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17/12/2015 | FRANCE | N°15NC00683

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 17 décembre 2015, 15NC00683


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI JM6 a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, l'annulation de l'arrêté du 4 juillet 2014 du président de la communauté de communes " Rives de Moselle " mettant à sa charge une somme de 72 344,86 euros au titre de la participation spécifique pour réalisation d'équipements publics exceptionnels liée à la délivrance, par arrêté du 7 octobre 2004, d'un permis de construire et, d'autre part, l'annulation de l'arrêté du 4 juillet 2014 du président de la communauté de communes

" Rives de Moselle " mettant à sa charge une somme de 284 510 euros au titre de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI JM6 a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, l'annulation de l'arrêté du 4 juillet 2014 du président de la communauté de communes " Rives de Moselle " mettant à sa charge une somme de 72 344,86 euros au titre de la participation spécifique pour réalisation d'équipements publics exceptionnels liée à la délivrance, par arrêté du 7 octobre 2004, d'un permis de construire et, d'autre part, l'annulation de l'arrêté du 4 juillet 2014 du président de la communauté de communes " Rives de Moselle " mettant à sa charge une somme de 284 510 euros au titre de la participation spécifique pour réalisation d'équipements publics exceptionnels liée à la délivrance, par arrêté du 19 décembre 2006, d'un permis de construire, ensemble le rejet de ses recours gracieux.

Par un jugement n° 1405199, 1405200 du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé les deux arrêtés du 4 juillet 2014.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 13 avril 2015, sous le n° 15NC00683, complétée par un mémoire de production enregistré le 20 mai 2015, la communauté de communes " Rives de Moselle ", représentée par la SCP Somlai-Jung et Iochum, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1405199 et 1405200 du tribunal administratif de Strasbourg en date du 17 mars 2015 en tant qu'il a annulé l'arrêté du 4 juillet 2014 mettant à la charge de la SCI JM6 une somme de 72 344,86 euros ;

2°) de rejeter la demande de la SCI JM6 ;

3°) de mettre à la charge de la SCI JM6 une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La communauté de communes " Rives de Moselle " soutient que :

- les premiers juges ont déclaré la participation demandée sans cause, alors que la décision était entachée d'un défaut de motivation, et ont ainsi commis une erreur de droit ;

- les dispositions de l'article L. 332-7 du code de l'urbanisme s'appliquent ;

- l'annulation de l'arrêté conduit à l'enrichissement sans cause du pétitionnaire.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 juillet 2015, la SCI JM6, représentée par la SELARL Cossalter et De Zolt, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la communauté de communes " Rives de Moselle " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont pas commis d'erreur d'interprétation de l'article L. 332-7 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté du 4 juillet 2014 n'a pas de base légale car le permis de construire est le seul fait générateur de la participation spécifique pour réalisation d'équipements publics, le tribunal ayant, par un jugement devenu définitif, considéré que le permis de construire était illégal en ce qu'il imposait une participation dont le mode d'évaluation n'était pas indiqué ;

- la société n'a bénéficié d'aucun enrichissement sans cause ;

- les sommes demandées par l'arrêté contesté sont prescrites eu égard aux dispositions de la loi du 31 décembre 1968.

Par un courrier du 29 octobre 2015, les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la cour est susceptible de soulever d'office le moyen d'ordre public selon lequel " la solution de l'arrêt à intervenir est susceptible d'être fondée sur une substitution de base légale, l'arrêté litigieux étant fondé à tort sur l'article L. 332-7 du code de l'urbanisme ".

Par un mémoire du 30 octobre 2015, la communauté de communes " Rives de Moselle " s'en remet à la sagesse de la cour et ne s'oppose pas à une substitution de base légale.

Par un mémoire du 30 octobre 2015, la SCI JM6 conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures. Elle soutient que le moyen d'ordre public annoncé ne respecte pas le principe du contradictoire.

II. Par une requête enregistrée le 13 avril 2015, sous le n° 15NC00684, complétée par un mémoire de production enregistré le 20 mai 2015, la communauté de communes " Rives de Moselle ", représentée par la SCP Somlai-Jung et Iochum, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1405199 et 1405200 du tribunal administratif de Strasbourg en date du 17 mars 2015 en tant qu'il a annulé l'arrêté du 4 juillet 2014 mettant à la charge de la SCI JM6 une somme de 284 510 euros ;

2°) de rejeter la demande de la SCI JM6 ;

3°) de mettre à la charge de la SCI JM6 une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La communauté de communes " Rives de Moselle " soutient que :

- les premiers juges ont déclaré la participation demandée sans cause, alors que la décision était entachée d'un défaut de motivation et ont ainsi commis une erreur de droit ;

- les dispositions de l'article L. 332-7 du code de l'urbanisme s'appliquent ;

- l'annulation de l'arrêté conduit à l'enrichissement sans cause du pétitionnaire.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 juillet 2015, la SCI JM6, représentée par la SELARL Cossalter et De Zolt, conclut au rejet de la requête et demande de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de la communauté de communes " Rives de Moselle " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont pas commis d'erreur d'interprétation de l'article L. 332-7 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté du 4 juillet 2014 n'a pas de base légale dès lors que le permis de construire, qui est le seul fait générateur de la participation spécifique pour réalisation d'équipements publics, a été, par un jugement devenu définitif, jugé illégal en ce qu'il imposait une participation dont le mode d'évaluation n'était pas indiqué ;

- la société n'a bénéficié d'aucun enrichissement sans cause ;

- les sommes demandées par l'arrêté contesté sont prescrites eu égard aux dispositions de la loi du 31 décembre 1968.

Par un courrier du 29 octobre 2015, les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la cour est susceptible de soulever d'office le moyen d'ordre public selon lequel " la solution de l'arrêt à intervenir est susceptible d'être fondée sur une substitution de base légale, l'arrêté litigieux étant fondé à tort sur l'article L. 332-7 du code de l'urbanisme ".

Par un mémoire du 30 octobre 2015, la communauté de communes " Rives de Moselle " s'en remet à la sagesse de la cour et ne s'oppose pas à une substitution de base légale.

Par un mémoire du 30 octobre 2015, la SCI JM6 conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures. Elle soutient que le moyen d'ordre public annoncé ne respecte pas le principe du contradictoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour la SCI JM6.

Considérant ce qui suit :

1. Par jugement du 1er octobre 2013, devenu définitif, le tribunal administratif de Strasbourg a déchargé la SCI JM6 d'une somme de 72 344,86 euros mise à sa charge par arrêté du 7 novembre 2004 portant permis de construire et de 284 510 euros mise à sa charge par arrêté du 19 décembre 2006 portant permis de construire, au motif que lesdits arrêtés ne comportent aucune indication du mode d'évaluation de la participation, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-29 du code de l'urbanisme. Suite à ce jugement, la communauté de communes " Rives de Moselle " a, par deux arrêtés du 4 juillet 2014, précisé le mode d'évaluation des sommes de 72 344,86 euros et de 284 510 euros et a informé la SCI JM6 du recouvrement de ces sommes par l'émission d'avis de sommes à payer. La communauté de communes " Rives de Moselle " relève appel du jugement du 17 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé les arrêtés du 4 juillet 2014 mettant à la charge de la SCI JM6 les sommes de 72 344,86 euros et de 284 510 euros.

2. Les requêtes susvisées concernent un même jugement dont le bien-fondé dépend d'éléments de fait et de considérations de droit qui sont étroitement liés, présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

3. Il ressort des pièces du dossier que les participations demandées pour réalisation d'équipements publics exceptionnels en vue de l'amélioration de la circulation routière dans la zone d'activités de Talange-Hauconcourt par les arrêtés des 7 octobre 2004 et 19 décembre 2006 portant permis de construire délivrés à la SAS Weigerding (aux droits de laquelle est venue la SCI JM6) ont été déclarées illégales par un jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 1er octobre 2013, devenu définitif, au motif que les arrêtés litigieux ne comportent, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-29 du code de l'urbanisme, aucune indication sur le mode d'évaluation de cette participation et dont ne sauraient tenir lieu ni les délibérations du conseil syndical du 29 juin 2001 et 1er avril 2005, ni la convention passée entre les différentes parties le 17 septembre 2004 ainsi que ses avenants. Une telle déclaration d'illégalité pour vice de forme ne remet pas en cause le fondement juridique de la participation, fondée sur les autorisations de construire et la délibération du 29 juin 2001 portant participation spécifique pour la réalisation d'équipements publics exceptionnels.

4. Le vice de pure forme dont les décisions initiales étaient entachées pouvait, en exécution de la chose jugée, donner lieu à régularisation de la part de la communauté de communes " Rives de Moselle " qui, considérant que les participations restaient exigibles a, par les arrêtés contestés du 4 juillet 2014, seulement entendu en préciser le mode d'évaluation, en énonçant dans l'article 2 le taux par m² et en en faisant application aux termes de l'article 3. Elle est, par suite, fondée à soutenir que les premiers juges, en considérant que les participations demandées n'ont pas été déclarées illégales mais sans cause, ont commis une erreur de droit.

5. Il y a lieu, toutefois, pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens et prétentions de la SCI JM6 tant en première instance qu'en appel.

Sur la légalité des arrêtés du 4 juillet 2014 :

En ce qui concerne l'exception de prescription :

6. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 modifiée : "Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. / Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public.". La SCI JM6 n'est pas fondée à se prévaloir de ces dispositions, pour prétendre que les participations en litige sont prescrites, dès lors que ces dispositions qui instituent des règles de prescription particulières au bénéfice des collectivités publiques ne sauraient lui être appliquées. En l'absence de règles spécifiques de prescription définies dans le code de l'urbanisme ou dans tout autre texte, les participations en cause qui constituent des créances non fiscales mises à la charge d'une personne privée, ne relèvent que des règles de droit commun définies par le code civil qui ne sont pas invoquées en l'espèce. Par suite, l'exception de prescription doit être écartée.

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de base légale :

7. Il est constant que les clauses financières des permis de construire n'ont été déclarées illégales qu'en tant qu'elles n'étaient pas motivées en la forme. Par suite, la circonstance que le président de la communauté de communes " Rives de Moselle " ait cité à tort l'article L. 332-7 du code de l'urbanisme, qui n'envisage que l'hypothèse de l'annulation des prescriptions financières, est sans influence sur la légalité des arrêtés du 4 juillet 2014 dès lors que l'autorité compétente pouvait, ainsi qu'il a été dit, dans le respect des motifs constituant le support nécessaire du jugement du 1er octobre 2013, adopter des arrêtés fixant les modalités de la participation en se référant aux délibérations des 29 juin 2001 et 1er avril 2005 et purger les illégalités dont étaient entachées les clauses financières des permis de construire accordés.

8. Si la SCI JM6 soutient que le permis délivré le 19 décembre 2006 accordé à la SAS Weigerding, aux droits de laquelle elle vient, ne comporte aucun mode d'évaluation de la participation demandée, cette insuffisance a été précisée, en exécution du jugement du 1er octobre 2013, par les articles 2 et 3 des arrêtés litigieux du 4 juillet 2014.

9. Par ailleurs, la circonstance, à la supposer établie, que les travaux prévus par la convention en date du 17 septembre 2004 portant participation spécifique de la SAS Weigerding pour la réalisation d'équipements publics exceptionnels prévus à l'article L. 332-8 du code de l'urbanisme n'ont pas été réalisés dans le délai prévu, est, par elle-même, sans incidence sur la légalité des dispositions des arrêtés en litige relatives aux participations financières contestées.

10. Enfin, si la SCI JM6 soutient qu'elle n'a jamais reçu la notification de la délibération du 29 juin 2001 portant participation spécifique pour la réalisation d'équipements publics exceptionnels fondant les participations imposées par les permis de construire, ladite circonstance est sans incidence sur les participations demandées dès lors qu'elles ont été mentionnées dès la délivrance des permis de construire qui en constituent le fait générateur.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de la loi du 12 avril 2000 :

11. Aux termes de l'article 1er de la loi du 12 avril 2000 : " Sont considérées comme autorités administratives au sens de la présente loi (...) les établissements publics à caractère administratif (...) ". L'article 4 de la même loi dispose notamment que : " Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ". Il résulte des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 que la mention du nom, du prénom et de la qualité de l'auteur de l'acte litigieux doit y figurer afin que ce dernier puisse, sous peine d'irrégularité de l'acte en cause, procéder sans ambigüité à son identification.

12. Dès lors que les arrêtés attaqués comportent la mention du nom, du prénom et de la qualité du président de la communauté de communes " Rives de Moselle " à côté de sa signature manuscrite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1er de la loi du 12 avril 2000 manque en fait et ne peut qu'être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède, que la communauté de communes " Rives de Moselle " est fondée à demander l'annulation de ce jugement et le rejet des demandes de la SCI JM6 auxquelles le tribunal administratif a fait droit.

14. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la SCI JM 6 une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la communauté de communes " Rives de Moselle " et non compris dans les dépens. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes " Rives de Moselle " la somme que la SCI JM 6 demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 17 mars 2015 est annulé.

Article 2 : Les demandes de la SCI JM 6 sont rejetées.

Article 3 : La SCI JM6 versera à la communauté de communes " Rives de Moselle " une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes " Rives de Moselle " et à la SCI JM 6.

2

N° 15NC00683-15NC00684


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00683
Date de la décision : 17/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-024 Urbanisme et aménagement du territoire. Contributions des constructeurs aux dépenses d'équipement public.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SOMLAI-JUNG IOCHUM SCP

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-12-17;15nc00683 ?
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