Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La commune de Courcelles-Chaussy a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner solidairement, au titre de la garantie décennale, la société Etablissements Boucherez et la société Etablissements Ferster à lui verser une somme de 50 379,33 euros en réparation des désordres ayant affecté le réseau de distribution de chauffage du groupe scolaire communal et de les condamner solidairement aux dépens.
Par un jugement n° 1406639 du 23 novembre 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné solidairement la société Etablissements Ferster et la société Etablissements Boucherez à verser à la commune de Courcelles-Chaussy, sur le fondement de la garantie décennale, une somme de 50 379,33 euros toutes taxes comprises (TTC) ainsi qu'à lui rembourser une somme de 2 606,06 euros au titre des frais d'expertise et a condamné la société Etablissements Boucherez à garantir la société Etablissements Ferster à hauteur de 25 % du montant de ces condamnations.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 janvier 2017 et 15 novembre 2017, la société Etablissements Boucherez, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 23 novembre 2016 en tant qu'il l'a condamnée à garantir la société Etablissements Ferster à hauteur de 25 % des condamnations prononcées à son encontre ;
2°) de condamner la société Etablissements Ferster à la garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre, à hauteur d'une quote-part de 80 % au minimum ;
3°) de mettre à la charge de la société Etablissements Ferster le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les désordres affectant le réseau de distribution de chauffage du groupe scolaire communal trouvent leur cause principale dans le manque d'étanchéité des dallettes qui recouvrent le caniveau et qui ont été posées par la société Etablissements Ferster ;
- la qualité des systèmes de protection à l'humidité de la laine de verre et l'absence de colliers et guides des tuyauteries qu'elle a réalisés ne sont que dans une moindre mesure à l'origine des désordres ;
- il ressort du rapport de l'expert que les travaux réalisés par la société Etablissements Ferster sont de manière prépondérante à l'origine des désordres dès lors que le défaut d'étanchéité du carneau est à l'origine du taux d'humidité anormal et des infiltrations qui ont eu pour conséquence d'entraîner la corrosion des tuyauteries par un effet de condensation sur leur partie extérieure du fait de la mise en route des circuits de chauffage ;
- sa quote-part de responsabilité ne saurait ainsi excéder 20 % et subsidiairement 50 %.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 novembre 2017, la société Etablissements Ferster, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Etablissements Boucherez sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que le manque d'étanchéité des dallettes n'est pas la cause principale des désordres.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 novembre 2017, la commune de Courcelles-Chaussy, représentée par la SELARL Cossalter, De Zolt et Couronne, demande à la cour de confirmer le dispositif du jugement attaqué condamnant solidairement la société Etablissements Boucherez et la société Etablissements Ferster à lui verser une somme de 50 379,33 euros et s'en rapporte pour le surplus à la sagesse de la cour.
Elle soutient que la requête de la société Etablissements Boucherez ne porte pas sur le principe même de la responsabilité des deux sociétés reconnu par le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 23 novembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Michel, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,
- et les observations de Me C...pour la commune de Courcelles-Chaussy.
1. Considérant que la commune de Courcelles-Chaussy a fait procéder en 2003 à la réfection du réseau souterrain de chauffage et d'eau froide de son groupe scolaire communal ; qu'elle a conclu avec la société Etablissements Ferster un marché de terrassement et avec la société Etablissements Boucherez un marché de réfection des canalisations ; qu'au cours de l'hiver 2010-2011, des fuites ont été constatées au niveau des canalisations remplacées et que le service technique communal a été contraint d'intervenir à neuf reprises, entre décembre 2010 et février 2011 ; que, par une ordonnance de référé du 10 décembre 2012, le président du tribunal administratif de Strasbourg a désigné un expert qui a rendu son rapport le 22 avril 2013 ; que, par un jugement du 23 novembre 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné solidairement la société Etablissements Ferster et la société Etablissements Boucherez à verser à la commune de Courcelles-Chaussy, sur le fondement de la garantie décennale, une somme de 50 379,33 euros toutes taxes comprises (TTC) ainsi qu'une somme de 2 606,06 euros au titre des dépens et a condamné la société Etablissements Boucherez à garantir la société Etablissements Ferster à hauteur de 25 % des condamnations précitées ; que la société Etablissements Boucherez relève appel de ce jugement en tant qu'il l'a condamnée à garantir la société Etablissements Ferster à hauteur de 25 % des condamnations prononcées à son encontre ;
2. Considérant que le recours entre constructeurs, non contractuellement liés, ne peut avoir qu'un fondement quasi-délictuel et que, coauteurs obligés in solidum à la réparation d'un même dommage, ces constructeurs ne sont tenus entre eux que pour la part déterminée à proportion du degré de gravité des fautes respectives qu'ils ont personnellement commises ;
3. Considérant que le réseau souterrain de chauffage et d'eau froide du groupe scolaire communal présente des fuites à répétition qui sont dues à un double phénomène de corrosion et d'érosion des canalisations ; qu'il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté en appel que ces désordres sont imputables à la société Etablissements Ferster qui a réalisé la pose des dalles de couverture du carneau accueillant les canalisations et à la société Etablissements Boucherez qui a assuré la réfection des tuyauteries ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert que les désordres d'infiltration et le taux d'humidité résultent notamment du manque d'étanchéité des dalles de couverture du carneau dont la société Etablissements Ferster avait la charge ; que ces désordres, ainsi que l'a relevé l'expert, résultent également d'un calorifuge réalisé par la société Etablissements Boucherez qui n'était pas terminé par un système de bandage avec un enduit " carbolac " ou un goudron étanche susceptible d'empêcher la migration de l'humidité dans l'isolant, ainsi que de l'absence de colliers et de guides des tuyauteries ; que ces manquements aux règles de l'art par la société Etablissements Boucherez dans l'exécution de son marché a concouru à la corrosion des canalisations ; qu'en outre, l'effet combiné de la dilatation des tuyaux et de leur mauvaise disposition par la société Etablissements Boucherez a entraîné un phénomène de frottement à l'origine de leur érosion, ainsi que le percement des canalisations en plusieurs endroits ; que, par ailleurs, et contrairement à ce que soutient la société Etablissements Boucherez, il ne résulte pas de l'instruction que les désordres affectant le réseau souterrain de chauffage et d'eau froide du groupe scolaire communal ne se seraient pas produits si les dalles de couverture du carneau avaient été étanches dès lors, ainsi que l'a relevé l'expert, que la corrosion liée à la mise en place des tuyaux sur les guides de dilatation n'a aucun lien avec les eaux d'infiltration en provenance des caniveaux ; qu'ainsi, les fautes commises par la société Etablissements Boucherez dans l'exécution de son marché, qui sont à l'origine non seulement de la corrosion mais aussi de l'érosion des canalisations ont, contrairement à ce qu'elle soutient, contribué à titre principal à la réalisation des désordres d'infiltration et d'humidité affectant le réseau souterrain de chauffage et d'eau froide du groupe scolaire communal ; que s'agissant de l'importance respective des fautes commises par la société Etablissements Boucherez et la société Etablissements Ferster dans la survenance des désordres, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce en fixant à 75 % la part de responsabilité incombant à la société Etablissements Boucherez et à 25 % la part incombant à la société Etablissements Ferster ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Etablissements Boucherez n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a condamnée à garantir la société Etablissements Ferster à hauteur de 25 % des condamnations prononcées à son encontre pour les sommes de 50 379,33 euros toutes taxes comprises et 2 606,06 euros ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la société Etablissements Boucherez le versement à la société Etablissements Ferster d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Etablissements Boucherez est rejetée.
Article 2 : La société Etablissements Boucherez est condamnée à verser à la société Etablissements Ferster une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Etablissements Boucherez, à la société Etablissements Ferster et à la commune de Courcelles-Chaussy.
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N° 17NC00111