Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 24 mai 1993, présentée pour la SOCIETE D'ABATTAGE DE FLERS dont le siège social est ... (Orne) représentée par son président-directeur- général en exercice ;
La société demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 86-575 en date du 2 mars 1993 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la décharge d'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auquel elle a été assujettie au titre des années 1980, 1981 et 1982, en tant que ce jugement a refusé d'admettre le bien-fondé de la déduction d'une provision pour fermeture de l'abattoir en déduction des résultats de l'exercice 1982 ;
2 ) de lui accorder la décharge sollicitée au titre de l'exercice 1982 ;
3 ) de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 25 000 F sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mars 1995 :
- le rapport de Mme Coënt-Bochard, conseiller,
- et les conclusions de M. Chamard, commissaire du gouvernement,
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ...notamment : ...5 les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables ..." ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice et qu'elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise ;
Considérant que les salaires versés par une entreprise à ses salariés constituent une charge c'est-à-dire un élément du coût de revient des opérations effectuées par l'entreprise au cours d'un exercice comptable ; que si la survenance d'un événement exceptionnel peut conduire à considérer comme une perte une charge qui, n'ayant pas de compensation, entraînerait une diminution de l'actif de l'entreprise, il ne peut en être ainsi que si le solde négatif résulte de la comparaison entre l'ensemble des charges nécessitées par une ou plusieurs opérations déterminées et l'ensemble des contreparties que l'entreprise retire de cette opération ou de ce groupe d'opérations ;
Considérant que si la décision prise par la ville de Flers de fermer l'abattoir municipal pendant une durée de 7 semaines pour entreprendre des travaux de rénovation constitue un événement exceptionnel, il n'est pas établi que le paiement des salaires pendant la fermeture de l'établissement entraîne inéluctablement une diminution de l'actif de l'entreprise ; qu'ainsi ce paiement présente le caractère d'une charge future et non d'une perte ; que dès lors que cette charge ne trouve pas son origine dans un fait générateur intervenu au cours de l'exercice 1982, la SOCIETE D'ABATTAGE DE FLERS ne pouvait en provisionner le montant sur cet exercice ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE D'ABATTAGE DE FLERS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que la SOCIETE D'ABATTAGE DE FLERS succombe dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme au titre des frais qu'elle a exposés doit, en conséquence, être rejetée ;
Article 1er - La requête présentée par la SOCIETE D'ABATTAGE DE FLERS est rejetée.
Article 2 - Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE D'ABATTAGE DE FLERS et au ministre du budget.