Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision implicite par laquelle l'Eurométropole de Strasbourg a rejeté sa demande du 16 février 2015 tendant à la remise en état de la parcelle lui appartenant cadastrée section 30 n° 61 à Lingolsheim sur laquelle l'Eurométropole a implanté un bassin de rétention, d'enjoindre à l'Eurométropole de remettre la parcelle dans son état initial dans un délai de six mois à compter de la décision à intervenir et de condamner l'Eurométropole à lui payer la somme de 600 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'occupation irrégulière de sa propriété.
Par un jugement n° 1504999 du 31 mai 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné l'Eurométropole de Strasbourg à verser au syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " une indemnité pour emprise illégale de 3 000 euros par an à compter de 2011 jusqu'à cessation de l'empiétement illégal ainsi qu'une somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.
Procédure devant la cour :
I. Sous le numéro 17NC01676, par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 juillet et 7 novembre 2017, le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité ", représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 mai 2017 ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet née de l'absence de réponse de l'Eurométropole de Strasbourg à son courrier du 16 février 2015 ainsi que la décision du 13 mai 2015 ;
3°) d'ordonner une expertise et désigner tel expert qu'il plaira avec pour mission de réunir les parties, déterminer l'emprise du bassin de rétention, chiffrer la valeur locative et la valeur vénale du terrain occupé par l'Eurométropole de Strasbourg et chiffrer son préjudice ;
4°) de condamner l'Eurométropole de Strasbourg à lui payer la somme de 20 000 euros par an à compter de 1996 à titre de provision sur l'indemnité de dépossession provisoire ;
5°) d'enjoindre à l'Eurométropole de Strasbourg de remettre la parcelle dans son état initial dans un délai de six mois à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
6°) de condamner l'Eurométropole de Strasbourg à lui payer la somme de 608 580 euros à titre de provision sur l'indemnité de dépossession définitive ;
7°) de mettre à la charge de l'Eurométropole de Strasbourg le versement de la somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " soutient que :
- l'Eurométropole a construit sur la parcelle lui appartenant un bassin de rétention sans justifier détenir un titre l'y habilitant ;
- il est fondé à solliciter une indemnité d'occupation pour chaque année durant laquelle il a été privé de la jouissance de son bien ;
- le montant de l'indemnité d'emprise illégale mise à la charge de l'Eurométropole de Strasbourg par le jugement est, compte tenu de l'emprise du bassin de rétention, insuffisant :
- les nombreux courriers qu'il a échangés avec la communauté urbaine de Strasbourg depuis 2012 ayant eu pour effet d'interrompre le délai de la prescription quadriennale, les années antérieures à 2001 ne sont pas prescrites contrairement à ce qu'à jugé le tribunal ;
- le bassin de rétention, qui n'est d'aucune utilité, doit être démoli ;
- si la cour refusait d'ordonner la remise en état de la parcelle, il aurait alors droit à une indemnité de dépossession définitive dont le montant devrait être fixé, compte tenu de la superficie de la parcelle et de son caractère constructible, à la somme de 608 580 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2017, l'Eurométropole de Strasbourg conclut au rejet de la requête, à l'annulation de l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 mai 2017, subsidiairement à la réduction du montant de l'indemnité pour emprise illégale mise à sa charge par ce jugement, enfin à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge du syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
L'Eurométropole soutient que :
- en la condamnant à indemniser le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " de son préjudice de jouissance pour l'avenir alors que ledit syndicat n'avait formulé dans sa demande aucune demande en ce sens, le tribunal a statué ultra petita ;
- la demande du syndicat à être indemnisé de son préjudice de jouissance qui constitue une demande nouvelle en appel est irrecevable ;
- il n'y a pas d'emprise irrégulière, le bassin de rétention ayant été construit avec l'autorisation du syndicat des copropriétaires ;
- le préjudice allégué par le syndicat tenant à l'occupation de son terrain par le bassin de rétention est prescrit depuis le 1er janvier 2001 ;
- l'ouvrage construit étant enterré, aucune indemnité n'est due au titre d'un prétendu préjudice de jouissance ;
- le syndicat restant propriétaire de son terrain, il ne peut prétendre à une indemnité de dépossession définitive.
Par ordonnance du 6 octobre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 6 décembre 2017.
Par courrier du 19 décembre 2017, des pièces complémentaires ont été demandées au syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " pour compléter l'instruction, en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.
Les pièces sollicitées ont été produites par le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " le 9 janvier 2018.
Des mémoires présentés pour l'Eurométropole de Strasbourg ont été enregistrés les 11 décembre 2017 et 29 janvier 2018.
Un mémoire présenté pour le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " a été enregistré le 29 janvier 2018.
II. Sous le numéro 17NC01691, par une requête et des mémoires enregistrés les 12 juillet, 24 octobre et 12 décembre 2017, l'Eurométropole de Strasbourg, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 mai 2017 ;
2°) de rejeter la demande présentée par le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
3°) de rejeter les conclusions d'appel incident présentées en appel par le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " ;
4°) subsidiairement de réduire le montant de l'indemnité d'emprise illégale mise à sa charge par le jugement du 31 mai 2017 ;
5°) de mettre à la charge du syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
L'Eurométropole de Strasbourg soutient que :
- en la condamnant à indemniser le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " de son préjudice de jouissance pour l'avenir alors que ledit syndicat n'avait formulé dans sa demande aucune demande en ce sens, le tribunal a statué ultra petita ;
- la demande présentée pour la première fois en appel par le syndicat d'être indemnisé de son préjudice de jouissance qui constitue une demande nouvelle est irrecevable ;
- il n'y a pas d'emprise irrégulière, le bassin de rétention ayant été construit avec l'autorisation du syndicat des copropriétaires ;
- le préjudice allégué par le syndicat tenant à l'occupation de son terrain par le bassin de rétention est prescrit depuis le 1er janvier 2001 ;
- l'ouvrage construit étant enterré, aucune indemnité n'est due au titre d'un prétendu préjudice de jouissance ;
- la démolition de l'ouvrage entrainerait une atteinte excessive à l'intérêt général ;
- le syndicat restant propriétaire de son terrain, il ne peut prétendre à une indemnité de dépossession définitive.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 12 septembre et 7 novembre 2017 et 9 janvier 2018, le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " demande à la cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet née de l'absence de réponse de l'Eurométropole de Strasbourg à son courrier du 16 février 2015 ainsi que la décision du 13 mai 2015 ;
3°) d'ordonner une expertise et désigner tel expert qu'il plaira avec pour mission de réunir les parties, déterminer l'emprise du bassin de rétention, chiffrer la valeur locative et la valeur vénale du terrain occupé par l'Eurométropole de Strasbourg et chiffrer son préjudice ;
4°) de condamner l'Eurométropole de Strasbourg à lui payer la somme de 20 000 euros par an à compter de 1996 à titre de provision sur l'indemnité de dépossession provisoire ;
5°) d'enjoindre à l'Eurométropole de Strasbourg de remettre la parcelle dans son état initial dans un délai de six mois à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
6°) de condamner l'Eurométropole de Strasbourg à lui payer la somme de 608 580 euros à titre de provision sur l'indemnité de dépossession définitive ;
7°) de mettre à la charge de l'Eurométropole de Strasbourg le versement de la somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle cité " soutient que :
- l'Eurométropole a construit sur la parcelle lui appartenant un bassin de rétention sans justifier détenir un titre l'y habilitant ;
- il est fondé à solliciter une indemnité d'occupation pour chaque année durant laquelle il a été privé de la jouissance de son bien ;
- le montant de l'indemnité d'emprise illégale mise à la charge de l'Eurométropole de Strasbourg par le jugement est, compte tenu de l'emprise du bassin de rétention, insuffisant ;
- les nombreux courriers qu'il a échangés avec la communauté urbaine de Strasbourg depuis 2012 ayant eu pour effet d'interrompre le délai de la prescription quadriennale, les années antérieures à 2001 ne sont pas prescrites contrairement à ce qu'à jugé le tribunal ;
- le bassin de rétention, qui n'est d'aucune utilité, doit être démoli ;
- si la cour refusait d'ordonner la remise en état de la parcelle, il aurait alors droit à une indemnité de dépossession définitive dont le montant devrait être fixé, compte tenu de la superficie de la parcelle et de son caractère constructible, à la somme de 608 580 euros.
Par courrier du 19 décembre 2017, des pièces complémentaires ont été demandées au syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité" pour compléter l'instruction, en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.
Les pièces sollicitées ont été produites par le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité "le 9 janvier 2018.
Par ordonnance du 12 janvier 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 29 janvier 2018.
Un mémoire présenté pour l'Eurométropole de Strasbourg a été enregistré le 29 janvier 2018.
Des mémoires présentés pour le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " ont été enregistrés le 29 janvier 2018.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laubriat, premier conseiller,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., pour le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité ", ainsi que celles de MeA..., pour l'Eurométropole de Strasbourg.
Considérant ce qui suit :
1. La communauté urbaine de Strasbourg, aux droits de laquelle vient désormais l'Eurométropole de Strasbourg, a construit en 1996 un bassin de rétention des eaux de pluie sur une partie d'une parcelle cadastrée section 30 n° 61 à Lingolsheim dont il n'est pas contesté qu'elle appartient au syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité ". Par un courrier du 16 février 2015, le conseil de ce syndicat a demandé à l'Eurométropole la remise de la parcelle d'emprise dans son état initial et, à défaut, le paiement par l'Eurométropole d'une indemnité de 600 000 euros. En l'absence de réponse de l'Eurométropole de Strasbourg, le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " a saisi, le 2 septembre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle l'Eurométropole a rejeté sa demande de remise en état, à ce qu'il soit enjoint à l'Eurométropole de remettre la parcelle dans son état initial, enfin à la condamnation de l'Eurométropole à lui verser une indemnité de 600 000 euros en réparation du préjudice résultant pour lui de l'occupation irrégulière de sa propriété. Par l'article 1er de son jugement du 31 mai 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné l'Eurométropole de Strasbourg à verser au syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " une indemnité pour emprise illégale de 3 000 euros par an à compter de 2011 jusqu'à cessation de l'empiétement illégal. Par l'article 3 de son jugement, le tribunal administratif a par ailleurs rejeté le surplus des conclusions de la demande du syndicat. Par la requête enregistrée sous le numéro 17NC01676, le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " fait appel de ce jugement en tant à la fois qu'il a limité le montant de l'indemnité pour emprise illégale mise à la charge de l'Eurométropole à la somme de 3 000 euros par an depuis 2011 et rejeté le surplus de sa requête. Par la requête enregistrée sous le numéro 17NC01691, l'Eurométropole de Strasbourg fait appel de l'article 1er du même jugement.
2. Les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Par suite, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur la requête 17NC01691 :
3. Il résulte de l'instruction que lors de son assemblée générale du 20 mai 1996, le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " a adopté une résolution n° 11 autorisant la communauté urbaine de Strasbourg à implanter un bac de rétention au sous-sol de son espace vert situé en face de l'immeuble bâtiment E, entrées 13 à 21 sous réserve de la remise en état des espaces verts. La circonstance que cette autorisation consentie par le syndicat des copropriétaires n'est assortie d'aucune contrepartie pécuniaire est sans incidence sur sa validité. Dans ces conditions, l'Eurométropole de Strasbourg, qui justifie ainsi d'un titre d'occupation, est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 31 mai 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a déclaré que l'implantation sur ce terrain d'un bassin de rétention constituait une emprise irrégulière.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, que l'Eurométropole de Strasbourg est fondée à demander l'annulation de l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 mai 2017 la condamnant à verser au syndicat des copropriétaires une indemnité pour emprise illégale de 3 000 euros par an à compter de 2011 jusqu'à cessation de l'empiètement illégal ainsi que de l'article 2 mettant à sa charge une somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur la requête 17NC01676 :
5. L'ouvrage n'étant pas implanté de façon irrégulière, les conclusions du syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " tendant à la condamnation de l'Eurométropole de Strasbourg à lui payer les sommes de 20 000 euros par an à compter de 1996 à titre de provision sur l'indemnité de dépossession provisoire et 608 580 euros à titre de provision sur l'indemnité de dépossession définitive doivent, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, être rejetées.
6. Par ailleurs, dès lors qu'il n'est pas établi ni même allégué que l'assemblée générale des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " aurait adopté une résolution mettant fin à l'autorisation d'occupation accordée à l'Eurométropole, le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " n'est pas fondé à demander l'annulation de l'article 3 du jugement du 31 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les conclusions de sa demande à fin d'annulation de la décision implicite par laquelle l'Eurométropole de Strasbourg a opposé un refus à sa demande du 16 février 2015 tendant à la remise en état de la parcelle en litige. Les conclusions par lesquelles le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " demandait à ce qu'il soit enjoint à l'Eurométropole de Strasbourg de remettre la parcelle dans son état initial doivent également être rejetées par voie de conséquence.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Eurométropole de Strasbourg, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " une somme de 1 500 euros à verser à l'Eurométropole de Strasbourg sur le fondement des mêmes dispositions.
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 mai 2017 sont annulés.
Article 2 : La requête n° 17NC01676 du syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " et les conclusions d'appel incident formées par ce même syndicat dans la requête 17NC01691 sont rejetées.
Article 3 : Le syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " versera à l'Eurométropole de Strasbourg une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat des copropriétaires de la résidence " Nouvelle Cité " et à l'Eurométropole de Strasbourg.
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N° 17NC01676-17NC01691