Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C...A...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010, ainsi que des majorations correspondantes.
Par un jugement n° 1501899 du 15 mars 2017, le tribunal administratif de Strasbourg les a déchargés de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 mai 2017, le ministre de l'économie et des finances demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 mars 2017 ;
2°) de rétablir l'imposition dont le tribunal a prononcé la décharge.
Il soutient que la condition tenant à l'engagement de location n'a pas été respectée dès lors que la mise en location des logements de la SCI Seaview 4 n'est intervenue que le 15 février 2010, soit plusieurs mois après la date de leur achèvement le 15 juin 2009. Par conséquent, les conditions légales propres aux souscripteurs de parts prévues par les dispositions du 2.c de l'article 199 undecies A du code général des impôts n'ont pas été respectées.
Par un mémoire enregistré le 17 juillet 2017, M. et MmeA..., représentés par la Me B..., concluent au rejet de la requête et demandent à la cour de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- en application des articles L. 169 et L. 189 du livre des procédures fiscales, le délai de reprise dont disposait l'administration est arrivé à expiration le 31 décembre 2012 pour la SCI Seaview 4 ; aucun acte interruptif de prescription n'est intervenu avant la notification de rectification du 4 mars 2013 et qu'ainsi la notification de la proposition de rectification est intervenue hors délai ;
- les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ont été méconnues en tant qu'ils n'ont pas été informés de la teneur et de l'origine des renseignements obtenus par l'administration fiscale ;
- en l'absence des textes annoncés par l'article L. 45 F du livre des procédures fiscales qui encadre le contrôle des investissements effectués sur le fondement de l'article 199 undecies A du code général des impôts, l'administration ne pouvait engager une procédure à l'encontre de M. et Mme A...en s'adressant directement à eux ;
- le principe de sécurité juridique s'impose à l'administration ; le ministre s'étant désisté dans un dossier complémentaire, l'administration ne peut valablement remettre en cause le bien-fondé de la réduction d'impôt suite à sa renonciation sur un cas identique ;
- l'article 199 undecies A 2.b du code général des impôts concerne exclusivement les immeubles acquis ou construits par les contribuables personnes physiques ; les obligations incombant aux souscripteurs d'actions ou de parts de société dont l'objet est exclusivement de construire des logements neufs consistent seulement en un engagement de conservation des parts pendant au moins cinq ans à compter de la date d'achèvement des immeubles ; l'administration ajoute une condition supplémentaire que l'article 199 undecies A ne prévoit pas ;
- l'instruction BOI 5B-1-06 du 9 janvier 2006 ne prévoit pas de sanction ni de délai minimum concernant l'obligation de location des logements construits par la SCI dont le non-respect serait sanctionné par la reprise de la réduction d'impôt pratiquée.
Par un mémoire enregistré le 17 août 2017, le ministre de l'action et des comptes publics fait valoir que les dispositions des articles L. 45 F et L. 76 B du livre des procédures fiscales n'ont pas été méconnues, et que la reprise de la réduction d'impôt dont ont bénéficié M. et Mme A...au titre de l'année 2010 est intervenue dans le délai prévu par les dispositions de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales.
M. et MmeA..., représentés par MeB..., ont produit un mémoire enregistré le 11 février 2019 qui, faute de comporter d'élément nouveau, n'a pas été communiqué.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Martinez,
- les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant M. et MmeA....
Considérant ce qui suit :
1. M. et MmeA..., souscripteurs de parts au sein de la SCI Seaview 4, ont imputé sur le montant de leur impôt sur le revenu au titre des années 2006 à 2010, sur le fondement des dispositions de l'article 199 undecies A du code général des impôts, une réduction d'impôt résultant d'investissements réalisés dans les départements d'Outre-mer par ladite société et consistant en l'acquisition de parcelles nues pour la construction d'ensembles immobiliers destinés à être loués. Cette réduction d'impôt a été remise en cause par l'administration fiscale au titre de l'année 2010 au motif que les logements construits par la SCI avaient été donnés en location après l'expiration d'un délai de six mois suivant leur achèvement. M. et Mme A...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de cette année. Par un jugement rendu le 15 mars 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a fait droit à leur demande. Le ministre de l'économie et des finances relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. Aux termes de l'article 199 undecies A du code général des impôts : " 1. Il est institué une réduction d'impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B qui investissent dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis et Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises, entre la date de promulgation de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer et le 31 décembre 2017. 2. La réduction d'impôt s'applique : (...) b) Au prix de revient de l'acquisition ou de la construction régulièrement autorisée par un permis de construire d'un immeuble neuf situé dans les départements ou collectivités visés au 1, que le propriétaire prend l'engagement de louer nu dans les six mois de l'achèvement ou de l'acquisition si elle est postérieure pendant cinq ans au moins à des personnes, autres que son conjoint ou un membre de son foyer fiscal, qui en font leur habitation principale ; c) Au prix de souscription de parts ou actions de sociétés dont l'objet réel est exclusivement de construire des logements neufs situés dans les départements ou collectivités visés au 1 et qu'elles donnent en location nue pendant cinq ans au moins à compter de leur achèvement à des personnes, autres que les associés de la société, leur conjoint ou les membres de leur foyer fiscal, qui en font leur habitation principale. Ces sociétés doivent s'engager à achever les fondations des immeubles dans les deux ans qui suivent la clôture de chaque souscription annuelle. Les souscripteurs doivent s'engager à conserver les parts ou actions pendant cinq ans au moins à compter de la date d'achèvement des immeubles ; (...) 7. En cas de non-respect des engagements mentionnés aux 2 (...) la réduction d'impôt pratiquée fait l'objet d'une reprise au titre de l'année où interviennent les événements précités ".
3. Il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification adressée aux contribuables, que pour prononcer la reprise de la réduction d'impôt dont ceux-ci ont bénéficié au titre de l'année 2010, l'administration fiscale s'est fondée sur le motif tiré de ce que les logements construits par la SCI avaient été donnés en location seulement après l'expiration d'un délai de six mois suivant leur achèvement et que, ce faisant, l'engagement de location n'avait pas été respecté. Toutefois, il ressort des dispositions précitées de l'article 199 undecies A du code général des impôts, que la condition tenant à l'engagement de location dans un délai de six mois à compter de l'achèvement des immeubles s'applique uniquement aux investissements réalisés par les contribuables sous forme de construction ou d'acquisition de logements et visés au b) du 2 de l'article 199 undecies A précité à l'exclusion des investissements réalisés par les contribuables sous forme de souscription de parts ou d'actions dans des sociétés dont l'objet est de construire des logements qu'elles donnent en location et visés au c) du 2 de l'article 199 undecies A. Il s'ensuit qu'en prononçant la reprise de la réduction d'impôt dont ont bénéficié les contribuables au motif tiré du non-respect de l'engagement de louer dans un délai de six mois à compter de l'achèvement de la construction des immeubles en cause, l'administration a ajouté une condition qui n'est pas prévue par la loi fiscale. Si le ministre soutient en appel que le bénéfice de la réduction d'impôt prévue par les dispositions du c) du 2 de l'article 199 undecies A est subordonné à la condition que les logements construits par les sociétés bénéficiaires des souscriptions soient donnés en location à compter de leur achèvement, le texte ne saurait pas davantage être interprété comme imposant aux sociétés bénéficiaires de louer les logements dès le jour de l'achèvement de leur construction. Le ministre ne conteste pas que les souscripteurs et la société bénéficiaire des souscriptions ont respecté les engagements fixés par la loi tels qu'ils leur sont applicables en vertu du c) du 2 de l'article 199 undecies A, à savoir pour les premiers, l'obligation de s'engager à conserver les parts pendant au moins cinq ans à compter de la date d'achèvement des immeubles, et pour la société, l'engagement à achever les fondations des immeubles dans les deux ans qui suivent la clôture de chaque souscription annuelle et à donner en location nue pendant cinq ans au moins à compter de l'achèvement de la construction à des personnes qui en font leur habitation principale. Il suit de là, comme l'a jugé le tribunal, que c'est à tort que le service a procédé à la reprise de la réduction d'impôt au motif que la condition tenant à l'engagement de location des biens n'était pas satisfaite.
4. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie et des finances n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. et Mme A...ont été assujettis au titre de l'année 2010.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête du ministre de l'économie et des finances est rejetée.
Article 2 : L'État versera à M. et Mme A...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à M. et Mme C...A....
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N° 17NC01053