VU la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 mars 1992, présentée par M. Louis X..., demeurant ... ;
M. X... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 10 décembre 1991 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la réduction des droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre des années 1981 à 1984 et, d'autre part, à l'annulation de la décision du 15 février 1988 du directeur des services fiscaux de la Manche rejetant sa réclamation ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités dont elles ont été assorties ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 septembre 1993 :
- le rapport de M. AUBERT, conseiller,
- les observations de M. X...,
- et les conclusions de M. CHAMARD, commissaire du gouvernement,
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, d'une part, que postérieurement à l'introduction de la demande de première instance, le directeur des services fiscaux de la Manche a prononcé le dégrèvement, à concurrence d'une somme de 3 374,20 F du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui a été réclamé à M. X... pour la période du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1982 ; qu'à concurrence de cette somme les conclusions de la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif étaient, dans cette mesure, devenues sans objet ; qu'en rejetant en totalité lesdites conclusions, le tribunal s'est mépris sur l'étendue du litige qui restait à trancher à la date à laquelle il a rendu son jugement ; qu'il appartient, dès lors à la Cour d'annuler, dans cette mesure, le jugement attaqué, d'évoquer les conclusions de la demande de première instance sur lesquelles le tribunal administratif a statué à tort, et de constater que, celles-ci étant devenues sans objet postérieurement à l'introduction de ladite demande, il n'y a pas lieu d'y statuer ;
Considérant, d'autre part, que si M. X... se plaint de n'avoir pas été convoqué à l'audience, il ressort des mentions du jugement, confirmé par l'enquête diligentée par la Cour, qu'un avis d'audience a été régulièrement envoyé au conseil du requérant ; qu'ainsi, M. X... doit être regardé comme ayant été régulièrement convoqué à l'audience ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition et la charge de la preuve :
Considérant qu'il n'est pas établi que la procédure d'imposition aurait été entachée d'une irrégularité à la suite d'opérations menées par le service régional de police judiciaire de Rouen ; que, par suite, la circonstance que la perquisition menée par le service dont s'agit n'aurait conduit à la découverte d'aucun document pouvant intéresser les enquêteurs est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les bases d'impositions forfaitaires retenues par l'administration au titre des années 1981 et 1982 ont été fixées par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, en application de l'article L.5 du livre des procédures fiscales ; que, dans ces conditions il appartient au contribuable de fournir tous éléments comptables et autres de nature à permettre d'apprécier l'importance du bénéfice que l'entreprise peut réaliser normalement, compte tenu de sa situation propre ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L.169 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : "Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la quatrième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due" et qu'aux termes de l'article L.189 : "La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de redressement ..." ;
Considérant qu'il est constant que M. X... a reçu avant le 31 décembre 1985 la proposition d'un nouveau forfait que l'administration, constatant la caducité du forfait qui lui avait été fixé, se proposait d'appliquer au titre de la période biennale 1981-1982 aux bénéfices industriels et commerciaux tirés de l'activité de vente ambulante de produits vétérinaires qu'il exerçait ; qu'une telle proposition, intervenue le 18 avril 1984, a constitué un acte interruptif de prescription au sens des dispositions de l'article L.189 du livre des procédures fiscales et a eu pour effet d'ouvrir à l'administration, un nouveau délai de prescription qui venait à expiration le 31 décembre 1988 ; que le complément d'impôt sur le revenu en litige a été mis en recouvrement le 31 décembre 1987 ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à soutenir que ladite imposition a été établie en violation des règles applicables en matière de prescription ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 51 du code général des impôts : "Le montant du bénéfice forfaitaire est évalué par le service des impôts ; il doit correspondre au bénéfice que l'entreprise peut produire normalement ..." ; que si le requérant soutient que l'administration n'aurait pas tenu compte, pour un montant de 40 000 F, de factures impayées par ses clients, cette circonstance est, en tout état de cause, sans influence sur le bien-fondé des impositions en litige, dès lors que les bénéfices imposables dont le montant est fixé selon le régime du forfait sont, comme il a été dit ci-dessus, ceux que l'entreprise peut produire normalement, tels qu'ils peuvent être estimés au moment de l'établissement de ce forfait, et non ceux qu'elle a effectivement réalisés au cours de la période couverte par ledit forfait ;
Considérant, en troisième lieu, que si M. X... soutient que ses bénéfices forfaitaires pour l'année 1981 et 1982 ont été respectivement majorés irrégulièrement de 32 000 F et de 8 500 F et que des erreurs ont été commises par l'administration dans l'estimation des ventes d'aiguilles et de pierres de sel, il n'apporte à l'appui de ses allégations aucun élément comptable ou extra-comptable de nature à établir la preuve du caractère exagéré de l'évaluation de ses bases d'impositions ;
Sur le recouvrement forcé d'une somme de 18 114 F :
Considérant que les conclusions par lesquelles M. X... conteste le recouvrement d'une somme de 18 114 F effectué par voie d'avis à tiers détenteur sur son compte bancaire et son livret d'épargne sont présentées pour la première fois en appel ; que par suite, elles ne sont pas recevables et, dès lors, ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;
Article 1er - Le jugement du Tribunal administratif de Caen en date du 10 décembre 1991 est annulé en tant qu'il a omis de prononcer le non-lieu à statuer sur une somme de TROIS MILLE TROIS CENT SOIXANTE QUATORZE Francs et VINGT centimes (3 374,20 F).
Article 2 - A concurrence de la somme de TROIS MILLE TROIS CENT SOIXANTE QUATORZE Francs et VINGT centimes (3 374,20 F) en ce qui concerne le complément de taxe sur la valeur ajoutée qui a été réclamé à M. X... pour la période du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1982, il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de M. X....
Article 3 - Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 4 - Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre du budget.