Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SA Etablissements Chabot a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer, d'une part, le remboursement d'une créance sur le Trésor d'un montant de 47 571 euros née du report en arrière du déficit de l'exercice clos le 31 décembre 2007, et, d'autre part, la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice 2007.
Par un jugement n° 1005187 du 24 juillet 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 septembre 2014 et le 15 juin 2015, la SA Etablissements Chabot, représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 24 juillet 2014 ;
2°) de prononcer le remboursement de la créance précitée et la décharge de cette imposition ainsi que des majorations correspondantes ;
3°) de condamner l'Etat aux dépens exposés en première instance et en appel ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 3 500 euros au titre des frais exposés en première instance et une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés en appel.
Elle soutient que l'administration a commis une erreur de droit dans l'application des dispositions du 5° de l'article 39 du code général des impôts. En effet, lorsqu'un litige est en cours et concerne la société qui a comptabilisé la provision, celle-ci est déductible dès lors que la charge présente un caractère probable qui est indépendant de la prévision relative à l'issue du litige.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 avril 2015, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient que le moyen soulevé par la requérante n'est pas fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Michel, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public.
1. Considérant que la SA Etablissements Chabot a embauché M. A...à compter du 4 novembre 2002 dans le cadre d'un contrat à durée déterminée qui a pris fin le 3 mars 2003 ; que ce dernier a été recruté par la SA Chabot à compter du 4 mars 2003 dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée ; que la SA Chabot a décidé en 2005 de licencier ce salarié pour insuffisance professionnelle ; que M. A...a saisi le 28 mars 2007 le conseil de prud'hommes de Sarrebourg pour contester ce licenciement ; qu'à la clôture de l'exercice 2007, la SA Etablissements Chabot a comptabilisé une provision d'un montant égal au total des demandes indemnitaires présentées par M. A..., soit 263 350 euros ; qu'en raison de cette charge, l'exercice 2007 s'est soldé par un résultat déficitaire de 166 082 euros ; que la SA Etablissements Chabot a opté pour le report en arrière de ce déficit et demandé le remboursement de la créance résultant de ce report, soit 47 571 euros ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration a remis en cause le bien-fondé de la provision à hauteur de 254 814 euros ; que l'administration a, en conséquence, rejeté la demande de remboursement présentée par la société requérante, par décision du 7 septembre 2010, et a assujetti la SA Etablissements Chabot à une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2007 ; que la SA Etablissements Chabot relève appel du jugement du 24 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à la décharge de cette imposition et au remboursement de la somme précitée de 47 571 euros ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au titre de l'année d'imposition en litige : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice le montant des charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de la clôture et qu'elles se rattachent par un lien direct aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SA Etablissements Chabot a constitué la provision litigieuse à la suite de l'action en justice de M. A...du 28 mars 2007 devant le conseil des prud'hommes de Sarrebourg tendant à la condamnation de cette société à lui verser des indemnités d'un montant total de 263 350 euros, dont 8 536 euros à titre d'indemnité de requalification du contrat de travail à durée indéterminée ;
4. Considérant qu'il n'appartient pas au juge de l'impôt, pour apprécier la déductibilité d'une provision constituée pour faire face à un risque contentieux, d'apprécier les chances de succès de l'action contentieuse mais d'apprécier, pour déterminer si le risque contentieux était éventuel ou réel à la date de la clôture de l'exercice, si était intervenu, avant cette date, un acte de nature à engager véritablement la procédure contentieuse ; que, par suite, et dès lors qu'à la date de clôture de l'exercice 2007, M. A...avait engagé une action en justice dirigée contre la SA Etablissements Chabot, la société a pu à bon droit, sur le fondement des dispositions précitées du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, comptabiliser une provision d'un montant égal au total des demandes indemnitaires présentées par M. A... à son encontre, soit un montant de 263 350 euros au titre de l'exercice 2007 ; qu'il est constant qu'en raison de cette charge, l'exercice 2007 s'est soldé par un résultat déficitaire de 166 082 euros et que la SA Etablissements Chabot a pu légalement opter pour le report en arrière de ce déficit ; qu'elle est dès lors fondée à demander la décharge des impositions supplémentaires auxquelles elle a été assujettie ainsi que le remboursement de la créance résultant de ce report, soit 47 571 euros ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA Etablissements Chabot est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur les dépens :
6. Considérant qu'en l'absence de dépens exposés par la SA Etablissements Chabot au titre des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative tant en première instance qu'en appel, les conclusions de la société requérante tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros à la SA Etablissements Chabot au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens tant en première instance qu'en appel ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1005187 du 24 juillet 2014 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 2 : La SA Etablissements Chabot est déchargée de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos 2007 ainsi que des majorations correspondantes.
Article 3 : Il est accordé à la SA Etablissements Chabot le remboursement de la somme de 47 571 euros correspondant à sa créance sur le Trésor née du report en arrière du déficit de l'exercice clos le 31 décembre 2007.
Article 4 : L'Etat versera à la SA Etablissements Chabot une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Etablissements Chabot et au ministre de l'économie et des finances.
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N° 14NC01801