Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'indivision composée de M. C...F..., de M. H...F..., de Mme A... G...et de Mme E...F...-I... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les refus de permis de construire des 24 février 2017 et 12 juillet 2017 que leur a opposés le maire de Montlebon.
Par un jugement n° 1700728 et 1701627 du 29 mars 2018, le tribunal administratif a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I - Par une requête et des mémoires enregistrés sous le n° 18NC01580 le 28 mai 2018 et le 16 avril 2019, l'indivision composée de M. C...F..., M. H...F..., Mme A...G...et Mme E...F...-I..., représentés par MeB..., demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon ;
2°) d'annuler les refus de permis de construire contestés ;
3°) d'enjoindre à la commune de Montlebon de reprendre l'examen de leur demande de permis de construire ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Montlebon une somme globale de 3 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le refus de permis de construire du 24 février 2017 est insuffisamment motivé ;
- ce refus est fondé sur un motif illégal dès lors que le dossier de demande indiquait que ce bâtiment est un refuge destiné à l'accueil du public et non à un usage privatif ;
- l'administration n'a pas caractérisé l'existence d'une fraude et s'est uniquement fondée sur l'usage de l'immeuble et non sur les indications du dossier de demande de permis de construire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 septembre 2018, la commune de Montlebon, représenté par la SCP Chaton-Grillon-Brocard-Gire, conclut :
- au rejet de la requête ;
- à ce que soit mise à la charge de l'indivision F...une somme de 2 500 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté est suffisamment motivé ;
- il n'est pas entaché d'erreur d'appréciation.
Par une ordonnance du 1er avril 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 16 avril 2019.
Un mémoire produit pour l'indivision F...le 9 mai 2019 n'a pas été communiqué.
II - Par une requête enregistrée sous le n° 18NC01614 le 29 mai 2018, l'indivision composée de M. C...F..., M. H...F..., Mme A...G...et Mme E... F...-I..., représentés par MeB..., demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon ;
2°) d'annuler le refus de permis de construire contesté ;
3°) d'enjoindre à la commune de Montlebon de reprendre l'examen de leur demande de permis de construire ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Montlebon une somme globale de 3 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le refus de permis de construire du 12 juillet 2017 n'est pas régulièrement signé ;
- ce refus est fondé sur un motif illégal dès lors qu'ils justifient que leur chalet sera ouvert au public et qu'il n'est pas destiné à un usage privatif de loisirs ou à constituer une résidence secondaire ;
- leur bâtiment constitue un équipement sportif liés à la pratique du ski pour l'application de l'article L. 122-11 du code de l'urbanisme.
Par une ordonnance du 19 septembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 18 octobre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stefanski, présidente,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., pour l'indivision composée de M. C... F..., de M. H...F..., de Mme A...G...et de Mme E...F...-I..., ainsi que celles de MeD..., pour la commune de Montlebon.
Considérant ce qui suit :
1. En novembre 2013, le maire de Montlebon a constaté que l'indivision composée de M. C...F..., de M. H...F..., de Mme A...G...et de Mme E... F...-I... avait construit sans autorisation un chalet sur les parcelles cadastrées G n° 47 et 375 située au lieu-dit La Saule. Les membres de l'indivision ont alors présenté trois demandes de permis de construire tendant à la régularisation de la construction, qui ont toutes fait l'objet de refus de la part du maire de la commune. L'indivision F...interjette appel du jugement du 29 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes dirigées, l'une contre un refus de permis de construire du 24 février 2017 et l'autre contre un refus du 12 juillet 2017.
2. Les requêtes susvisées de l'indivision F...sont présentées contre un même jugement relatifs à deux permis de construire concernant un même bâtiment et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur le refus de permis de construire du 24 février 2017 :
3. Aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique (...) ".
4. Le règlement du plan d'occupation des sols alors en vigueur de la commune de Montlebon prévoit que " (...) La zone ND correspond essentiellement aux espaces de Montlebon qui sont des lieux sensibles devant être protégés ". Parmi les occupations et utilisation du sol admises, l'article ND 1 de ce règlement mentionne : " 1- La création de refuges liés à la pratique du ski de fond, sous réserve que la surface de plancher ne dépasse 150 m2 et que le bâtiment ne comporte qu'un seul niveau. ".
5. En second lieu, un permis de construire n'a d'autre objet que d'autoriser la construction d'immeubles conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire. La circonstance que ces plans et indications pourraient ne pas être respectés ou que ces immeubles risqueraient d'être ultérieurement transformés ou affectés à un usage non conforme aux documents et aux règles générales d'urbanisme n'est pas, par elle-même, sauf le cas d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de la délivrance du permis, de nature à affecter la légalité de celui-ci. Enfin, si postérieurement à la délivrance du permis de construire, l'administration a connaissance de nouveaux éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de sa décision, elle peut légalement procéder à son retrait sans condition de délai.
6. D'une part, pour rejeter la demande de permis de construire présentée le 30 août 2016 par l'indivisionF..., le maire de Montlebon s'est fondé sur ce que "la construction déjà réalisée, présentée dans son usage comme un refuge lié à la pratique du ski de fond dans l'intention de régulariser une situation d'infraction, est affectée dans les faits depuis son édification à un usage privatif de loisir, et n'est pas en libre accès pour les usagers et skieurs" et qu'elle ne faisait dès lors pas partie des catégories de constructions limitativement admises par l'article ND 1 du règlement du plan d'occupation des sols.
7. Si les consorts F...ne nient pas que le chalet qu'ils avaient construit était à l'origine destiné à leur usage personnel, la demande de permis de construire est présentée pour un chalet servant de refuge pour des skieurs de fond, un document joint au titre de la législation des établissements recevant du public mentionnant un changement de destination après réalisation des travaux. La demande prévoit, en plus de la régularisation de la construction effectuée en 2013, la création d'une rampe d'accès au chalet et d'une rampe d'accès au terrain destinées aux personnes handicapées, ainsi que la création de toilettes spécialement aménagées. Les commissions compétentes en matière d'établissement recevant du public, le service départemental d'incendie et de secours et la commission d'accessibilité ont été saisis du projet. La notice descriptive indique que l'accès au chalet sera libre 24 heures sur 24 pour les usagers et skieurs et que le bâtiment est actuellement fermé à clef en attendant la régularisation de sa construction et la mise aux normes pour l'accessibilité. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le chalet, tel qu'il a été construit en 2013, ne serait pas compatible avec une utilisation comme refuge pour skieurs de fond. Par suite, alors même que la demande de permis de construire a pour objet la régularisation d'une construction édifiée sans autorisation, il n'est pas établi que la demande de régularisation a été déposée dans une intention frauduleuse dans le seul but de continuer à faire du chalet un usage privatif. C'est, dès lors, à tort que le maire de Montlebon s'est fondé sur la fraude, qui n'est pas établie, pour refuser le permis de construire demandé.
8. D'autre part, le chalet à usage de refuge lié à la pratique du ski de fond, a une surface de 20, 39 m² et ne comporte qu'un niveau. Il entre ainsi dans le champ des constructions autorisées par l'article ND 1 du règlement du plan d'occupation des sols alors en vigueur de la commune.
9. Par suite, c'est à tort que, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande n° 1700728 de l'indivision F...tendant à l'annulation du refus de permis de construire du 24 février 2017, délivré au nom de la commune en raison de l'existence d'un plan d'occupation des sols.
Sur le refus de permis de construire du 12 juillet 2017 :
10. D'une part, aux termes de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. (...) ".
11. Si le refus de permis de construire contesté comporte seulement la mention "le maire" et sa signature sur le tampon de la mairie de Montlebon et non le prénom et le nom de l'auteur de l'acte, ces mentions suffisaient à identifier le maire de la commune comme étant l'autorité signataire de cette décision, qui n'était d'ailleurs pas la première opposée par le maire aux consortsF....applicables à la demande, interdisent de l'accueillir pour un motif que l'administration n'a pas relevé, ou que, par suite d'un changement de circonstances, la situation de fait existant à la date du jugement y fait obstacle Par suite, la méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, revêtu un caractère substantiel pouvant justifier l'annulation de la décision contestée.
12. D'autre part, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire (...) est : / a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu. (...) Lorsque le transfert de compétence à la commune est intervenu, il est définitif (...). ". Aux termes de L. 422-5 du même code : " Lorsque le maire (...) est compétent, il recueille l'avis conforme du préfet si le projet est situé : / a) Sur une partie du territoire communal non couverte par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu (...). ".
13. Il est constant que le plan d'occupation des sols de la commune de Montlebon est devenu caduc le 27 mars 2017 en application de la loi dite ALUR. Ainsi la décision du maire prise au nom de la commune était soumise à avis conforme du préfet qui a été en l'espèce défavorable.
14. Aux termes de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme : " L'urbanisation est réalisée en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes, ainsi que de la construction d'annexes, de taille limitée, à ces constructions, et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées ". Aux termes de l'article L. 122-10 du même code : " Les terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières, en particulier les terres qui se situent dans les fonds de vallée, sont préservées. (...) ". Aux termes de l'article L. 122-11 du même code : " Peuvent être autorisés dans les espaces définis à l'article L. 122-10 : (...) 2° Les équipements sportifs liés notamment à la pratique du ski et de la randonnée ; (...) ".
15. En premier lieu, les membres de l'indivision F...ne peuvent utilement soutenir que leur chalet est destiné à l'accueil des skieurs de fond et non à leur usage personnel, dès lors que les dispositions législatives applicables à la date de délivrance du refus de permis de construire contesté ne faisaient pas mention d'une telle distinction. La décision contestée, qui retenait que la demande de permis de construire portait sur une construction à usage de chalet servant de refuge pour la pratique du ski de fond, n'était d'ailleurs pas fondée sur un motif tiré de l'usage privé du chalet.
16. En second lieu, si les requérants font valoir que leur chalet constitue un équipement sportif lié à la pratique du ski de fond au sens de l'article L. 122-11 du code de l'urbanisme, il ne ressort pas des pièces du dossier que le chalet, qui est seulement présenté comme un bâtiment destiné à accueillir des skieurs ou des randonneurs, ait la nature d'un équipement sportif lié à la pratique du ski même s'il peut présenter une utilité pour des skieurs.
17. Par suite, les moyens invoqués par les appelants ne peuvent être accueillis. En outre, il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que le chalet des consorts F...n'est pas réalisé en continuité du bourg ou même d'un hameau et n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme, ainsi que l'a relevé le refus de permis de construire contesté, ce seul motif suffisant à justifier la décision prise.
18. Il résulte de ce qui précède que l'indivision F...est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leur demande tendant à l'annulation du refus de permis de construire du 24 février 2017.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
19. Lorsque le juge annule un refus d'autorisation ou une opposition à une déclaration après avoir censuré l'ensemble des motifs que l'autorité compétente a énoncés dans sa décision conformément aux prescriptions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme ainsi que, le cas échéant, les motifs qu'elle a pu invoquer en cours d'instance, il doit, s'il est saisi de conclusions à fin d'injonction, ordonner à l'autorité compétente de délivrer l'autorisation ou de prendre une décision de non-opposition. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction soit que les dispositions en vigueur à la date de la décision annulée, qui eu égard aux dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme demeurent....applicables à la demande, interdisent de l'accueillir pour un motif que l'administration n'a pas relevé, ou que, par suite d'un changement de circonstances, la situation de fait existant à la date du jugement y fait obstacle
20. En raison de l'annulation prononcée par la cour et alors qu'aucun des motifs énoncés par le maire de Montlebon dans le refus de permis de construire du 24 février 2017 ni en cours d'instance ne sont de nature à justifier ce refus et qu'il ne résulte pas de l'instruction que les dispositions en vigueur à la date de cette décision en interdisaient la délivrance ou qu'un changement dans les circonstances de fait fasse obstacle à sa délivrance, il y a lieu d'enjoindre à la commune de délivrer le permis de construire sollicité par l'indivision F...dans sa demande présentée le 26 janvier 2016 dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
21. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'indivisionF..., qui n'est pas pour l'essentiel la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la commune de Montlebon au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
22. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions de mettre à la charge de la commune de Montlebon, une somme de 1 500 euros à verser à l'indivision F...au titre des mêmes frais.
D E C I D E :
Article 1er : La décision de refus de permis de construire du 24 février 2017 du maire de Montlebon est annulée.
Article 2 : Le jugement attaqué du tribunal administratif de Besançon est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : La commune de Montlebon versera à l'indivision F...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Il est enjoint à la commune de Montlebon de délivrer à l'indivision F...le permis de construire sollicité dans sa demande présentée le 26 janvier 2016 dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 5 : Le surplus des conclusions de l'indivision F...et les conclusions de la commune de Montlebon tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...F..., M. H...F..., me A... G...et Mme E...F...-I... et à la commune de Montlebon.
Copie en sera adressée au préfet du Doubs.
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N°18NC01580 et 18NC01614