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09/05/2017 | FRANCE | N°16NC00197

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 09 mai 2017, 16NC00197


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Galerie Raugraff a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner la communauté urbaine du Grand Nancy à lui verser une somme de 250 000 euros au titre des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait des travaux de construction de la ligne 2 du tramway entre l'été 2011 et le printemps 2013.

Par un jugement n° 1400740 du 8 décembre 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregist

rés les 3 février 2016 et 7 mai 2016, la société Galerie Raugraff, représentée par MeA..., dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Galerie Raugraff a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner la communauté urbaine du Grand Nancy à lui verser une somme de 250 000 euros au titre des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait des travaux de construction de la ligne 2 du tramway entre l'été 2011 et le printemps 2013.

Par un jugement n° 1400740 du 8 décembre 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 février 2016 et 7 mai 2016, la société Galerie Raugraff, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 8 décembre 2015 ;

2°) de condamner la communauté urbaine du Grand Nancy à lui verser une somme de 250 000 euros en raison des préjudices qu'elle a subis ;

3°) de mettre à la charge de la communauté urbaine du Grand Nancy une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sur le fondement de la responsabilité sans faute pour rupture d'égalité devant les charges publiques, elle est bien fondée à demander l'engagement de la responsabilité de la communauté urbaine du Grand Nancy (CUGN) ; elle a subi un préjudice anormal et spécial en raison de la réalisation de travaux qui se sont déroulés de l'année 2011 à la fin de l'année 2012 et qui ont rendu excessivement difficile l'accès des piétons à la galerie ;

- la rue Raugraff est située dans un secteur indemnisable selon la commission d'indemnisation amiable ;

- le refus de la CUGN de l'indemniser n'est pas conforme aux principes édictés par la commission et est discriminatoire ;

- son chiffre d'affaires des années 2011 à 2012 justifie de la réalité d'un préjudice spécial et anormal.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 avril 2016 et le 24 mai 2016, la communauté urbaine du Grand Nancy, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la société Galerie Raugraff sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la société requérante n'établit pas le caractère anormal des préjudices qu'elle invoque ;

- elle n'établit pas le lien de causalité entre les travaux en cause et les préjudices dont elle demande la réparation ;

- le préjudice tiré de la perte de chance et le préjudice par ricochet invoqués par la société requérante ne sont pas certains.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michel, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour la société Galerie Raugraff, ainsi que celles de Me B... pour la métropole du Grand Nancy.

1. Considérant que la société Galerie Raugraff, qui exploite une galerie d'art située au 14 rue Raugraff à Nancy, relève appel du jugement du 8 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à condamner la communauté urbaine du Grand Nancy à lui verser une somme de 250 000 euros au titre des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des travaux de construction de la ligne 2 du tramway entre l'été 2011 et le printemps 2013 ;

Sur la responsabilité :

2. Considérant que la responsabilité du maître de l'ouvrage est engagée, même sans faute, à raison des dommages que l'ouvrage public dont il a la garde peut causer aux tiers ; qu'il appartient toutefois au riverain d'une voie publique qui entend obtenir réparation des dommages qu'il estime avoir subis à l'occasion d'une opération de travaux publics à l'égard de laquelle il a la qualité de tiers d'établir, d'une part, le lien de causalité entre cette opération et les dommages invoqués et, d'autre part, le caractère anormal et spécial de son préjudice, les riverains des voies publiques étant tenus de supporter, sans contrepartie, les sujétions normales qui leur sont imposées dans un but d'intérêt général ; que, pour se dégager de sa responsabilité, l'administration doit établir que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure ;

3. Considérant que si, en principe, les modifications apportées à la circulation générale et résultant soit de changements effectués dans l'assiette, la direction ou l'aménagement des voies publiques, soit de la création de voies nouvelles, ne sont pas de nature à ouvrir droit à indemnité, il en va autrement dans le cas où ces modifications ont pour conséquence d'interdire ou de rendre excessivement difficile l'accès des riverains à la voie publique ;

4. Considérant, en premier lieu, que si des commerçants de la rue Raugraff ont été indemnisés sur proposition de la commission amiable d'indemnisation mise en place par la communauté urbaine du Grand Nancy, cette circonstance ne saurait dispenser la société Galerie Raugraff d'établir l'existence d'un préjudice propre, indemnisable dans les conditions précitées ;

5. Considérant, en second lieu, que la société Galerie Raugraff soutient que la baisse importante de son chiffre d'affaires constatée pour les exercices 2011/2012 et 2012/2013 est imputable aux travaux de construction de la ligne 2 du tramway à Nancy dès lors que sa clientèle a été empêchée d'accéder à son commerce situé rue Raugraff à Nancy ;

6. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que des travaux ont été entrepris rue Raugraff, dans un premier temps, entre le 4 juillet et la fin du mois d'août 2011 puis, dans un second temps, entre le mois d'avril et la fin du mois de novembre 2012 ; qu'il résulte des éléments produits à l'instance par la société requérante, et plus particulièrement des clichés photographiques de la rue Raugraff lors de travaux, des comptes de résultat de la société et des pièces relatives aux expositions qu'elle a organisées et tenues dans ses locaux au cours des périodes en litige, que l'accès des piétons à son commerce n'a pas été rendu excessivement difficile au cours des deux périodes susmentionnées de travaux ;

7. Considérant, d'autre part, que s'agissant de la première période de travaux, il résulte des comptes de résultat produits par la société requérante que son chiffre d'affaires a été supérieur à celui constaté pour la même période au cours de l'année précédente ;

8. Considérant, enfin, s'agissant de la seconde période de travaux, que le chiffre d'affaires de la galerie Raugraff a effectivement chuté au regard de celui des années précédentes ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que pour l'année suivant la fin des travaux, correspondant à l'exercice allant du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2013, le chiffre d'affaires de la galerie Raugraff a été inférieur à celui de l'exercice précédent pour les mois d'octobre, décembre, février, mai et septembre ; qu'il suit de là qu'une corrélation entre la baisse du chiffre d'affaires de la société et la seconde période de travaux rue Raugraff n'est pas suffisamment caractérisée ; qu'à cet égard si la société galerie Raugraff soutient que ses clients potentiels avaient perdu l'habitude de se rendre à son commerce compte tenu des difficultés d'accès rencontrées lors des travaux, cette allégation n'est pas corroborée par les comptes de résultat de la société, alors d'ailleurs que, compte tenu de la nature de son activité, sa clientèle de passage ne saurait être assimilée à celle d'autres commerces situés dans la même rue, tels que la boulangerie ou la droguerie ; que, par suite, la société Galerie Raugraff n'établit pas que les travaux réalisés rue Raugraff ont été la cause déterminante de la baisse de son chiffre d'affaires, laquelle apparaît imputable à la situation économique générale ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Galerie Raugraff n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande d'indemnisation ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté urbaine du Grand Nancy, devenue métropole du Grand Nancy, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Galerie Raugraff demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Galerie Raugraff le versement de la somme que la métropole du Grand Nancy demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Galerie Raugraff est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la métropole du Grand Nancy présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société Galerie Raugraff et à la métropole du Grand Nancy.

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N° 16NC00197


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