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06/02/2018 | FRANCE | N°16NC01211

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 06 février 2018, 16NC01211


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, à titre principal, d'annuler le titre exécutoire n° 2002/1081326 émis à son encontre le 10 janvier 2003 par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, pour un montant de 34 116,01 euros, et, à titre subsidiaire, de condamner cet établissement de santé à lui verser la somme de 34 116,01 euros en réparation de son préjudice.

Par un jugement n° 1301365 du 12 avril 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.


Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 juin 2016, M. E... A......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, à titre principal, d'annuler le titre exécutoire n° 2002/1081326 émis à son encontre le 10 janvier 2003 par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, pour un montant de 34 116,01 euros, et, à titre subsidiaire, de condamner cet établissement de santé à lui verser la somme de 34 116,01 euros en réparation de son préjudice.

Par un jugement n° 1301365 du 12 avril 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 juin 2016, M. E... A..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 12 avril 2016 ;

2°) à titre principal, d'annuler le titre exécutoire émis à son encontre le 10 janvier 2003 par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, pour un montant de 34 116,01 euros, et de le décharger de l'obligation de payer cette somme ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner le département du Bas-Rhin à le garantir du paiement de la somme réclamée à raison du titre exécutoire litigieux, y compris les intérêts et frais, ou, à défaut, de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à lui verser la somme de 34 116,01 euros en réparation de son préjudice ;

4°) de mettre à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg la somme de 1 800 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation ;

- les premiers juges ont dénaturé les pièces du dossier ;

- sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire du 10 janvier 2003 était recevable ;

- ce titre exécutoire omet de mentionner les bases de la liquidation ;

- il est privé de base légale dès lors que les frais d'hospitalisation devaient être pris en charge par l'aide médicale de l'Etat en application de l'article L. 251-1 du code de l'action sociale et des familles ;

- il appartient au département du Bas-Rhin de prendre ces frais à sa charge au titre de la politique de lutte contre la tuberculose ;

- l'établissement de santé a engagé sa responsabilité en lui prescrivant des soins sans s'assurer de son accord et sans l'informer des conséquences financières de son hospitalisation et des possibilités de prise en charge au titre de l'aide médicale d'Etat ou dans le cadre d'un dispensaire proposant des soins gratuits.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 janvier 2017, les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, représentés par MeC..., concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge du requérant en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la demande d'annulation présentée devant les premiers juges est irrecevable ;

- les moyens soulevés par le requérant à l'encontre du titre exécutoire ne sont pas fondés ;

- aucune faute n'est imputable au service hospitalier ;

- les conclusions d'appel en garantie dont nouvelles en appel et par suite irrecevables.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de la tardiveté de la demande d'annulation présentée le 22 mars 2013 au tribunal administratif dès lors que si M. A...soutient n'avoir jamais reçu notification du titre exécutoire n° 2002/1081326 du 10 janvier 2003 mentionnant les voies et délais de recours, il ressort du document établi par la trésorerie le 22 septembre 2009 qu'il a eu connaissance de ce titre à cette dernière date au plus tard et qu'il a ainsi saisi le tribunal administratif au-delà d'un délai raisonnable qui, sauf circonstances particulières dont se prévaudrait l'intéressé, ne saurait excéder un an à compter de la date à laquelle il est établi qu'il en eu connaissance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., pour les Hôpitaux universitaires de Strasbourg.

1. Considérant que M.A..., ressortissant étranger arrivé en France le 1er janvier 2002, a été pris en charge par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS) du 8 janvier 2002 au 12 mars 2002 pour le traitement d'une tuberculose ; que, le 10 janvier 2003, cet établissement de santé a émis à l'encontre de M. A...un titre exécutoire d'un montant de 34 116,01 euros correspondant aux frais de son hospitalisation ; que l'intéressé a saisi le tribunal administratif de Strasbourg aux fins d'obtenir, à titre principal, l'annulation de ce titre exécutoire et la décharge de l'obligation de payer la somme de 34 116,01 euros, et, à titre subsidiaire, la condamnation des HUS à l'indemniser du préjudice résultant selon lui d'un défaut d'information imputable à l'établissement de santé ; que M. A... fait appel du jugement du 12 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande et sollicite devant la cour, à titre principal, l'annulation du titre exécutoire et la décharge de l'obligation de payer la somme litigieuse, à titre subsidiaire, la condamnation du département du Bas-Rhin à le garantir du paiement de la somme réclamée, ou, à défaut, la condamnation des HUS à lui verser la somme de 34 116,01 euros en réparation de son préjudice ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, que le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci en a eu connaissance ; qu'en une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable ; qu'en règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la trésorerie des HUS a accordé un échéancier de paiement à M.A..., formalisé par un document visant les références du titre exécutoire émis à son encontre le 10 janvier 2003 et signé par l'intéressé le 22 septembre 2009 ; qu'une telle circonstance révèle qu'il a eu connaissance, au plus tard à cette dernière date, du titre exécutoire dont il a demandé l'annulation au tribunal administratif ; qu'alors même que le requérant soutient n'avoir jamais reçu cette décision, ni été informé des voies et délais de recours, elle était, faute d'avoir été contestée dans un délai raisonnable à compter du 22 septembre 2009, devenue définitive à la date du 22 mars 2013 à laquelle M. A...a saisi le tribunal administratif de conclusions tendant à son annulation ; qu'il s'ensuit que ces conclusions d'annulation étaient tardives ; que dans ces conditions, M. A...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté lesdites conclusions comme irrecevables ;

4. Considérant, en second lieu, que dans l'hypothèse où les premiers juges auraient commis, comme le soutient M.A..., une erreur de droit ou une erreur d'appréciation susceptibles de remettre en cause, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, les motifs qu'ils ont retenus pour rejeter ses conclusions indemnitaires, les erreurs alléguées qui se rapportent au bien-fondé du jugement attaqué resteraient, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de ce jugement ;

Sur les conclusions d'appel en garantie dirigées contre le département du Bas-Rhin :

5. Considérant que M.A..., qui n'a pas présenté devant le tribunal administratif de Strasbourg de conclusions tendant à ce que le département du Bas-Rhin le garantisse du paiement des sommes réclamées par les HUS, n'est pas recevable à présenter pour la première fois en appel de telles conclusions ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

6. Considérant que M. A...soutient avoir été hospitalisé dans les services des HUS du 8 janvier au 12 mars 2002 sans avoir été informé par l'établissement de santé des conséquences financières de son hospitalisation et des possibilités de prise en charge au titre de l'aide médicale de l'Etat ou dans le cadre d'un dispensaire antituberculeux proposant des soins gratuits ;

7. Considérant, d'une part, que si le requérant invoque les dispositions de l'article L. 1111-1 du code de la santé publique en application desquelles le libre choix du praticien et de l'établissement de santé constitue un principe fondamental, il n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il aurait été contraint de subir une hospitalisation ; que M. A...ne saurait utilement se prévaloir d'un défaut d'information, en méconnaissance de l'article L. 1111-2 du même code, alors qu'il ne résulte pas de l'instruction, et qu'il n'est pas même allégué, que l'intéressé aurait subi, au cours de son hospitalisation, un dommage résultant de la réalisation d'un risque médical dont il n'aurait pas été informé ;

8. Considérant, d'autre part, que M. A...se prévaut des dispositions alors applicables des articles L. 3112-4 et L. 3112-5 du code de la santé publique, en application desquelles des dispensaires étaient chargés d'assurer la prophylaxie individuelle, familiale et collective de la tuberculose et de proposer, à titre gratuit, le suivi médical et la délivrance de médicaments antituberculeux ; que, toutefois, le requérant n'établit pas, en l'absence notamment de toute information sur la gravité de son état de santé lors de sa prise en charge par les HUS le 8 janvier 2002, que la tuberculose dont il était atteint pouvait être soignée par la seule prescription de médicaments, dans le cadre d'un suivi médical, sans nécessiter son hospitalisation ; que, dans ces conditions, il ne saurait se prévaloir d'une faute dans l'absence d'information sur la possibilité d'une prise en charge médicale par un dispensaire ; que par ailleurs, le requérant, qui ne démontre pas que le traitement de sa tuberculose ne nécessitait aucune hospitalisation, ne saurait se prévaloir d'un défaut d'information concernant le montant des frais d'hébergement susceptibles de rester à sa charge ;

9. Considérant, enfin, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 251-1 du code de l'action sociale et des familles, dans sa version applicable au litige : " Tout étranger résidant en France sans remplir les conditions fixées par l'article L. 380-1 du code de la sécurité sociale et dont les ressources ne dépassent pas le plafond mentionné à l'article L. 861-1 de ce code a droit, pour lui-même et les personnes à sa charge au sens des articles L. 161-14 et L. 313-3 de ce code, autres que celles visées à l'article L. 380-5 de ce code à l'aide médicale de l'Etat " ; qu'en application du deuxième alinéa de cet article, dans sa version applicable : " En outre, toute personne qui, ne résidant pas en France, est présente sur le territoire français, et dont l'état de santé le justifie, peut, par décision individuelle prise par le ministre chargé de l'action sociale, bénéficier de l'aide médicale de l'Etat dans les conditions prévues par l'article L. 252-1. Dans ce cas, la prise en charge des dépenses mentionnées à l'article L. 251-2 peut être partielle " ;

10. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la date de son hospitalisation, M. A...ne résidait pas en France ; qu'ainsi, et contrairement à ce qu'il soutient, il ne pouvait bénéficier d'un droit au bénéfice de l'aide médicale de l'Etat en application des dispositions précitées du premier alinéa de l'article L. 251-1 du code de l'action sociale et des familles ; que s'il pouvait prétendre à cette aide en application du deuxième alinéa du même article, son bénéfice était subordonné à une décision du ministre chargé de l'action sociale, lequel dispose d'un large pouvoir pour apprécier, au regard de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'opportunité d'accorder une telle aide ; que, dans ces conditions, alors que le requérant n'apporte à l'instance aucun élément sur sa situation lors de son hospitalisation, notamment la gravité de son état de santé, qui aurait pu conduire le ministre à lui accorder l'aide médicale, il n'établit pas que le défaut d'information reproché aux HUS sur l'existence de l'aide médicale de l'Etat, à le supposer fautif, présenterait un lien de causalité direct avec le préjudice dont il demande réparation ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande indemnitaire ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des HUS, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. A...demande le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A...le versement de la somme que les HUS demandent sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions des HUS présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A...et aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg.

4

N° 16NC01211


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01211
Date de la décision : 06/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Délais.

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : BRIGNATZ

Origine de la décision
Date de l'import : 10/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-02-06;16nc01211 ?
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