toujours avec son époux, celles-ci sont peu circonstanciées et ne se réfèrent à aucune date précise ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait méconnu les stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 " ; qu'il résulte de ces dispositions, applicables aux ressortissants algériens, que le préfet n'est tenu de saisir la commission que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions requises pour prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour ;
9. Considérant que MmeA..., dont il a été dit qu'elle n'entrait pas dans le champ d'application du 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, ne remplit aucune des conditions légales prévues pour la délivrance de plein droit d'un certificat de résidence ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé serait illégal, faute d'avoir été précédé de la consultation de cette commission ;
10. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
11. Considérant que si elle se prévaut de la présence en France de certains membres de sa famille, MmeA..., qui n'est entrée sur le territoire français qu'en 2011 à l'âge de vingt-cinq ans, n'établit pas être dépourvue de toute attache dans son pays d'origine ; qu'en outre, comme il a été dit plus haut, elle n'entretient pas de communauté de vie avec son époux ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle en date du 23 juillet 2013 n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris et n'a donc pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle ; que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...épouse D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
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N° 14NC00896