Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... F... et Mme C... F... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 13 décembre 2017 par lesquels le préfet du Bas-Rhin a refusé de leur délivrer des titres de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1800874, 1800875 du 9 mai 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 novembre 2018, et un mémoire complémentaire enregistré le 30 juillet 2019, M. et Mme F..., représentés par Me D..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler ces arrêtés ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
- l'auteur de la décision était incompétent pour l'édicter ;
- le préfet du Bas-Rhin n'établit pas que le médecin ayant rédigé le rapport médical prévu par l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas siégé au sein du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne s'est pas prononcé sur le point de savoir si M. F... pouvait accéder à un traitement dans son pays d'origine ;
- la décision contestée est contraire aux stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord du 27 décembre 1968 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, modifié ;
- la décision contestée est contraire aux stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord précité et à celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2019, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
M. et Mme F... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Nancy du 27 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord du 27 décembre 1968 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme F..., ressortissants algériens nés respectivement les 1er décembre 1970 et 15 juin 1986, sont entrés irrégulièrement en France les 2 septembre 2014 et 2 octobre 2015. M. F... s'est vu délivrer un certificat de résidence pour raisons médicales, valable du 29 janvier 2016 au 28 janvier 2017. Son épouse a été titulaire d'une autorisation provisoire de séjour plusieurs fois renouvelée. Le requérant a demandé le 25 janvier 2017 le renouvellement de son titre de séjour. Par arrêtés du 13 décembre 2017, le préfet du Bas-Rhin a refusé de délivrer des titres de séjour à M. et Mme F..., leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Les requérants relèvent appel du jugement du 9 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.
Sur le moyen commun aux deux arrêtés :
2. Par un arrêté du 18 octobre 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 20 octobre 2017, le préfet du Bas-Rhin a donné à Mme Nadia Idiri, secrétaire générale adjointe, délégation pour signer, en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général tous arrêtés et décisions, à l'exclusion de certains actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions prises en matière de droit des étrangers. Il n'est ni établi ni même allégué que le secrétaire général de la préfecture n'aurait pas été empêché ou absent le jour de la signature de la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire des arrêtés en litige doit être écarté.
Sur les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
En ce qui concerne l'état de santé de M. F... :
3. Aux termes de l'article 6 de l'accord du 27 décembre 1968 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux demandes de certificat de résidence formées par les ressortissants algériens sur le fondement des stipulations précitées : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22 (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure (...) ".
4. S'il ne résulte d'aucune de ces dispositions, non plus que d'aucun principe, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devrait comporter la mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical, prévu par l'article R. 313-22, qui est transmis au collège de médecins, en revanche ces dispositions prévoient que le médecin rapporteur ne siège pas au sein de ce collège. Lorsque l'avis prévu par les dispositions ci-dessus reproduites comporte les mentions requises par l'arrêté du 27 décembre 2016 et a été signé par les trois médecins composant le collège, il fait foi jusqu'à preuve du contraire et, par suite, il appartient à celui qui entend contester la régularité de la procédure d'établir que le médecin rapporteur aurait siégé au sein du collège lorsque celui-ci s'est prononcé. Il ressort à cet égard des pièces du dossier que le préfet du Bas-Rhin s'est fondé, pour prendre la décision de refus de titre de séjour contestée, sur l'avis rendu par le collège de médecins de l'OFII le 14 septembre 2017, lequel comporte l'ensemble des mentions prévues par les dispositions précitées de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016. Par ailleurs, si cet avis ne mentionne pas le nom du médecin de cet office qui a établi le rapport médical au vu duquel l'avis du collège a été émis, il ressort en tout état de cause des pièces versées au débat par le préfet du Bas-Rhin que le rapport médical visé à l'article R. 313-22 précité a été établi par le docteur Ortega, lequel ne fait pas partie du collège de médecins ayant rendu l'avis sur la situation du requérant. Les requérants n'apportent de leur côté aucun élément permettant de penser que le docteur Ortega aurait siégé avec ses confrères du collège lorsque celui-ci a examiné son dossier. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure manque en fait et doit être écarté de ce chef.
5. Dès lors que le collège des médecins avait estimé que le défaut de prise en charge médicale de M. F... ne devait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité il n'avait pas à se prononcer sur la disponibilité du traitement en Algérie. Par suite, le moyen invoqué de ce chef ne peut qu'être écarté.
6. Les certificats médicaux que M. F... produit, et qui avaient été déjà soumis aux premiers juges, se bornent à décrire les pathologies dont l'intéressé est atteint et ne se prononcent nullement sur les conséquences que pourraient entraîner l'interruption de son traitement médicamenteux. Dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges, par des motifs qu'il y a lieu d'adopter, ont estimé que ces pièces n'étaient pas de nature à établir que l'avis du collège des médecins, que le préfet du Bas-Rhin a repris à son compte, selon lequel l'arrêt du traitement n'était pas de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, serait erroné.
En ce qui concerne la vie privée et familiale des requérants :
7. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 5. au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. ".
8. Si les requérants se prévalent de la naissance de leurs deux enfants en France en 2016 et 2017, de la présence en France d'un frère de M. F... et du contrat de travail d'une durée d'un an de ce dernier, de février 2017 à février 2018, il ressort des pièces du dossier que leur entrée en France est récente, que leurs enfants en bas âge ne sont pas scolarisés, que les intéressés n'établissent pas être isolés dans leur pays d'origine où ils ont vécu respectivement jusqu'aux âges de 44 et 29 ans. La situation professionnelle de M. F... demeure précaire, celui-ci ayant bénéficié d'un contrat unique d'insertion tandis que Mme F... ne fait valoir aucun élément particulier la concernant en propre. Les requérants ne démontrent pas ainsi la réalité, la stabilité et l'intensité des liens privés et familiaux qu'ils entretiendraient en France. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des articles 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour ayant été écartés, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté par voie de conséquence.
10. En second lieu, les requérants soutiennent sans apporter d'éléments particuliers que les décisions les obligeant à quitter le territoire français sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation. Par suite, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, le moyen doit être écarté.
Sur la fixation du pays de renvoi :
11. Les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour ayant été écartés, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté par voie de conséquence.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme F... ne sont pas fondés à demander l'annulation du jugement du 9 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande ainsi que celle des arrêtés du 13 décembre 2017 par lesquels le préfet du Bas-Rhin leur a refusé la délivrance d'un certificat de résidence et leur a fait obligation de quitter le territoire. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles relatives aux frais liés à l'instance ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... F..., à Mme C... F... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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N° 18NC02946