Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme J... H... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 7 mai 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français A... un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1904214 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 février 2020, le 10 mars et le 26 septembre 2021, Mme J... H..., représentée par Me Levy, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 septembre 2019 ;
2°) d'annuler cet arrêté du 7 mai 2019 ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision portant refus de séjour : a été signée par une autorité incompétente ; le tribunal administratif a entaché son jugement d'une erreur de fait en ce que M. I..., père des enfants de K... J... H... ferait l'objet d'une mesure d'éloignement ; la décision contestée méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à sa situation familiale en France et de son intégration A... la société française ; méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant A... la mesure où ses enfants sont nés et suivis en France ; est entachée d'une erreur manifeste de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée eu égard à sa scolarité réussie en France et son projet de formation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
- la décision fixant le pays de destination est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de séjour.
Mme J... H... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 février 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Mosser a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme J... H..., née en 1996, de nationalité angolaise, déclare être entrée en France en novembre 2012 et a bénéficié d'une prise en charge en qualité de mineure isolée étrangère le 22 novembre 2012. Le 10 avril 2014, Mme J... H... a sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, le passeport qu'elle a présenté A... le cadre de cette demande était falsifiée et la requérante a été condamnée le 8 décembre 2016 à trois mois d'emprisonnement avec sursis pour usage de faux document administratif, détention et tentative d'obtention frauduleuses de document administratif par le tribunal correctionnel de Strasbourg. Le 23 février 2018, elle a sollicité son admission au séjour au titre de l'article L. 313-7, du 7° de l'article L.313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 7 mai 2019, le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français A... un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme J... H... relève appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 7 mai 2019.
Sur la régularité du jugement :
2. Si Mme J... H... soutient que les premiers juges ont entaché leur jugement d'une erreur de fait, une telle erreur, à la supposer établie, est seulement susceptible de remettre en cause, A... le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, les motifs retenus par le tribunal administratif pour rejeter sa demande d'annulation. Par suite, l'erreur alléguée qui se rapporte au bien-fondé du jugement attaqué est, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de ce même jugement.
Sur la légalité des décisions administratives attaquées :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
3. En premier lieu, par un arrêté du 18 octobre 2018, régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture du même jour, le préfet du Bas-Rhin a donné à Mme D... C..., sous-préfète, secrétaire générale adjointe, délégation pour signer, en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général, M. B... E..., tous arrêtés et décisions, à l'exclusion de certains actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions prises en matière de droit des étrangers. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le secrétaire général de la préfecture n'aurait pas été empêché ou absent le jour de la signature de la décision en litige par Mme D... C.... Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte attaqué doit être écarté.
4. En deuxième lieu, si Mme J... H... soutient que le père de ses enfants, M. F... I..., ne fait pas l'objet d'une mesure d'éloignement A... la mesure où il a formé une demande d'admission exceptionnelle au séjour le 9 juillet 2019 et a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour du 5 février 2021 au 1er août 2021 en qualité de parent accompagnant, ces circonstances sont postérieures à l'édiction de l'arrêt du 7 mai 2019. A cette date, M. I... faisait toujours l'objet d'une mesure d'éloignement en date du 10 mars 2017. A... ces conditions, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique A... l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, A... une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Et aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas A... les catégories précédentes ou A... celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion A... la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée A... le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger A... la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " ;
6. Si Mme J... H... souligne l'ancienneté de son séjour en France où elle est entrée en 2012 à l'âge de seize ans et son intégration A... la société française, il ressort des pièces du dossier que la requérante, titulaire d'un certificat d'aptitude professionnelle (CAP) cuisine, n'a jamais occupé un emploi un adéquation avec sa formation. Dès lors, si elle souhaite continuer à se former, participe aux activités de deux associations dont celle qui l'héberge et occupe des emplois précaires en qualité d'agent de nettoyage, ces éléments ne suffisent pas à justifier d'une insertion professionnelle et sociale suffisante, de telle sorte qu'elle aurait ancré en France le centre de ses intérêts personnels. Par ailleurs, si la requérante se prévaut de la présence sur le territoire français de ses deux enfants nés respectivement en 2016 et 2019 et du père de ses enfants, il n'est pas démontré que ses enfants ne pourraient pas poursuivre leur scolarité en Angola où ils ont vocation à l'accompagner et où elle n'est pas dépourvue d'attache familiale puisque ses frères et sœurs y résident. En outre, si sa fille, née en 2016, souffrirait de plusieurs pathologies rendant nécessaire un suivi médical, cette circonstance n'est pas de nature à lui conférer un droit au séjour dès lors que d'une part, elle n'a pas sollicité, A... le cadre de cette demande, la délivrance d'un titre sur ce fondement et d'autre part, les attestations médicales produites sont postérieures à la décision contestée. Par suite, et alors que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne garantit pas à l'étranger le droit de choisir le lieu le plus approprié pour développer une vie familiale, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée méconnaît ces stipulations. Pour les mêmes motifs, eu égard à la durée et aux conditions de séjour de Mme J... H... en France, le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit également être écarté. Par les mêmes motifs, Mme J... H... n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
7. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " A... toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, A... l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants A... toutes les décisions les concernant.
8. Si Mme J... H... fait valoir que ses deux enfants sont nés en France et que l'aînée y est accueillie en crèche à la date de la décision contestée, il n'est pas démontré que, compte tenu notamment de leur jeune âge, les enfants ne pourraient pas commencer ou poursuivre leur scolarité en Angola sans compromettre leur équilibre, ni leur scolarité. Par ailleurs, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue en Angola, pays dont est également ressortissant le père des enfants. A... ces conditions, cette décision qui n'implique en elle-même aucune séparation des enfants des requérants d'avec leurs parents ne méconnaît pas l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
En ce qui concerne les décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination :
9. Il résulte de ce qui précède que Mme J... H... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité du refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme J... H... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation ainsi que par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme J... H... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... J... H... et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.
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N° 20NC00354