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12/11/2020 | FRANCE | N°18NC02526

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 12 novembre 2020, 18NC02526


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le centre départemental d'économie rurale des exploitations agricoles de la Marne (CDER) a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la réduction des cotisations de cotisation foncière des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016 dans les rôles des communes de Châlons-en-Champagne et de Reims.

Par un jugement n° 1701220, 1701819 du 19 juillet 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a déchargé le CDER de la diffé

rence entre les cotisations foncières des entreprises auxquelles il a été assujetti ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le centre départemental d'économie rurale des exploitations agricoles de la Marne (CDER) a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la réduction des cotisations de cotisation foncière des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016 dans les rôles des communes de Châlons-en-Champagne et de Reims.

Par un jugement n° 1701220, 1701819 du 19 juillet 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a déchargé le CDER de la différence entre les cotisations foncières des entreprises auxquelles il a été assujetti pour le local de Châlons-en-Champagne au titre des années 2015 et 2016 et celles qui résulte de la réduction de 20 % de la valeur locative de l'immeuble et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 19 septembre 2018, 20 juin, 25 septembre et 14 octobre 2019, le centre départemental d'économie rurale des exploitations agricoles de la Marne, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 19 juillet 2018 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande tendant à la réduction des cotisations de cotisation foncière des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016 dans les rôles des communes de Châlons-en-Champagne et de Reims ;

2°) de faire droit au surplus des conclusions de sa demande en prononçant la décharge partielle correspondante.

Elle soutient que :

- l'association exerce une activité non commerciale au sens du I de l'article 1496 du code général des impôts en application de l'ordonnance n°45-2138 du 19 septembre 1945, du décret n°2012-432 du 30 mars 2012 et de la doctrine administrative ;

- le local de référence proposé par l'administration en remplacement du local-type initial n'est pas comparable à son bien situé à Reims ;

- ses locaux situés à Reims et à Châlons-en-Champagne ne peuvent être qualifiés d'établissements spéciaux ou de " maisons exceptionnelles " étant des locaux ordinaires ; s'agissant de sa succursale à Reims, en application de la doctrine administrative, ses locaux sont exclus de la catégorie des établissements spéciaux ;

- un abattement de 20 % doit être appliqué à la valeur locative des locaux de référence afin de tenir compte de la différence de superficie ;

- la doctrine est bien opposable à l'administration en application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

- un abattement de 40 % doit être appliqué à la valeur locative du local de Châlons-en-Champagne afin de tenir compte de la différence de situation entre Reims et cette commune.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er avril et 3 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le CDER ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n°45-2138 du 19 décembre 1945 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les conclusions de Mme Haudier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le centre départemental d'économie rurale des exploitations agricoles de la Marne (CDER), association de gestion et de comptabilité, a contesté les bases retenues pour le calcul des cotisations de cotisation foncière des entreprises au titre des années 2015 et 2016 concernant ses locaux situés à Châlons-en-Champagne et à Reims. Par décision du 4 mai 2017, l'administration a admis partiellement sa réclamation. Le CDER relève appel du jugement du 19 juillet 2018 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en tant que, après l'avoir déchargé de la différence entre les cotisations foncières des entreprises auxquelles il a été assujetti pour le local de Châlons-en-Champagne au titre des années 2015 et 2016 et celles qui résulte de la réduction de 20 % de la valeur locative de l'immeuble, il a rejeté le surplus de la demande.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. D'une part, aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, (...), dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période ". Aux termes de l'article 1494 du même code : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe d'habitation ou d'une taxe annexe établie sur les mêmes bases est déterminée, conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte. ". Aux termes du I de l'article 1496 du même code dans sa rédaction applicable au litige : " La valeur locative des locaux affectés à l'habitation ou servant à l'exercice soit d'une activité salariée à domicile, soit d'une activité salariée à domicile, soit d'une activité professionnelle non commerciale au sens du 1 de l'article 92 est déterminée par comparaison avec celle de locaux de référence choisis, dans la commune, pour chaque nature et catégorie de locaux ". Aux termes du 1 de l'article 92 du même code : " Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants ou de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profit ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 2 de l'ordonnance du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable, dans sa rédaction applicable au litige : " Est expert-comptable ou réviseur comptable au sens de la présente ordonnance celui qui fait profession habituelle de réviser et d'apprécier les comptabilités des entreprises et organismes auxquels il n'est pas lié par un contrat de travail. Il est également habilité à attester la régularité et la sincérité des comptes de résultats. / L'expert-comptable fait aussi profession de tenir, centraliser, ouvrir, arrêter, surveiller, redresser et consolider les comptabilités des entreprises et organismes auxquels il n'est pas lié par un contrat de travail. / L'expert-comptable peut aussi organiser les comptabilités et analyser par les procédés de la technique comptable la situation et le fonctionnement des entreprises et organismes sous leurs différents aspects économique, juridique et financier. / Il fait rapport de ses constatations, conclusions et suggestions. / L'expert-comptable peut aussi accompagner la création d'entreprise sous tous ses aspects comptables ou à finalité économique et financière. / Les membres de l'ordre, les sociétés pluri-professionnelles d'exercice, les succursales et les associations de gestion et de comptabilité peuvent assister, dans leurs démarches déclaratives à finalité fiscale, sociale et administrative, les personnes physiques qui leur ont confié les éléments justificatifs et comptables nécessaires auxdites démarches ". Aux termes du I de l'article 7 ter de la même ordonnance : " L'activité d'expertise comptable peut également être exercée au sein d'associations de gestion et de comptabilité, qui ne sont pas membres de l'ordre des experts-comptables. / Ces associations ont pour objet de fournir les prestations prévues aux articles 2 et 22, et notamment d'apporter conseil et assistance en matière de gestion, à l'ensemble de leurs adhérents. (...) / Aucune association ne peut être inscrite au tableau si elle a moins de trois cents adhérents lors de la demande d'inscription / (...) ". Aux termes, enfin, de l'article 22 de la même ordonnance : " L'activité d'expertise comptable est incompatible avec toute occupation ou tout acte de nature à porter atteinte à l'indépendance de la personne qui l'exerce en particulier : / (...) / Avec toute activité commerciale ou acte d'intermédiaire autre que ceux que comporte l'exercice de la profession, sauf s'il est réalisé à titre accessoire et n'est pas de nature à mettre en péril l'exercice de la profession ou l'indépendance des associés experts-comptables ainsi que le respect par ces derniers des règles inhérentes à leur statut et à leur déontologie. Les conditions et limites à l'exercice de ces activités et à la réalisation de ces actes sont fixées par les normes professionnelles élaborées par le conseil supérieur de l'ordre et agréées par arrêté du ministre chargé de l'économie ; / (...) / Il est en outre interdit aux membres de l'ordre, aux succursales et aux associations de gestion et de comptabilité, ainsi qu'à leurs salariés mentionnés à l'article 83 ter et à l'article 83 quater d'agir en tant qu'agent d'affaires (...) ". Il résulte de ces dispositions que le législateur a reconnu un caractère non commercial aux activités que les associations de gestion et de comptabilité exercent conformément aux règles qu'elles prévoient.

4. Pour déterminer la valeur locative des locaux du CDER situés dans les communes de Reims et de Châlons-en-Champagne au titre des années 2015 et 2016, servant de base au calcul de la taxe foncière sur les propriétés bâties dont dépend la cotisation foncière des entreprises, l'administration a appliqué la méthode prévue à l'article 1498 du code général des impôts relative aux biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés à l'article 1496.

5. Le CDER soutient que n'ayant pas exercé d'autres activités que celles visées à l'article 22 de l'ordonnance du 19 septembre 1945, il doit être regardé comme exerçant une activité non commerciale.

6. Il ne résulte pas de l'instruction que l'association requérante aurait exercée dans ses locaux, au cours de la période litigieuse, d'autres activités que celles qui sont prévues par les dispositions précitées de l'ordonnance du 19 septembre 1945. Les circonstances que l'association requérante a recours à du personnel salarié pour assurer ses missions d'expertise comptable et qu'elle ne pourrait être assimilée à une structure exerçant une profession libérale comme le fait valoir le ministre en défense, sont ici sans incidence eu égard à la qualification donnée par le législateur. Dès lors qu'il s'agit ainsi d'activités professionnelles non commerciales, les locaux de l'association doivent être évalués selon la méthode comparative prévue par l'article 1496 du code général des impôts. Par suite, l'association est fondée à demander la réduction des cotisations de cotisation foncière des entreprises en litige, à concurrence de la différence résultant de l'application de cette méthode par rapport à celle de l'article 1498 qui a été utilisée par l'administration.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, présentés à titre subsidiaire et contestant les locaux de référence retenus par l'administration dans le cadre de la méthode prévue à l'article 1498 du code général des impôts, que le CDER est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté le surplus de sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante dans la présente instance, la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : L'article 3 du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 19 juillet 2018 est annulé.

Article 2 : Le centre départemental d'économie rurale des exploitations agricoles de la Marne est déchargé des cotisations de cotisation foncière des entreprises mises à sa charge au titre des années 2015 et 2016 dans les rôles des communes de Reims et de Châlons-en-Champagne à concurrence de la différence entre ce montant et celui qui résulte de l'application de la méthode prévue par l'article 1496 du code général des impôts en lieu et place de celle prévue par l'article 1498 du même code.

Article 3 : L'Etat versera au centre départemental d'économie rurale des exploitations agricoles de la Marne la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au centre départemental d'économie rurale des exploitations agricoles de la Marne et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

2

N° 18NC02526


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC02526
Date de la décision : 12/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-03-045-03-01 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : SOCIETE JURIDIQUE ET FISCALE DE CHAMPAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-11-12;18nc02526 ?
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