Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 21 mars 2018 par lequel le préfet de la Marne lui a refusé le bénéfice d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1800873 du 17 juillet 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 31 août 2018, M. B..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 17 juillet 2018 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de la Marne du 21 mars 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- il méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2018, le préfet de la Marne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience du 24 octobre 2019.
Le rapport de M. Dietenhoeffer, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., né le 21 décembre 1987, de nationalité sénégalaise, est entré en France en novembre 2011, selon ses déclarations. A la suite de la naissance de sa fille, prénommée Ilaya, le 20 juin 2016, M. B... a obtenu la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de parent d'enfant français valable du 20 décembre 2016 au 19 décembre 2017. Le 27 décembre 2017, M. B... a sollicité le renouvellement de ce titre. Par l'arrêté du 21 mars 2018, le préfet de la Marne a refusé de faire droit à cette demande, a fait obligation à M. B... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination. Par le jugement attaqué du 17 juillet 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ". Aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. (...) ".
3. D'une part, s'il ressort des pièces du dossier que M. B... a effectué des missions d'intérim à temps partiel aux mois d'août et de septembre 2017, il ne justifie toutefois que d'un unique transfert de fonds antérieur à la décision contestée, le 30 mars 2018, pour un montant de 150 euros. En outre, il ressort des déclarations de la mère de sa fille qu'il a été hébergé chez celle-ci à titre gratuit. Par suite, nonobstant la modicité de ses revenus, M. B... ne démontre pas contribuer effectivement à l'entretien de sa fille.
4. D'autre part, à l'appui de ses conclusions aux fins d'annulation de la décision de refus de titre de séjour, M. B... produit sept photographies non datées le présentant en compagnie de sa fille, un certificat d'un médecin généraliste en date du 3 avril 2018 attestant que le demandeur a, à quatre reprises, accompagné sa fille en consultation ainsi que le contrat d'accueil conclu entre une crèche, d'une part, et M. B... et la mère de sa fille, d'autre part. Ces seuls éléments ne démontrent toutefois pas que M. B... participe à l'éducation de sa fille alors qu'il ressort du procès-verbal d'audition de la mère d'Ilaya que tel n'est pas le cas et que l'enquête de domiciliation a indiqué qu'il est le plus souvent absent du domicile. Il est en particulier constant que M. B... s'est rendu seul au Sénégal à trois reprises depuis la naissance de sa fille, pour une période totale de plus de quatre mois entre les mois d'août 2016 et novembre 2017. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'établit pas remplir les conditions énoncées par les dispositions citées au point 2 ci-dessus pour obtenir un titre de séjour en qualité de parent d'un enfant français.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. S'il ressort des pièces du dossier que le père de M. B..., son frère et trois de ses soeurs résident régulièrement en France, la seule production de leurs pièces d'identité, titres de séjours et extraits d'état civil les concernant, ne suffit pas à établir la nature et l'intensité des liens qu'il entretient avec eux. En outre, ainsi qu'il a été relevé aux points 3 et 4 du présent jugement, M. B... ne démontre pas participer à l'entretien et l'éducation de sa fille, alors qu'il ne se prévaut par ailleurs d'aucune relation avec la mère de l'enfant. M. B..., qui est entré en France à l'âge de vingt-quatre ans, ne fait état d'aucun autre élément de nature à démontrer son insertion dans la société française. Enfin, il ressort des déclarations de M. B... qu'il est le père d'un enfant demeuré au Sénégal. Compte tenu de ces éléments et de l'irrégularité du séjour de l'intéressé en France entre 2011 et décembre 2016, le préfet de la Marne n'a pas méconnu les stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en lui refusant le bénéfice d'un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français.
7. En troisième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
8. Comme il a été dit aux points 3 et 4, M. B... ne démontre pas subvenir aux besoins de sa fille Ilaya ni participer effectivement à son éducation. Dans ces conditions, rien ne s'oppose à ce que cet enfant demeure en France avec sa mère, de nationalité française. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit, par suite, être écarté.
9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 mars 2018 par lequel le préfet de la Marne lui a refusé le bénéfice d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
10. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ". Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. B... n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
11. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement des sommes que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Marne.
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N° 18NC02376