Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 5 novembre 2015 par laquelle la directrice de l'institut de formation en soins infirmiers des Hôpitaux universitaires de Strasbourg a prononcé son exclusion définitive de la formation.
Par un jugement n° 1507106 du 1er mars 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 avril 2017, Mme C...D..., représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 1er mars 2017 ;
2°) d'annuler la décision de la directrice de l'institut de formation en soins infirmiers des Hôpitaux universitaires de Strasbourg du 5 novembre 2015 ;
3°) d'enjoindre aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg de la réintégrer au sein de l'institut de formation en soins infirmiers, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cinquante euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'il ne comporte pas la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier ;
- les droits de la défense ont été méconnus dès lors qu'elle a été privée du droit de prendre la parole en dernier ;
- le principe d'impartialité et le principe des droits de la défense ont été méconnus en raison de la participation de la directrice de l'institut de formation en soins infirmiers à la réunion du conseil pédagogique ;
- elle n'a pas eu communication de son dossier avant la réunion du conseil pédagogique, en méconnaissance des dispositions de l'article 10 de l'arrêté du 21 avril 2007 ;
- le conseil pédagogique n'a pas été saisi dans le délai prévu par les dispositions de l'article 11 de l'arrêté du 21 avril 2007 ;
- la décision attaquée est entachée d'erreurs de fait dès lors qu'il n'est pas établi qu'elle aurait commis des actes de nature à mettre en danger la vie des patients ;
- la mesure prise est disproportionnée.
Par un mémoire, enregistré le 15 décembre 2017, les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, représentés par MeB..., concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme D...d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 21 avril 2007 relatif aux conditions de fonctionnement des instituts de formation paramédicaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Haudier,
- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,
- et les observations de Me E...pour Mme D...et de Me A...pour les Hôpitaux universitaires de Strasbourg.
Considérant ce qui suit :
1. MmeD..., a intégré l'institut de formation en soins infirmiers (IFSI) des Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS) au mois de février 2012, en vue de la préparation du diplôme d'Etat d'infirmier. Par une décision du 5 novembre 2015 la directrice de l'IFSI a prononcé son exclusion définitive. Mme D...relève appel du jugement du 1er mars 2017 par lequel le tribunal administratif du Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été signé conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée à Mme D...ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Aux termes de l'article 11 de l'arrêté du 21 avril 2007 : " Lorsque l'étudiant a accompli des actes incompatibles avec la sécurité des personnes soignées, le directeur de l'institut de formation, en accord avec le responsable du lieu de stage, peut décider de la suspension du stage de l'étudiant, dans l'attente de l'examen de sa situation par le conseil pédagogique qui doit se réunir, au maximum, dans un délai de quinze jours à compter de la suspension. / Lorsque le conseil pédagogique se réunit, il examine la situation et propose une des possibilités suivantes : / - soit autoriser l'étudiant à poursuivre la scolarité au sein de l'institut ; dans ce cas, le conseil pédagogique peut alerter l'étudiant sur sa situation en lui fournissant des conseils pédagogiques pour y remédier ou proposer un complément de formation théorique et/ou pratique ;/ - soit soumettre l'étudiant à une épreuve théorique, soit le soumettre à une épreuve pratique complémentaire sous la responsabilité du tuteur, selon des modalités fixées par le conseil. A l'issue de cette épreuve, le directeur de l'institut décide de la poursuite de la formation ou de l'exclusion définitive de l'institut de formation ; / - soit exclure l'étudiant de l'institut de façon temporaire ou définitive (...) ".
5. En premier lieu, aux termes de l'article 10 de l'arrêté du 21 avril 2007 : " Le conseil pédagogique est notamment consulté pour avis sur : (...) 6. Les situations individuelles : (...) d) Etudiants ayant accompli des actes incompatibles avec la sécurité des personnes prises en charge ; (...) Pour les situations d'étudiants visées au 6, les membres du conseil reçoivent communication du dossier de l'étudiant, accompagné d'un rapport motivé du directeur, au moins quinze jours avant la réunion de ce conseil. Pour les situations visées aux c et d du 6, l'étudiant reçoit communication de son dossier dans les mêmes conditions que les membres du conseil. (...) ".
6. En l'espèce, il est expressément indiqué, dans le courrier daté du 13 octobre 2015 par lequel Mme D...a été convoquée à la séance du conseil pédagogique appelé à se prononcer sur son cas le 2 novembre 2015 et produit par l'intéressée elle-même, que son dossier était joint à ladite convocation. Si Mme D...conteste avoir été destinataire de ce dossier, elle se borne à soutenir que le rapport établi par la directrice de l'IFSI porte la date de la séance du conseil pédagogique et qu'il ne pouvait ainsi pas être joint au courrier du 13 octobre. Toutefois cette seule mention d'une date erronée ne permet pas de considérer qu'elle ne se serait pas vu effectivement communiquer son dossier. En tout état de cause, si ledit dossier avait été manquant dans le pli qui lui a été adressé, il lui appartenait de faire les diligences nécessaires afin obtenir communication de la pièce manquante.
7. En deuxième lieu, l'exclusion définitive de Mme D...a été prononcée en raison de l'insuffisance professionnelle de l'intéressée et ne revêt pas un caractère disciplinaire. Par suite, s'il est vrai que les principes généraux du droit disciplinaire impliquent que, lors d'une audience devant une juridiction disciplinaire, la personne poursuivie soit mise à même de prendre la parole en dernier, Mme D...ne peut se prévaloir d'un tel principe. Par ailleurs, si le principe général des droits de la défense implique que la personne concernée par une procédure de licenciement ou d'exclusion pour insuffisance professionnelle, après avoir été informée des insuffisances qui lui sont reprochées, soit mise à même de demander la communication de son dossier et ait la faculté de présenter ses observations, il ressort des mentions figurant au compte-rendu du conseil pédagogique du 2 novembre 2015, que Mme D..., régulièrement convoquée, a pu présenter ses observations notamment devant ledit conseil.
8. En troisième lieu, la circonstance que la directrice de l'IFSI, signataire de la décision litigieuse, a initié la procédure et rédigé le rapport adressé aux membres du conseil pédagogique ne faisait pas obstacle à ce qu'elle puisse régulièrement siéger lors de la séance dudit conseil, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle a, au cours de cette séance, manqué à l'impartialité requise ou manifesté une animosité particulière à l'égard de l'intéressée.
9. En quatrième lieu, il est constant que le stage que Mme D...a effectué dans le service d'hépato-gastro-entérologie du centre hospitalier de Hautepierre a été interrompu le 22 juin 2015, alors qu'il devait s'achever le 5 juillet 2015. Il est vrai que cette interruption du stage, prononcée en raison de l'insuffisance professionnelle de MmeD..., peut être regardée comme une suspension de ce stage au sens des dispositions précitées de l'article 11 de l'arrêté du 21 avril 2007. Toutefois, si le conseil pédagogique ne s'est réuni que le 2 novembre 2015, soit au-delà du délai de quinze jours fixé par ces dispositions, ledit délai n'est pas prescrit à peine de nullité. Par ailleurs et en tout état de cause, compte tenu de la date à laquelle devait s'achever son dernier stage et en l'absence de tout élément apporté par l'intéressée, le dépassement de ce délai ne peut être regardé comme ayant privé Mme D...d'une garantie ou comme ayant eu une influence sur le sens de la décision litigieuse.
10. En cinquième lieu, la décision litigieuse se fonde sur l'existence de difficultés de la part de Mme D...à comprendre et à analyser les situations réalisées, à mobiliser des connaissances théoriques, à mettre en oeuvre une surveillance d'un patient en lien avec la pathologie concernée, mais également sur une incapacité de la part de l'intéressée à appliquer un protocole en lien avec des thérapeutiques et une non-maîtrise des techniques de perfusions. Les difficultés rencontrées par Mme D...et les insuffisances qui lui sont reprochées dans sa pratique professionnelle sont attestées par les rapports établis lors de ses différents stages. Ainsi, si certains desdits rapports mettent en avant la bonne volonté de l'intéressée et ses qualités relationnelles ou notent une amélioration, tous soulignent des lacunes dans la pratique et dans les connaissances de l'intéressée. Notamment, le rapport du stage qu'elle a effectué du 22 avril au 29 juin 2014, dont se prévaut l'intéressée, précise qu' " il serait souhaitable que [MmeD...] approfondisse encore un peu ses connaissances théoriques pour les adapter à sa pratique quotidienne " et ne peut, contrairement à ce que soutient l'intéressée, être qualifié d'élogieux. De plus, il est constant que Mme D...n'a pas validé le stage réalisé du 1er septembre au 7 novembre 2014 dans un service de chirurgie générale et cardiovasculaire lors duquel des manquements précis et circonstanciés lui ont été reprochés. Si des progrès ont été constatés lors du stage qu'elle a réalisé en décembre 2014 et janvier 2015 en bloc opératoire, il est indiqué, dans les appréciations établies à l'issue de ce stage, que les prestations de l'intéressée ne correspondent pas aux exigences attendues à ce stade de la formation. Par ailleurs, elle n'a pas davantage donné satisfaction lors de son stage " de rattrapage " réalisé dans le service d'hépato-gastro-entérologie du centre hospitalier de Hautepierre et lors duquel lui ont notamment été reprochées une méconnaissance des pathologies communes du service, des erreurs dans la préparation des injections ou des perfusions ainsi qu'une mauvaise maîtrise du protocole de désinfection des mains. Ces manquements sont corroborés par plusieurs personnes du service qui ont signé ce dernier rapport. Si Mme D...conteste ces faits et invoque des insuffisances d'encadrement au cours de ses différents stages et une différence de traitement dont elle aurait fait l'objet en raison de ses fonctions antérieures d'aide-soignante, elle ne produit qu'une seule attestation, au demeurant peu circonstanciée, établie par une infirmière exerçant dans un des services au sein desquels elle a effectué un stage. Les autres attestations produites se bornent quant à elles à attester de ses compétences d'aide-soignante et portent sur des périodes postérieures à l'édiction de la décision litigieuse. Par suite et alors que les appréciations sur son comportement et ses aptitudes professionnelles émanent de plusieurs professionnels exerçant dans des services différents, les faits qui fondent la décision litigieuse peuvent être regardés comme matériellement établis. En outre, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la nature de ces faits, qui sont incompatibles avec la sécurité des personnes soignées, et à leur répétition, mais également aux résultats obtenus dans ses évaluations théoriques, la directrice de l'IFSI a pu légalement décider d'exclure définitivement Mme D...de la formation.
11. Il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par Mme D...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a, en outre, pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de MmeD..., la somme demandée par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg au même titre.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...D...et aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg.
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N° 17NC01006