Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 17 mars 2003, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Letellier-Piotrowski, avocat au barreau de Caen ; M. et Mme X demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 02-161 du 24 décembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 1998 ;
2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée et des pénalités y afférentes ;
3°) d'ordonner le remboursement de la somme de 83 719,82 euros assortie de l'intérêt prévu par l'article L.208 du livre des procédures fiscales ;
4°) de condamner l'Etat au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative à leur payer les frais d'hypothèque de 44,52 euros à majorer de l'intérêt légal entre le 26 novembre 2001 et la date du paiement à intervenir, le droit de timbre de 200 F ou 60 euros majoré de l'intérêt légal jusqu'à la date du paiement, et à leur rembourser les frais non compris dans les dépens dont ceux relatifs aux rémunérations des avocats ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 67-5 du 3 janvier 1967 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2006 :
- le rapport de M. Grangé, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Lalauze, commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'administration a imposé M. et Mme X à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1998 à raison de la part de M. X dans le bénéfice industriel et commercial de l'armement Bel Espoir provenant principalement de la cession par celui-ci, dans le cadre d'une procédure de règlement judiciaire, du navire du même nom ;
Considérant que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie soutient devant la Cour que M. X est imposable en tant qu'associé d'une société de fait constituée entre lui-même et M. Y pour l'exploitation du chalutier Bel Espoir ;
Considérant que l'existence d'une société de fait pour l'exploitation d'une entreprise résulte à la fois des apports faits à cette dernière par au moins deux personnes et de la participation de celles-ci tant à l'administration et au contrôle de l'affaire qu'aux bénéfices et aux pertes ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par conventions du 19 septembre 1986, M. X et M. Y ont décidé de construire en copropriété un chalutier et convenu que la propriété en serait répartie entre eux à raison de 51 % pour M. Y, et de 49 % pour M. X ; que M. et Mme X se sont portés caution des prêts consentis par des établissements de crédits au nom de M. Y ; que l'apport personnel nécessaire au financement a été réalisé au moyen d'un emprunt souscrit par M. et Mme X, garanti par une hypothèque sur leur maison ; qu'il a été stipulé que le bénéfice d'exploitation avant amortissement et frais financiers serait réparti annuellement au prorata des parts de copropriété ; que si M. Y a été désigné pour assurer le commandement du navire en tant que patron et armateur, M. X s'est réservé la possibilité de le faire remplacer pour le cas où il ne donnerait pas satisfaction ; que les achats de matériel, les révisions, les réparations du navire, le choix des fournisseurs et des assurances devaient obtenir l'accord de M. X ; qu'il n'est pas établi que ces stipulations auraient été modifiées ni méconnues ; qu'il est constant que M. X a déclaré sa part des résultats de l'exploitation du navire suivant la clé de répartition prévue, au titre notamment des années 1989 à 1997, et déduit les déficits de son revenu global ; qu'à l'occasion d'une vérification de comptabilité en 1992, il a désigné, conjointement avec M. Y, le cabinet comptable chargé de les représenter ; que l'armement a rédigé des déclarations fiscales sous l'en-tête “STEF Chalutier Bel Espoir”, notamment au titre de l'année 1998 ; que dans ces circonstances l'administration établit suffisamment que M. Y et M. X ont constitué une société de fait pour l'exploitation du navire ; que le service était, dès lors, fondé, en vertu de l'article 8 du code général des impôts, à imposer M. et Mme X à l'impôt sur le revenu à raison de leur part dans les résultats déclarés par la société au titre de l'exercice clos en 1998, sans que puisse y faire obstacle la circonstance qu'ils n'ont pas appréhendé ce résultat provenant de la cession du navire dans le cadre d'une procédure de règlement judiciaire dont le produit a été affecté au désintéressement des créanciers ; que si les requérants soutiennent que l'entreprise constituait en réalité une copropriété de navire au sens de la loi susvisée du 3 janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer, cette assertion est démentie par la circonstance non contestée que l'entreprise, en inscrivant le navire à son actif et en l'amortissant, n'a pas entendu se placer dans ce cadre juridique ; que sont inopérants les moyens tirés de l'article 206-4 du code général des impôts inapplicable en l'espèce, de ce que seul M. Y a été placé en règlement judiciaire, et que M. et Mme X n'ont pas été appelés à intervenir dans cette procédure et n'ont pas participé à la décision de cession du navire prise par le tribunal de commerce ; que les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de l'autorité de la chose jugée qui s'attache aux jugements de ce tribunal à l'occasion d'une procédure ayant un autre objet et opposant d'autres parties que l'actuel litige fiscal ; qu'ils ne peuvent davantage utilement invoquer une attestation établie par M. Y selon laquelle M. X n'a jamais perçu de revenu de l'exploitation du navire et l'intégralité du produit de la vente a été versé à l'administrateur judiciaire ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la vente du navire Bel Espoir pour le prix de 2 800 000 F a dégagé une plus-value de 2 679 064 F par différence avec la valeur résiduelle de 120 936 F pour laquelle ce bien était inscrit à l'actif de l'entreprise en raison des amortissements pratiqués ; qu'une telle plus-value réalisée dans le cadre d'une exploitation industrielle et commerciale est imposable en tant que plus-value à court terme en vertu de l'article 39 duodecies du code général des impôts ; que l'administration était, par suite, fondée à en retenir le montant, comme l'armement l'avait d'ailleurs à bon droit déclaré, dans les résultats de celui-ci et à imposer M. et Mme X à l'impôt sur le revenu à proportion de leurs parts ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. et Mme X la somme que ceux-ci demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme André X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
N° 03NT00420
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