Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Fav-Pomagro a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2011 ainsi que des pénalités dont ces droits ont été assortis.
Par un jugement n° 1402301 du 23 février 2016, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement les 25 avril et 3 novembre 2016, la SARL Fav-Pomagro, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer cette décharge ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le service a fait application du dispositif de correction prévu par la décision Quéméner du Conseil d'Etat et a, en conséquence, soustrait du prix d'acquisition des titres la somme de 31 710 euros correspondant au montant des déficits de la SCI des Hautes-Falaises qu'elle a déduit de ses résultats ;
- ce dispositif ne s'applique, en effet, qu'aux associés, personnes physiques, et non aux personnes morales soumises à l'impôt sur les sociétés qui déduisent de leurs résultats les déficits de la société de personnes ;
- la valeur des titres n'a pas été impactée par la déduction de ces déficits ;
- c'est à tort que ces déficits ont été pris en compte dès lors que, liés à la comptabilisation d'amortissements, ils trouvent leur origine dans une disposition par laquelle le législateur a entendu conférer aux contribuables un avantage fiscal définitif ;
- il n'a pas été tenu compte de la transmission à la société civile Renaux Participations de la dette de 200 000 euros que la SCI détenait à son encontre ;
- l'application du dispositif de correction viole le principe de neutralité de la loi fiscale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Etienvre,
- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.
1. Considérant qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont la société à responsabilité limitée (SARL) unipersonnelle Fav-Pomagro a fait l'objet du 23 octobre au 4 décembre 2013, l'administration fiscale a procédé, notamment, à la réintégration dans les résultats de l'exercice clos le 30 juin 2011, de la somme de 31 710 euros ; qu'elle a estimé qu'il convenait de soustraire du prix de 135 000 euros versé pour l'acquisition des 1 350 parts de la société civile immobilière (SCI) des Hautes-Falaises le montant des déficits que la SARL Fav-Pomagro a déduit des résultats des exercices clos en 2005, 2006, 2007, 2008, 2009 et 2010 ; que la SARL Fav-Pomagro relève appel du jugement du 23 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a, en conséquence, été assujettie au titre de l'année 2011 ainsi que des pénalités dont elle a été assortie ;
Sur les conclusions aux fins de décharge :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 218 bis du code général des impôts : " Les sociétés ou personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 206, à l'exception de celles désignées au 5 de l'article précité, sont personnellement soumises audit impôt à raison de la part des bénéfices correspondant aux droits qu'elles détiennent, dans les conditions prévues aux articles 8, 8 quater, 8 quinquies et 1655 ter, en qualité d'associées en nom ou commanditées ou de membres de sociétés visées auxdits articles " ;
3. Considérant qu'en vertu de l'article 219, I-a sexies-0 bis du code général des impôts, le régime des plus et moins-values à long terme cesse de s'appliquer à la plus ou moins-value provenant des cessions de titres de sociétés à prépondérance immobilière non cotées réalisées à compter du 26 septembre 2007 ; que ces plus ou moins-values de cession concourent, dès lors, à la formation du résultat imposable au taux normal de l'impôt sur les sociétés, quelle que soit la durée de détention des titres concernés ;
4. Considérant que, dans le cas où une société, une entreprise ou une personne soumise à l'impôt à raison des bénéfices qu'elle tire de son activité professionnelle, cède les parts inscrites à l'actif de son bilan qu'elle détient dans une société ou dans un groupement relevant ou ayant relevé du régime prévu aux articles 8, 8 ter, 239 quater B ou 239 quater C du code général des impôts ou, lorsqu'elle ne dresse pas de bilan, les parts de même nature qu'elle a affectées à l'exercice de sa profession, le résultat de cette opération, doit être calculé, pour assurer la neutralité de l'application de la loi fiscale compte tenu du régime spécifique des sociétés et groupements susmentionnés, en retenant comme prix de revient de ces parts leur valeur d'acquisition, majorée en premier lieu, d'une part de la quote-part des bénéfices de cette société ou de ce groupement revenant à l'associé qui a été ajoutée aux résultats imposés de celui-ci, antérieurement à la cession et pendant la période d'application du régime visé ci-dessus, et d'autre part des pertes afférentes à des entreprises exploitées par la société ou le groupement en France et ayant donné lieu de la part de l'associé à un versement en vue de les combler, puis minorée en second lieu, d'une part, des déficits que l'associé a déduits pendant cette même période, à l'exclusion de ceux qui trouvent leur origine dans une disposition par laquelle le législateur a entendu conférer aux contribuables un avantage fiscal définitif, et, d'autre part, des bénéfices afférents à des entreprises exploitées en France par la société ou le groupement et ayant donné lieu à répartition au profit de l'associé ; qu'en outre, lorsque les parts de la société de personnes faisant l'objet de la cession ont été acquises ou souscrites à des dates différentes, le prix de revient des parts acquises ou souscrites à la même date est calculé distinctement suivant les modalités susmentionnées ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SCI des Hautes-Falaises, dont l'objet est l'acquisition de tous immeubles et droits immobiliers, a été constituée le 28 janvier 2005 ; qu'à cette occasion, la société à responsabilité limitée (SARL) Fav 51, devenue la SASU Fav-Pomagro puis la SARL unipersonnelle Fav-Pomagro, a apporté en numéraire la somme de 135 000 euros et a acquis 1 350 titres ; qu'il est constant que cette SCI relève du régime des sociétés de personnes ; que le 2 février 2011, la SASU Fav-Pomagro a cédé, pour 135 000 euros, à la société Renaux Participations ses 1 350 titres ; que la SASU Fav-Pomagro a porté dans sa déclaration de l'exercice clos le 30 juin 2011 une plus-value à court terme égale à zéro, le prix de cession des parts étant égal au prix d'acquisition ; que l'administration fiscale a estimé qu'il convenait de soustraire du prix d'acquisition le montant des déficits de la SCI des Hautes-Falaises que la SASU Fav-Pomagro a déduit des résultats de ses exercices clos en 2005, 2006, 2007, 2008, 2009 et 2010 soit la somme totale de 31 710 euros ;
6. Considérant que la société requérante soutient, en premier lieu, que le mécanisme de correction prévu par la décision du 16 février 2000 " Société anonyme Etablissements Quéméner " du Conseil d'État statuant au contentieux ne peut s'appliquer à une personne morale soumise à l'impôt sur les sociétés qui a intégré dans son résultat les pertes de la société de personnes dont elle détient des parts ;
7. Considérant que l'application des règles issues de la décision du 16 février 2000 " Société anonyme Etablissements Quéméner " du Conseil d'État statuant au contentieux, fondées sur l'objectif de neutralité de la loi fiscale, n'est pas réservée, contrairement à ce que la société requérante soutient, aux associés personnes physiques ; que la circonstance, à la supposer établie, que l'intégration, en application de l'article 218 bis du code général des impôts, dans les résultats de la SASU Fav-Pomagro, imposables à l'impôt sur les sociétés, des déficits de la SCI des Hautes-Falaises n'ait pas affecté la valeur des parts sociales demeure sans incidence sur l'application du mécanisme de correction susmentionné ;
8. Considérant, en deuxième lieu, que la société requérante soutient que c'est à tort que le service a soustrait du prix d'acquisition des titres le montant des déficits de la SCI des Hautes-Falaises dès lors que, liés à la comptabilisation d'amortissements, ces déficits trouvent leur origine dans une disposition par laquelle le législateur a entendu conférer aux contribuables un avantage fiscal définitif et sont donc exclus du dispositif de correction ;
9. Considérant que l'amortissement comptable d'un élément d'actif immobilisé consiste à enregistrer dans les comptes de l'entreprise la perte de valeur inéluctable de ce bien au cours de sa durée de vie, du fait de son usure ou de son obsolescence ; que la réalisation d'un amortissement comptable permet, en conséquence, à l'entreprise de prendre en considération la dépréciation graduelle des actifs immobilisés et de mieux souligner les besoins de renouvellement des immobilisations amorties ; que, pris en compte au moment de la cession lors du calcul de la plus-value, l'amortissement s'analyse, dès lors, en une simple avance de trésorerie ; que les déficits litigieux ne trouvent, par suite, pas leur origine dans une disposition par laquelle le législateur a entendu conférer aux contribuables un avantage fiscal définitif ; que la société requérante n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que c'est à tort que la somme de 31 710 euros a été soustraite du prix d'acquisition des titres ;
10. Considérant, en troisième et dernier lieu, que la société requérante soutient qu'il doit être tenu compte de la transmission à la société civile Renaux Participations de la dette de 200 000 euros que la SCI des Hautes-Falaises détenait à son encontre ;
11. Considérant que la société requérante ne démontre pas en quoi cette transmission de dette a une incidence sur les modalités d'application du dispositif de correction énoncé au point 4 ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Fav-Pomagro n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la SARL Fav-Pomagro demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Fav-Pomagro est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Fav-Pomagro et au ministre de l'action et des comptes publics.
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N° 16NC00730