Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés du 11 octobre 2021 par lesquels le préfet de la Haute-Saône a rejeté sa demande de renouvellement d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a assorti l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office et l'a assigné à résidence dans le département de la Haute-Saône pour une durée de quarante-cinq jours.
Par un jugement n° 2101887 du 22 octobre 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Besançon a d'une part, annulé l'arrêté attaqué du 19 janvier 2022 en tant seulement qu'il porte refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, interdiction de revenir sur le territoire français d'une durée d'un an, fixation du pays de destination et assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours, et, d'autre part, renvoyé à la formation collégiale du tribunal le surplus des conclusions de la demande.
Par un jugement n° 2101887 du 2 mars 2022, le tribunal administratif de Besançon a rejeté les conclusions à fin d'annulation de la décision refusant d'admettre M. B... au séjour, celles à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 13 mai 2022, M. B..., représenté par Me Bonardel-Argenty, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 2 mars 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Saône du 11 octobre 2021 en tant qu'il porte refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Saône de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- il est insuffisamment motivé, notamment en ce qui concerne la mesure d'éloignement ;
Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :
- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- elle a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- son comportement ne constitue pas une menace à l'ordre public.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2022, le préfet de la Haute-Saône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 avril 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience publique.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Bourguet-Chassagnon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant ivoirien, né le 6 mai 1970, entré régulièrement en France le 23 mars 2014, sous couvert d'un titre de résident longue durée UE délivré par les autorités italiennes pour une durée illimitée, a demandé au préfet de la Haute-Saône, dans le cadre d'un changement de situation, le renouvellement de son titre de séjour. Par deux arrêtés en date du 11 octobre 2021, notifiés le 19 octobre suivant, le préfet de la Haute-Saône a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office, a prononcé, à son encontre, une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Par un jugement du 22 octobre 2021, dont M. B... n'a pas relevé appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Besançon a annulé les décisions portant refus d'octroi de délai de départ volontaire, interdiction de retour sur le territoire français, désignation du pays de renvoi et assignation à résidence et renvoyé à la formation collégiale du tribunal le surplus des conclusions de la requête. Par un jugement du 2 mars 2022, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision refusant de l'admettre au séjour ainsi que ses conclusions accessoires.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, il résulte du point 2 du jugement que les premiers juges ont précisé que le magistrat désigné par le président du tribunal de Besançon s'était prononcé, en application de l'article R. 776-15 du code de justice administrative, sur les conclusions à fin d'annulation des décisions par lesquelles le préfet a obligé l'intéressé à quitter le territoire français sans délai, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, a fixé le pays de son renvoi et l'a assigné à résidence. Il résulte des termes mêmes du jugement contesté du 2 mars 2022 que le tribunal administratif de Besançon, dans sa formation collégiale, a expressément répondu aux moyens contenus dans la requête introduite par le requérant et dirigés contre le refus de titre de séjour, seule décision dont il s'est estimé saisi. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité en raison d'une insuffisance de motivation en ce qui concerne les moyens invoqués à l'encontre de la mesure d'éloignement, lesquels ont, par ailleurs, été écartés par le magistrat désigné dans son jugement du 22 octobre 2021.
Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, l'arrêté contesté vise les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment les articles L. 421-1 et L. 421-3. Après avoir rappelé les éléments de la situation personnelle et familiale de l'intéressé dont il avait connaissance à la date de la décision contestée, le préfet a examiné la demande de titre de séjour portant la mention " salarié " dont il était saisi et a précisé qu'en l'absence de toute promesse d'embauche, M. B... ne pouvait se prévaloir des dispositions des articles L. 421-1 et L. 421-3 de ce code. Il a également indiqué que l'intéressé ne remplissait plus les conditions d'attribution d'un titre de séjour en qualité de conjoint de français en raison du jugement de divorce du 30 juin 2020, que son comportement caractérisait un trouble à l'ordre public et qu'en l'absence d'attaches familiales stables et anciennes en France, il n'était ainsi pas porté atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Le moyen tiré d'une insuffisante motivation de la décision de refus de titre de séjour ne peut, dès lors, qu'être écarté.
4. En deuxième lieu, si le requérant soutient que le préfet ne se serait pas livré à un examen complet de sa situation, il ressort des pièces du dossier que le préfet a pris en considération les éléments invoqués tenant à la vie personnelle et à la vie professionnelle de M. B... et qui apparaissent dans la motivation de la décision en litige. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ne se serait pas livré à un examen réel et sérieux de la demande de titre de séjour qui lui était présentée.
5. En troisième lieu, le requérant soutient que son comportement ne caractérise pas un trouble à l'ordre public. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, qui ne conteste pas la réalité des décisions ci-après rappelées, a fait l'objet d'un rappel à la loi par un officier de police judiciaire pour des faits d'usage de stupéfiants en 2017. Pour avoir conduit un véhicule sous l'emprise de stupéfiants en 2020, il a également été condamné à une amende délictuelle par une ordonnance pénale l'ayant contraint, en outre, à effectuer un stage de sécurité routière et lui ayant interdit de conduire tout véhicule à moteur pour une période de 5 mois. Si ces infractions ne suffisent pas, à elles seules, à caractériser un comportement constitutif d'une menace à l'ordre public, il ressort de la décision contestée, ainsi que l'a jugé le tribunal, que le préfet de la Haute-Saône a également rejeté la demande de délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " au motif que ce dernier ne bénéficiait d'aucune promesse d'embauche. Il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment pas de la promesse d'embauche non datée établie par la société Synergie pour un emploi en contrat à durée indéterminée intérimaire, produite en première instance, qu'à la date de la décision contestée, ce dernier pouvait se prévaloir d'un tel document. Il résulte ainsi de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision en se fondant sur ce seul motif. Le moyen tiré de l'erreur commise par le préfet en lui opposant la réserve d'ordre public doit, par suite, être écarté comme inopérant.
6. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. M. B... fait valoir qu'il séjourne habituellement en France depuis le 23 mars 2014, dont plusieurs années sous couvert de cartes de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", qu'il est bien intégré professionnellement, qu'il n'a plus d'attaches familiales en Côte d'Ivoire et qu'il vit maritalement avec sa compagne, Mme A..., de nationalité française, depuis le mois d'octobre 2020. Il ressort toutefois des pièces du dossier, qu'à la date de la décision attaquée, la relation dont se prévaut l'intéressé était très récente, qu'il est sans charges de famille en France et n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans le pays dont il a la nationalité, la Côte d'Ivoire, où résident des membres de sa fratrie et où il a vécu, au moins, jusqu'à l'âge de 22 ans. Ni les attestations qu'il produit, lesquelles émanent de relations récentes, appartenant pour l'essentiel au cercle familial et amical de Mme A... ni les bulletins de salaire attestant qu'il a effectué quelques missions d'intérim entre 2018 et 2021 ne suffisent à démontrer qu'il aurait désormais le centre de ses intérêts privés et familiaux en France, alors qu'il résulte des propres termes de sa requête de première instance qu'il a, par ailleurs, séjourné plus de 22 ans en Italie, à titre régulier à partir de 1995. Enfin, les faits d'usage de stupéfiants et de conduite sous l'emprise de stupéfiants qu'il a commis en 2017 et 2020, s'ils ne suffisent pas à caractériser un comportement constitutif d'une menace à l'ordre public ainsi qu'il a été dit plus haut, ne sauraient toutefois caractériser une intégration réussie dans la société française comme le prétend le requérant. Dès lors, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale. Le préfet de la Haute-Saône n'a, par suite, en prenant cette décision, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'annulation et d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Bonardel-Argenty.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Haute-Saône.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président,
M. Agnel, président-assesseur,
Mme Bourguet-Chassagnon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 septembre 2023.
La rapporteure,
Signé : M. Bourguet-ChassagnonLe président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
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N° 22NC01224