Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 10 mai 2013 par laquelle le recteur de l'académie de Nancy-Metz l'a admise à la retraite à compter du 1er septembre 2013 pour atteinte de la limite d'âge et d'enjoindre au recteur de l'autoriser à poursuivre son activité jusqu'à ses 65 ans.
Par un jugement no 1303632 du 9 novembre 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet arrêté et rejeté les conclusions à fin d'injonction.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2016, le ministre de l'éducation nationale demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement no 1303632 du 9 novembre 2016 ;
2°) de rejeter la demande de MmeA....
Il soutient que :
- les premiers juges ont commis une erreur de droit en appliquant les dispositions de l'article 1-3 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 et le décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 dans le champ desquels n'entrait pas la situation de Mme A... ;
- aucune décision implicite d'acceptation n'a pu naître en application de l'article 4 du décret du 30 décembre 2009 en l'absence de production d'un avis du médecin agréé ;
- Mme A...n'a, en vertu de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984, aucun droit au maintien en activité ; l'intérêt du service ne justifiait pas de la maintenir en activité jusqu'en juillet 2015 dès lors qu'elle n'était pas en mesure d'assurer de façon satisfaisante ses missions pédagogiques ; son admission à la retraite n'était donc pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mai 2017, Mme C...A..., représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la loi du 13 septembre 1984 ne comporte aucune distinction selon la catégorie à laquelle appartient le fonctionnaire ; une décision implicite d'acceptation a donc pu naître de l'application de cette loi et du décret du 30 décembre 2009 ;
- il n'apparaît pas que le certificat médical prévu au I de l'article 4 du décret du 30 décembre 2009 constituerait une condition de recevabilité de la demande de prolongation ; en outre, le tribunal a justement relevé qu'elle avait produit un certificat médical ; il appartenait à l'administration de réclamer un certificat médical pour compléter son dossier en application de l'article 19 de la loi du 12 avril 2000 ;
- l'intérêt du service ne constitue pas une condition nécessaire à la naissance d'une décision implicite d'acceptation ; l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984 doit être lu à la lumière de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000 et de la loi du 13 novembre 2013 ;
- ses prétendues difficultés pédagogiques sont contestées et sans intérêt.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;
- la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 ;
- le décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 pris pour l'application de l'article 1-3 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Barteaux,
- et les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. MmeA..., née en 1948, professeur de lycée professionnel, affectée à Freyming Merlebach, a demandé, par un courrier du 6 juillet 2012, une prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge de 65 ans applicable à son corps, pour atteindre la durée maximale de services liquidables prévue par l'article 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Par un arrêté du 10 mai 2013, le recteur de l'académie de Nancy-Metz a décidé son maintien en activité jusqu'à la fin de l'année scolaire 2012/2013 et l'a admise à la retraite pour limite d'âge à compter du 1er septembre 2013. Le tribunal administratif de Strasbourg, par un jugement du 9 novembre 2016 dont le ministre de l'éducation nationale relève appel, a annulé cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Pour annuler l'arrêté attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur les dispositions de l'article 4 du décret du 30 décembre 2009 pris en application de l'article 1-3 de la loi du loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public. Il a considéré, au vu de ces dispositions, que Mme A...devait être regardée comme ayant sollicité une prolongation d'activité au-delà de 65 ans à compter du 16 juillet 2012 et qu'en l'absence de réponse dans le délai de trois mois suivant cette demande, une décision implicite d'acceptation était née que l'administration, dessaisie de son pouvoir d'appréciation, ne pouvait plus retirer, même pour un motif d'illégalité, par l'arrêté du 10 mai 2013.
3. Aux termes de l'article 1-3 de la loi du 13 septembre 1984 : " Sous réserve des droits au recul des limites d'âge prévus par l'article 4 de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires régis par la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires appartenant à des corps ou des cadres d'emplois dont la limite d'âge est inférieure à la limite d'âge prévue au premier alinéa de l'article 1er de la présente loi sont, sur leur demande, lorsqu'ils atteignent cette limite d'âge, maintenus en activité jusqu'à un âge égal à la limite d'âge prévue au même premier alinéa, dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, sous réserve de leur aptitude physique. ". Le décret du 30 décembre 2009 a été pris pour l'application de l'article 1-3 de cette loi.
4. En vertu de ces dispositions, la procédure prévue par le décret du 30 novembre 2009 ne s'applique qu'aux fonctionnaires appartenant à des corps ou cadres d'emplois pour lesquels la limite d'âge est inférieure à soixante-cinq ans, soit ceux qui relèvent de la catégorie active. Il est constant que Mme A...appartient à un corps de fonctionnaire pour lequel la limite d'âge est fixée à soixante-cinq ans. Ainsi, sa situation n'entrait pas dans le champ d'application des dispositions de l'article 4 de ce décret. Par suite, le tribunal a méconnu le champ d'application de la loi en se fondant sur les dispositions de ce décret pour juger que le silence gardé pendant trois mois par l'administration sur la demande de prolongation d'activité présentée par Mme A...avait fait naître une décision implicite d'acception qui ne pouvait plus être retirée. C'est donc à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a annulé, pour ce motif, la décision du 10 mai 2013.
5. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par MmeA....
Sur la légalité de la décision attaquée :
6. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000, dans leur rédaction applicable au litige et qui ont vocation à s'appliquer aux fonctionnaires en vertu de l'article 18 de cette même loi, que le silence gardé pendant deux mois par l'administration sur la demande d'un agent vaut décision de rejet, sauf dans les cas où un régime de décision implicite d'acceptation est institué dans les conditions prévues à l'article 22 de cette même loi. En l'absence de disposition réglementaire ayant prévu que le silence gardé par l'administration sur une demande de prolongation d'activité d'un fonctionnaire valait décision implicite d'acceptation, le silence du recteur a fait naître une décision implicite de refus de la demande de MmeA..., à laquelle s'est ensuite substituée la décision attaquée du 10 mai 2013. Par suite, la requérante ne peut utilement soutenir qu'elle bénéficiait d'une décision implicite d'acceptation de sa demande de prolongation d'activité en application de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000.
7. En deuxième lieu, si Mme A...soutient que le recteur de l'académie de Nancy-Metz a commis une erreur de fait en considérant que le proviseur de son lycée d'affectation avait émis un avis défavorable à sa demande de prolongation, il ne ressort pas des pièces du dossier que le recteur se serait fondé sur un quelconque avis du proviseur. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier que postérieurement à un premier avis, le proviseur a émis un second avis le 19 avril 2013 dans lequel il s'est prononcé pour le maintien en activité de l'intéressée jusqu'à la fin de l'année scolaire 2012/2013. Par suite, le moyen doit être écarté.
8. En dernier lieu, aux termes de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984 : " Sous réserve des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. /La prolongation d'activité prévue à l'alinéa précédent ne peut avoir pour effet de maintenir le fonctionnaire concerné en activité au-delà de la durée des services liquidables prévue à l'article L. 13 du même code ni au-delà d'une durée de dix trimestres. /Cette prolongation d'activité est prise en compte au titre de la constitution et de la liquidation du droit à pension ". Il résulte de ces dispositions que le maintien en activité d'un fonctionnaire au-delà de la limite d'âge du corps auquel il appartient ne constitue pas un droit dès lors qu'il peut être refusé pour des motifs tirés de l'intérêt du service, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qui exerce sur ce point un contrôle restreint à l'erreur manifeste d'appréciation.
9. Pour contester la décision attaquée, Mme A...se prévaut de l'avis favorable du 11 juillet 2012 du proviseur de son établissement d'affectation ainsi que de ses notations et fait valoir qu'elle n'a jamais eu de remarques concernant la discipline dans ses classes. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment de sa notation pour l'année 2012/2013 et des avis émis par le proviseur de son établissement d'affectation, qu'elle éprouvait des difficultés à maintenir la discipline dans ses classes. D'ailleurs, l'avis initial du proviseur était subordonné à la condition qu'elle poursuive ses efforts concernant la discipline dans ses classes. En outre, il ressort d'un avis de l'inspection académique du 22 mai 2013, qui établit une situation de fait qui existait à la date de la décision en litige, que l'intéressée, en raison de difficultés, a bénéficié d'aménagements pédagogiques tout au long de ces dix dernières années d'enseignement. Mme A...n'apporte aucun élément probant pour contester cette appréciation. Dans ces conditions, en refusant de prolonger l'activité de l'intéressée au-delà de l'âge de soixante-cinq ans, le recteur de l'académie de Nancy-Metz n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
10. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'éducation nationale est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du recteur de l'académie de Nancy-Metz refusant à Mme A...la prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Le présent arrêt, qui rejette la demande de MmeA..., n'appelle aucune mesure d'exécution.
Sur les dépens :
12. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative dans sa rédaction issue du décret du 28 septembre 2011 : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts, ainsi que les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. / L'Etat peut être condamné aux dépens ".
13. Il y a lieu de laisser à la charge de MmeA..., partie perdante, la contribution pour l'aide juridique qu'elle a acquittée lors de l'introduction de sa demande devant le tribunal administratif de Strasbourg.
Sur les frais de justice :
14. En vertu de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. L'Etat n'étant pas la partie perdante, les conclusions présentées par Mme A...au titre des frais supportés pour les instances devant le tribunal et la cour doivent, dès lors, être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement no 1303632 du 9 novembre 2016 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Strasbourg par Mme A...et ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'éducation nationale.
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N° 16NC02866