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15/10/2020 | FRANCE | N°18NC03393

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 15 octobre 2020, 18NC03393


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel la présidente du département du Doubs a refusé de le titulariser à l'issue de son stage.

Par un jugement n° 1701910 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 18 décembre 2018, 5 juillet 2019 et 9 juillet 2020, M. D... E..., représenté par Me C..., demande

à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel la présidente du département du Doubs a refusé de le titulariser à l'issue de son stage.

Par un jugement n° 1701910 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 18 décembre 2018, 5 juillet 2019 et 9 juillet 2020, M. D... E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel la présidente du département du Doubs a refusé de le titulariser à l'issue de son stage ;

2°) d'annuler cet arrêté du 11 septembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au département du Doubs de le titulariser à compter du 18 septembre 2017 et de procéder à la reconstitution de sa carrière sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du département du Doubs une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'est pas démontré que le signataire de l'acte disposait d'une délégation de signature régulière ;

- la décision est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 mai 2019 et 9 septembre 2020, le département du Doubs conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. E... une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 2007-913 du 15 mai 2007 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Haudier, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant M. E....

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de sa réussite au concours d'adjoint technique territorial principal de 2ème classe des établissements d'enseignement dans la spécialité restauration, M. E... a été affecté en qualité de stagiaire à la direction de l'éducation et du patrimoine au collège Mont Miroir de Maiche (25) aux fonctions de responsable de cuisine. Par arrêté du 11 septembre 2017, la présidente du département du Doubs a refusé de le titulariser à l'issue de son stage. M. E... relève appel du jugement du 18 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 11 septembre 2017.

2. En premier lieu, l'arrêté contesté du 11 septembre 2017 est signé par M. B..., directeur général des services du conseil départemental du Doubs, qui par arrêté de la présidente du département du Doubs n°33816 du 9 mai 2017, bénéficie d'une délégation de signature afin de signer " l'ensemble des (...) décisions liés à la gestion de l'ensemble des agents titulaires et contractuels de la collectivité notamment (...) l'ensemble des décisions liées aux fins de fonction des agents quelle qu'en soit la cause ". Cet arrêté du 9 mai 2017 a été reçu par le représentant de l'Etat dans le département conformément à l'article L. 3131-1 du code général des collectivités territoriales, comme en atteste l'accusé réception produit en défense. Par ailleurs, en application de l'article L. 3131-3 du code général des collectivités territoriales, cette délégation de signature a été régulièrement publiée dans le bulletin des actes du département n°4 d'avril 2017, qui est mis à disposition du public à l'hôtel du département et sur le site internet du conseil départemental. Par suite, l'arrêté du 9 mai 2017 était exécutoire à la date de la décision attaquée. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait et doit être écarté.

3. En second lieu, aux termes de l'article 4 du décret n°92-1194 du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale : " La durée normale du stage et les conditions dans lesquelles elle peut éventuellement être prorogée sont fixées par les statuts particuliers des cadres d'emplois. / Sous réserve de dispositions contraires prévues par ces statuts et de celles résultant des articles 7 et 9 du présent décret, la durée normale du stage est fixée à un an. ". Aux termes de l'article 3 du décret n°2007-913 du 15 mai 2007 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement : " Les adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement appartiennent à la communauté éducative. / Ils sont chargés des tâches nécessaires au fonctionnement des services matériels des établissements d'enseignement, principalement dans les domaines de l'accueil, de l'entretien des espaces verts, de l'hébergement, de l'hygiène, de la maintenance mobilière et immobilière, de la restauration et des transports. (...) ". Aux termes de l'article 11 du même décret : " A l'issue du stage, les stagiaires dont les services ont donné satisfaction sont titularisés par décision de l'autorité territoriale investie du pouvoir de nomination au vu notamment d'une attestation de suivi de la formation d'intégration établie par le Centre national de la fonction publique territoriale. / Les autres stagiaires peuvent, sur décision de l'autorité territoriale, être autorisés à effectuer un stage complémentaire d'une durée maximale d'un an. Si le stage complémentaire a été jugé satisfaisant, les intéressés sont titularisés. / Les adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement stagiaires et les adjoints techniques territoriaux principaux de 2e classe des établissements d'enseignement stagiaires qui n'ont pas été autorisés à effectuer un stage complémentaire, ou dont le stage complémentaire n'a pas été jugé satisfaisant, sont soit licenciés s'ils n'avaient pas auparavant la qualité de fonctionnaire, soit réintégrés dans leur grade d'origine. ".

4. D'une part, alors même que la décision de ne pas titulariser un agent est prise en considération de sa personne, cette décision n'est pas, sauf à revêtir le caractère d'une mesure disciplinaire, au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de faire valoir ses observations ou de prendre connaissance de son dossier.

5. A supposer que le requérant conteste la régularité de la décision portant refus de titularisation en soutenant qu'il n'a pas reçu communication de l'avis du principal et de la gestionnaire du collège du 12 juin 2017 et n'en a eu connaissance qu'après consultation de son dossier individuel par la personne qu'il a mandatée, ce moyen est inopérant au regard de ce qui a été dit au point 4.

6. D'autre part, un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire. La décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne. L'autorité compétente ne peut donc prendre légalement une décision de refus de titularisation, qui n'est soumise qu'aux formes et procédures expressément prévues par les lois et règlements, que si les faits qu'elle retient caractérisent des insuffisances dans l'exercice des fonctions et la manière de servir de l'intéressé. Il résulte de ce qui précède que, pour apprécier la légalité d'une décision de refus de titularisation, il incombe au juge de vérifier qu'elle ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, qu'elle n'est entachée ni d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste dans l'appréciation de l'insuffisance professionnelle de l'intéressé, qu'elle ne revêt pas le caractère d'une sanction disciplinaire et n'est entachée d'aucun détournement de pouvoir et que, si elle est fondée sur des motifs qui caractérisent une insuffisance professionnelle mais aussi des fautes disciplinaires, l'intéressé a été mis à même de faire valoir ses observations.

7. Le conseil départemental du Doubs a fondé sa décision de ne pas titulariser M. E... à l'issue de son stage au motif qu'ont été observés d'importants manquements concernant les règles d'hygiène et de sécurité alimentaire, des problèmes organisationnels du service et des difficultés relationnelles avec l'équipe et sa hiérarchie.

8. Il ressort des pièces du dossier et notamment du bilan professionnel du 10 février 2017 rédigé par le principal et la gestionnaire de l'établissement, que l'intéressé a commis des négligences récurrentes dans le respect des normes d'hygiène et de sécurité alimentaires malgré une formation suivie le 5 octobre 2016. M. E... conteste la réalité des faits relatifs à l'analyse vétérinaire réalisée le 5 avril 2017 sur un échantillon de paëlla qui présentait un risque d'intoxication alimentaire en arguant que ce plat n'était pas destiné à être servi aux élèves. Il n'en demeure pas moins, comme le souligne le département en défense, que si ce plat constituait des restes du repas du soir destinés à être jetés, il a été stocké avec des aliments sains dans les réfrigérateurs, contrevenant ainsi aux règles sanitaires. Il n'a pas été non plus démontré que la bactérie présente dans l'échantillon est apparue en raison des conditions de refroidissement et n'était pas préexistante lors de la préparation du plat. L'attestation de la magasinière du 9 août 2017 soulignant le respect des règles d'hygiène par M. E..., qui n'est pas suffisamment circonstanciée, ne saurait suffire à remettre en cause les constatations faites par la hiérarchie du requérant. S'agissant des problèmes organisationnels, il est reproché à M. E... que les quantités cuisinées sont trop justes, que l'organisation du service n'est pas adaptée aux flux des élèves, que le service du soir est trop rapide et que la qualité des repas est décriée par les usagers, adultes et enfants. Il est reproché également que l'intéressé, malgré ses fonctions de responsable de cuisine, n'est pas source de proposition lors des commissions " menus ". Le principal et la gestionnaire de l'établissement ont souligné en outre que M. E... a manqué de loyauté dans le cadre de ses fonctions, notamment en modifiant seul le plan de maîtrise sanitaire du collège, en contactant de sa propre initiative des fournisseurs de produits d'entretien pour des devis alors même que cette tâche ne relevait pas de ses compétences ou en mettant fin au tri sélectif à la restauration le soir sans accord préalable de sa hiérarchie. En se bornant à produire des appréciations d'usagers de la restauration collective, dont certaines sont au demeurant mitigées quant à la qualité constante des repas et à la variété des desserts et des entrées, M. E... n'établit pas le caractère erroné des faits retenus à son encontre qui ne sont pas uniquement fondés sur la qualité des repas. Enfin, si M. E... ne peut être seul tenu responsable de la dégradation du climat général en cuisine, il est indéniable que l'intéressé avait des difficultés relationnelles avec sa hiérarchie. La circonstance que deux personnes lui ont succédé sur le poste depuis 2017 comme cela est confirmé par les dernières pièces produites par le département, démontrant selon le requérant les difficultés de travailler avec la gestionnaire, est sans incidence sur la décision contestée dès lors que le grief tenant au mauvais relationnel avec l'équipe de travail n'est pas le seul reproche fait à M. E... quant à sa manière de servir. Les attestations produites par le requérant de collègues témoignant de ses bonnes relations et de son implication professionnelle ne suffisent pas à remettre en cause la matérialité des faits invoqués par l'autorité territoriale pour justifier de l'insuffisance professionnelle du requérant. Enfin, au cours des entretiens des 8 février et 9 juin 2017, le principal et le gestionnaire de l'établissement ont explicité à M. E... les reproches et manquements dans son travail et lui ont fait savoir les réserves qu'ils émettaient sur sa titularisation dès le 8 février 2017. Malgré ces échanges, la qualité de la manière de servir du requérant ne s'est pas améliorée. Il s'ensuit que M. E... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de tout ce qui précède, que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du conseil départemental du Doubs, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par M. E... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du requérant le paiement de la somme demandée par le conseil départemental du Doubs au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le conseil départemental du Doubs sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et à la présidente du département du Doubs.

2

N° 18NC03393


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC03393
Date de la décision : 15/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-03-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Entrée en service. Stage. Fin de stage.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : LAZZARIN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-10-15;18nc03393 ?
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