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23/09/2021 | FRANCE | N°20NC02909

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 23 septembre 2021, 20NC02909


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 23 décembre 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2001133 du 23 avril 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 octobre 2020, Mme B... A

..., représentée par Me Alevropoulou, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 avril 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 23 décembre 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2001133 du 23 avril 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 octobre 2020, Mme B... A..., représentée par Me Alevropoulou, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 avril 2020 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 23 décembre 2019 ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de trente jours à compter de la notification du présent arrêt, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur le refus de séjour :

- le préfet du Bas-Rhin a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, puisqu'elle souffre d'un syndrome de stress post-traumatique caractérisé ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- l'illégalité du refus de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français ;

- le préfet du Bas-Rhin a méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- l'illégalité de la décision portant refus de séjour prive de base légale la décision fixant le pays de destination.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 août 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Lambing a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., née en 1993 et de nationalité kosovare, serait entrée irrégulièrement en France le 3 décembre 2017 selon ses déclarations. Elle a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 13 avril 2018 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 2 novembre 2018. Le 7 janvier 2019, Mme A... a déposé une demande de titre de séjour pour raisons de santé. Par arrêté du 23 décembre 2019, le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A... relève appel du jugement du 23 avril 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 23 décembre 2019.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11°A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".

3. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Elle doit alors, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

4. Pour refuser à Mme A... la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Bas-Rhin s'est notamment fondé sur l'avis émis le 14 juin 2019 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui a estimé que l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que l'intéressée pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Les documents médicaux versés par Mme A... attestent qu'elle présente un état de stress post-traumatique et dépressif sévère et bénéficie à ce titre d'un traitement médicamenteux composé d'antidépresseur et d'anxiolytique, ainsi que d'une consultation spécialisée une fois par mois. Cependant, en l'absence d'autre précision quant à la disponibilité de ce traitement au Kosovo, ces éléments ne permettent pas d'établir de manière probante l'absence d'accès effectif de l'intéressée à un traitement approprié au Kosovo. En outre, le préfet a produit en première instance les fiches de la base de données MEdCOI (Medical Country of Origin Information), dont il ressort que les pathologies psychiatriques peuvent être prises en charge au Kosovo. Enfin la production par la requérante d'un rapport établi en 2017 par l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) relatif au traitement psychiatrique au Kosovo, en ce qu'il décrit de manière générale et peu circonstanciée le système de santé kosovare, ne permet pas davantage d'établir que la requérante ne pourrait pas personnellement être prise en charge de manière adéquate et appropriée dans son pays d'origine. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en prenant la décision attaquée.

5. En second lieu, Mme A... soutient que son état psychiatrique est directement lié à ce qu'elle a vécu dans son pays d'origine. La requérante se prévaut d'un certificat médical du 7 janvier 2020 précisant que son état ne peut être traité que dans un environnement serein et qu'un retour dans son pays d'origine exposerait l'intéressée à une aggravation de ses troubles en raison de la réexposition au facteur de son stress. Cependant, si ce certificat conclut à un état de stress post-traumatique, la requérante n'a produit aucun document de nature à établir la réalité des évènements traumatisants qu'elle aurait vécus dans son pays d'origine. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que les troubles anxio-dépressifs dont souffre la requérante puissent être imputés à des expériences traumatiques dont elle aurait été victime au Kosovo et qui rendraient de ce fait inefficace tout traitement médical qui pourrait lui être administré dans ce pays. Il s'ensuit que la décision attaquée n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'appui de son recours dirigé contre l'obligation de quitter le territoire.

7. En deuxième lieu, eu égard à ce qui a été dit précédemment, et alors que la requérante n'établit pas qu'elle ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L.511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

8. Eu égard à ce qui a été dit précédemment, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Il résulte de tout ce qui précède, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.

Une copie du présent arrêt sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

2

N° 20NC02909


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02909
Date de la décision : 23/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : ALEVROPOULOU

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-09-23;20nc02909 ?
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