Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Iper Eol Lidrezing a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 14 août 2015 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un permis de construire modificatif concernant un projet de parc éolien, ainsi que la décision du 20 novembre 2015 rejetant son recours gracieux.
Par un jugement n° 1600150 du 1er décembre 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 1er février 2017, la société Iper Eol Lidrezing, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 1er décembre 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Moselle du 14 août 2015 ainsi que la décision du 20 novembre 2015 de rejet de son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer le permis de construire modificatif sollicité dans sa demande du 4 juin 2015 dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de décider en tant que de besoin de toute mesure d'instruction utile à la résolution du présent litige, comme une expertise ou un transport sur les lieux ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Iper Eol Lidrezing soutient que :
- le jugement, qui n'est pas signé par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier de l'audience en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, est irrégulier ;
- le jugement, qui n'explique pas en quoi les modifications auraient un caractère substantiel, est entaché d'un défaut de motivation ;
- le jugement a omis de répondre au moyen tiré ce que l'avis émis par la direction départementale des territoires n'a pas été joint à l'arrêté du 14 août 2015 ;
- le jugement a omis de répondre au moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté du 14 août 2015 ;
- l'arrêté du 14 août 2015 a été signé par une autorité incompétente ;
- l'avis émis par la direction départementale des territoires aurait dû être joint à l'arrêté du 14 août 2015 ;
- l'arrêté du 14 août 2015 est entaché d'une insuffisance de motivation ;
- les avis favorables émis par le ministre de la défense et par le ministre en charge de l'aviation civile ne sont pas visés ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que les modifications apportées par la demande de permis modificatif au permis initial étant substantielles, elles nécessitaient le dépôt d'une nouvelle demande de permis de construire.
La requête a été communiquée à la commune de Lidrezing, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Par courriers des 31 janvier et 8 février 2018, des pièces complémentaires ont été demandées aux parties pour compléter l'instruction, en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.
Par un courrier enregistré le 6 février 2018, le préfet de la Moselle a produit les pièces sollicitées.
Par un courrier enregistré le 20 février 2018, la société Iper Eol Lidrezing a communiqué les informations sollicitées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Le ministre s'en remet aux observations présentées par le préfet de la Moselle en première instance.
Par ordonnance du 22 février 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 15 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laubriat, premier conseiller,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., pour la société Iper Eol Lidrezing, ainsi que celles de M.A..., maire de la commune de Lidrezing.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 5 mai 2014, le préfet de la Moselle a accordé à la société Eiden un permis de construire 6 aérogénérateurs et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Lidrezing en Moselle. Par un second arrêté du même jour, le préfet de la Moselle a accordé le transfert de ce permis à la société Iper Eol Lidrezing. Le 4 juin 2015, cette société a déposé une demande de permis modificatif. Par un arrêté du 14 août 2015, le préfet a opposé un refus à cette demande, puis a rejeté le 20 novembre 2015 le recours gracieux formé le 12 octobre 2015. La société Iper Eol Lidrezing fait appel du jugement du 1er décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 août 2015 ainsi que de la décision du 20 novembre 2015.
Sur le bien fondé du jugement :
2. Un permis de construire modificatif portant sur un accroissement des dimensions d'une construction ayant auparavant fait l'objet d'un permis de construire ne peut être légalement délivré que lorsque les transformations prévues, rapportées à l'importance globale du projet tel qu'il a été initialement autorisé, n'en altèrent pas la conception générale. Il appartient à cet effet à l'autorité compétente et au juge administratif d'apprécier notamment si ces transformations n'aggravent pas substantiellement l'impact visuel de la construction dans les espaces proches.
3. Il ressort du dossier de demande de permis modificatif déposé le 4 juin 2015 que les modifications envisagées consistent, d'une part en un changement d'implantation du poste de livraison et des éoliennes E1 et E6, d'autre part en un changement de modèle d'aérogénérateurs, les machines Repower MM dont l'installation était prévue au permis initial étant remplacées par des Vestas V100.
4. Il ressort des études produites par le pétitionnaire à l'appui de sa demande de permis modificatif que le déplacement du poste de livraison est complètement neutre au niveau de l'impact visuel de la construction. Le déplacement d'une vingtaine de mètres des deux éoliennes E1 et E6 par rapport à leur implantation initiale aura pour seul effet de les éloigner des boisements forestiers environnants. Le remplacement des aérogénérateurs modèle Repower MM par un modèle Vestas V100 induit des changements plus significatifs. Pour une puissance unitaire équivalente (2 MW), les caractéristiques des machines sont en effet sensiblement différentes, la hauteur des mâts passant de 80 à 100 mètres, soit une augmentation de l'ordre de 25 %, le diamètre des rotors de 82 à 100 mètres -soit une augmentation de 21,95 %- et la hauteur en bout de pale de 121 à 150 mètres. Il ressort toutefois des études d'impact produites par la société Iper Eol Lidrezing, dont les données ne sont pas sérieusement contestées en défense, que si l'augmentation de la taille des mâts et des pales entre les deux modèles d'aérogénérateurs est perceptible pour un observateur situé à proximité immédiate, cette différence n'est pas réellement repérable à distance. Malgré l'ampleur du rehaussement, l'impact visuel dans les zones avoisinantes ne sera donc pas substantiellement aggravé. Enfin l'étude acoustique fournie par le pétitionnaire révèle l'absence d'augmentation de la pression acoustique en cas de changement de modèle d'aérogénérateur. Par suite, la société Iper Eol Lidrezing est fondée à soutenir que le préfet de la Moselle a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que les modifications apportées par la demande de permis modificatif au permis initial étaient substantielles et nécessitaient le dépôt d'une nouvelle demande de permis de construire.
5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la société Iper Eol Lidrezing est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
6. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que l'autorité administrative délivre à la société Iper Eol Lidrezing le permis de construire modificatif que cette société avait sollicité dans sa demande du 4 juin 2015. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Moselle de délivrer ce permis de construire modificatif dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Iper Eol Lidrezing et non compris dans les dépens.
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1600150 du 1er décembre 2016 du tribunal administratif de Strasbourg, l'arrêté du préfet de la Moselle du 14 août 2015 rejetant la demande de permis modificatif sollicitée par la société Iper Eol Lidrezing ainsi que la décision du 20 novembre 2015 de rejet du recours gracieux formé par cette dernière sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Moselle de délivrer à la société Iper Eol Lidrezing le permis de construire modificatif qu'elle avait sollicité dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à la société Iper Eol Lidrezing une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Société Iper Eol Lidrezing, à la commune de Lidrezing et au ministre de la transition écologique et solidaire.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
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N° 17NC00222