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03/02/2015 | FRANCE | N°14NC00077

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 03 février 2015, 14NC00077


Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2014, présentée pour M. C... D...B..., demeurant..., par Me A...;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303441 du 5 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 juillet 2013 par lequel le préfet du Haut-Rhin a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvo

ir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de...

Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2014, présentée pour M. C... D...B..., demeurant..., par Me A...;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303441 du 5 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 juillet 2013 par lequel le préfet du Haut-Rhin a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans les mêmes conditions ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient :

Sur la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour, que :

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a fait l'objet d'une discrimination en raison de son âge, prohibée tant par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, que par l'article 21 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne, l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le protocole additionnel n°12 à cette convention et l'article 2 du Pacte international des droits civils et politiques ;

Sur la décision faisant obligation de quitter le territoire français, que :

- la décision est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi, que :

- la décision méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que son engagement politique l'expose à des représailles pour lui et sa famille en cas de retour dans son pays ; que, d'ailleurs, le 15 novembre 2013, plusieurs membres de sa famille ont péri dans l'incendie de la maison familiale ;

Sur la décision lui refusant un délai de départ volontaire, que :

- en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 20 février 2014 et 16 décembre 2014, présentés par le préfet du Haut-Rhin, qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir qu'aucun moyen de la requête n'est fondé ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 17 décembre 2013, admettant M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le protocole additionnel n° 12 à cette convention ;

Vu le pacte international des droits civils et politiques ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 janvier 2015, le rapport de Mme Rousselle, président assesseur ;

1. Considérant que le préfet du Haut-Rhin a, par un arrêté du 29 juillet 2013, refusé d'accorder un titre de séjour à M.B..., ressortissant pakistanais né le 5 avril 1960, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi ; que M. B...relève appel du jugement du 5 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que, dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi ; qu'il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

4. Considérant que ni les promesses d'embauche dont M. B...fait état, ni ses efforts d'intégration dans la société française ne constituent des motifs humanitaires ou exceptionnels au sens des dispositions précitées ; qu'il suit de là que le préfet n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, par ailleurs, qu'en rapportant la durée du séjour en France de M. B...à son âge et à la durée de son séjour au Pakistan, le préfet n'a violé aucune des dispositions internationales ou conventionnelles invoquées par l'intéressé ;

6. Considérant, enfin, que si M. B...soutient en appel que ses craintes en cas de retour au Pakistan se confirment, dès lors que cinq membres de sa famille ont péri dans l'incendie de la maison familiale à Rawalpindi le 15 novembre 2013, ces évènements, postérieurs à l'arrêté attaqué, sont sans influence sur sa légalité ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que, par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, la décision faisant obligation à M. B...de quitter le territoire doit être annulée, ne peut qu'être écarté ;

Sur l'absence de délai de départ volontaire :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) /3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...)" ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...s'est soustrait à l'exécution d'un premier arrêté, du 23 avril 2007, lui faisant obligation de quitter le territoire français, dont la légalité a été confirmée par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Nancy du 20 janvier 2009, devenu définitif, puis d'un arrêté de reconduite à la frontière du 26 janvier 2009 dont la légalité a été confirmée par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Nancy du 18 juin 2009, devenu définitif, et d'un arrêté préfectoral du 7 janvier 2010 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire ; que dès lors, le risque de fuite étant avéré au sens des dispositions du 3. du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a pu légalement refuser de lui octroyer un délai de départ volontaire ;

10. Considérant que si M. B...soutient " qu'un retour précipité vers son pays d'origine aurait des conséquences tant au niveau des risques de traitements inhumains ou dégradants qu'au niveau de son droit à mener une vie familiale normale en raison des liens d'amitiés qu'il a noués en France ", cet argument est inopérant à l'appui de la contestation de la légalité de la décision lui refusant un délai de départ volontaire ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que, en refusant de lui accorder un tel délai, le préfet du Haut-Rhin aurait commis une erreur manifeste d'appréciation, ne peut qu'être écarté ;

Sur la fixation du pays de renvoi :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

12. Considérant que M.B..., dont la demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) des 27 septembre 2006, 3 juillet 2007 et 23 mars 2009, confirmées par la Commission des recours des réfugiés le 6 avril 2007 et par la Cour nationale du droit d'asile le 22 décembre 2009, soutient qu'il ne peut retourner dans son pays d'origine en raison de son engagement politique au Pakistan ; que, toutefois, les documents qu'il produit en appel, notamment les certificats de décès des membres de sa famille, ne permettent pas d'établir un lien avec sa situation propre ; qu'il en est de même d'un rapport d'investigation de la police pakistanaise de janvier 2005, qui se borne à retranscrire les déclarations de l'intéressé ; que son récit à l'appui de sa nouvelle demande auprès de l'OFPRA le 24 avril 2014, ne suffit pas à établir qu'à la date de l'arrêté attaqué il aurait été personnellement exposé à un risque réel, direct et sérieux pour sa vie et sa liberté en cas de retour dans son pays d'origine ou dans tout autre pays où il serait légalement admissible ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

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N° 14NC00077


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC00077
Date de la décision : 03/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-05 Étrangers. Réfugiés (voir : Asile) et apatrides.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTÉRA
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : HILD

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-02-03;14nc00077 ?
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