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11/02/2025 | FRANCE | N°24NC03013

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 11 février 2025, 24NC03013


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 30 mai 2024 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et à ce qu'il soit enjoint à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour en procédant au renouvellement de sa carte de rési

dent d'une durée de 10 ans dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent jugeme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 30 mai 2024 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et à ce qu'il soit enjoint à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour en procédant au renouvellement de sa carte de résident d'une durée de 10 ans dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour valable durant l'attente de ce titre de séjour.

Par un jugement n° 2404578 du 12 novembre 2024, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du 30 mai 2024 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de délivrer à M. A... un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné, a enjoint au préfet du Bas-Rhin de réexaminer la situation de M. A... dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer pendant le temps de ce réexamen une autorisation provisoire de séjour et rejeté le surplus des conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 décembre 2024, le préfet du Bas-Rhin a demandé à la cour de surseoir à l'exécution de ce jugement.

Il soutient que :

- c'est par une méconnaissance du champ d'application de la loi dans le temps que le tribunal a jugé que l'arrêté contesté avait été pris en méconnaissance des articles L. 432-3 et L. 433-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 janvier 2024 ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'arrêté en litige ne refuse pas à M. A... le renouvellement de sa carte de résident mais lui refuse une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " ; par suite le refus de séjour a pu être pris sur le fondement de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les moyens tirés du défaut de motivation, de l'absence d'un comportement représentant une menace à l'ordre public, de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur la situation personnelle de M. A..., de la méconnaissance des article 8 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2025, M. A..., représenté par Me Maillard, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise la charge de l'Etat, au bénéfice de Me Maillard, qui s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle, la somme de 2 000 euros en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le tribunal a correctement appliqué les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour annuler l'arrêté en litige ;

- la motivation de l'arrêté en litige est insuffisante ;

- l'arrêté est entaché d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ce qui a conduit à une erreur d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- son comportement ne constitue pas une menace à l'ordre public ;

- un retour au Liban l'exposerait à des risques au regard de la profession de son frère et du fait qu'il s'y retrouverait seul.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 février 2025.

Vu :

- la requête n° 24NC03012 enregistrée au greffe de la cour, le 12 décembre 2024, par laquelle le préfet du Bas-Rhin demande l'annulation du même jugement ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 10 juillet 1991;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Ghisu-Deparis, présidente, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant libanais né en 1972, est entré en France le 1er février 1990. Il s'est vu délivrer un titre de séjour " salarié " le 28 juillet 1993 régulièrement renouvelé, puis une carte de résident à compter du 27 avril 2001, valable jusqu'au 26 avril 2011, renouvelée du 27 avril 2011 au 26 avril 2021. L'intéressé a une nouvelle fois sollicité le renouvellement de sa carte de résident le 12 avril 2021 alors qu'il était en détention à la suite de sa condamnation à une peine d'emprisonnement de deux ans assortie d'un sursis probatoire de huit mois renforcé pendant trois ans pour des faits d'appels téléphoniques malveillants, de menaces de mort réitérées commises par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité. Par un arrêté en date du 16 août 2021, annulé par un jugement du 30 août 2021, la préfète du Bas-Rhin lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire d'une durée de deux ans. Le 19 novembre 2021, l'intéressé, détenteur d'un récépissé " vie privée et familiale ", a été condamné une nouvelle fois à une peine d'emprisonnement de six mois pour des faits similaires commis entre le 22 décembre 2019 et le 26 janvier 2020. Par un arrêté du 30 mai 2024, la préfète du Bas-Rhin lui a à nouveau refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2404578 du 12 novembre 2024, dont le préfet du Bas-Rhin demande le sursis à exécution, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 30 mai 2024.

Sur le bien-fondé de la requête à fin de sursis :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ".

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 222-25 du code de justice administrative : " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. / Par dérogation à l'alinéa précédent, le président de la cour ou le président de chambre statue en audience publique et sans conclusions du rapporteur public sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17 ".

4. Si le moyen tiré d'une application des textes non applicables dans le temps à la décision contestée est de nature à justifier la censure du jugement du tribunal administratif de Strasbourg, le moyen tiré de ce que le refus de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A... semble de nature à confirmer, en l'état de l'instruction, l'annulation prononcée par les premiers juges. Par suite, il y a lieu de rejeter la requête à fin de sursis du préfet du Bas-Rhin.

Sur les frais de l'instance :

5. M. A... ayant été admis à l'aide juridictionnelle totale, son avocat peut prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à Me Maillard, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du préfet du Bas-Rhin est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Me Maillard la somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Me Maillard.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2025.

La présidente,

Signé : V. Ghisu-DeparisLe greffier,

Signé : A. Betti

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

A. Betti

2

N° 24NC03013


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NC03013
Date de la décision : 11/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Véronique GHISU-DEPARIS
Avocat(s) : MAILLARD

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-11;24nc03013 ?
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