Vu la requête, enregistrée le 15 juin 2004, présentée pour la SOCIETE MORBIHANNAISE DE NAVIGATION (SMN), dont le siège social est situé Gare maritime de Lorient, rue Gilles Gahinet à Lorient (56323), représentée par le président de son directoire, par Me Deruy, avocat au barreau de Paris ; la SOCIETE MORBIHANNAISE DE NAVIGATION demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 01-2412 et 01-2220 en date du 23 mars 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 16 février 2001 de la commission permanente du conseil général de Loire-Atlantique autorisant le président dudit conseil général à signer le marché de gérance du service de transport par bacs sur la Loire avec la Compagnie d'exploitation des ports (CEP) ainsi que de la décision du 8 mars 2001 du président du conseil général de signer ce marché et à ce qu'il soit enjoint au département de Loire-Atlantique de demander au juge des contrats la résiliation du contrat de gérance qui a été signé ;
2°) d'annuler lesdites décisions ;
3°) d'enjoindre au président du conseil général de Loire-Atlantique de saisir le juge du contrat, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, d'une demande de résolution du marché, en application des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative et ce, sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard, passé le délai ci-dessus ;
4°) de condamner le département de Loire-Atlantique à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mars 2007 :
- le rapport de Mme Stefanski, rapporteur ;
- les observations de Me Autet substituant Me Baverez, avocat de la SOCIETE MORBIHANNAISE DE NAVIGATION ;
- les observations de Me Ramaut substituant Me Marchand, avocat du département de Loire-Atlantique ;
- et les conclusions de M. Mornet, commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;
Considérant que le contrat conclu entre le département de Loire-Atlantique et la SOCIETE MORBIHANNAISE DE NAVIGATION en vue de l'exploitation des bacs affectés aux passages d'eau sur la Loire arrivant à échéance, ledit département a procédé à un appel d'offres ouvert pour l'attribution de ce service de transport ; que lors de sa réunion du 24 octobre 2000, la commission d'appel d'offres a déclaré cet appel d'offres infructueux ; que, conformément aux dispositions de l'article 104-I-2° du code des marchés publics, dans sa rédaction alors applicable, il a été recouru à la procédure de marché négocié ; que, par une délibération du 16 février 2001, la commission permanente du conseil général de Loire-Atlantique a autorisé le président dudit conseil général à signer le marché de gérance du service de transport par bacs sur la Loire avec la Compagnie d'exploitation des ports (CEP), pour une durée de quatre ans, avec effet au 1er avril 2001, moyennant un forfait annuel de 1 282 502,36 euros ; que la SOCIETE MORBIHANNAISE DE NAVIGATION, dont l'offre n'a pas été retenue, interjette appel du jugement en date du 23 mars 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de cette délibération ainsi que de la décision du 8 mars 2001 du président du conseil général de Loire-Atlantique de signer le marché ci-dessus ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 du règlement de la consultation de la procédure négociée mise en oeuvre : Les critères utilisés pour l'attribution du marché seront les suivants, dans l'ordre de prévalence décroissante : 1 - Valeur technique 2 - Moyens généraux du candidat 3 - Prix 4 - Délai d'exécution et coût d'utilisation (marginaux) ; qu'au regard du premier critère, les candidats devaient satisfaire à des obligations de maintenance et d'entretien des navires et devaient produire à ce titre un document intitulé descriptif technique détaillé ; qu'il ressort des pièces versées au dossier et, notamment, du rapport d'analyse des offres de la commission d'appel d'offres en date du 30 janvier 2001, consultée, pour avis, par le président du conseil général, et annexé à son propre rapport présenté le 16 février 2001 devant la commission permanente, que le projet de la Compagnie d'exploitation des ports (CEP) était peu détaillé et établi sans références aux bacs de Loire ; qu'au contraire, ladite commission a relevé que la proposition de SMN est détaillée et fait apparaître un planning d'entretien et d'arrêts cohérents. De ce point de vue, l'offre SMN apparaît supérieure ; qu'au regard du deuxième critère, la commission d'appel d'offres a, dans son rapport précité, noté que la CEP ne présente aucune référence en matière de gestion de passages d'eau. Ses références concernent la gestion des ports ; que dans ces conditions, et alors même que le prix tel qu'il était proposé par la CEP était moins élevé que celui proposé par la SMN, la commission permanente du conseil général de Loire-Atlantique a, en retenant l'offre de la CEP, laquelle, au regard des deux premiers critères d'attribution considérés comme étant prioritaires par l'article 3 précité du règlement de la consultation, était inférieure à celle de la SMN, entaché sa délibération du 16 février 2001 d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, par voie de conséquence, la décision du 8 mars 2001 du président du conseil général de signer le marché litigieux est elle-même entachée d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE MORBIHANNAISE DE NAVIGATION est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes ;
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
Considérant qu'eu égard au vice dont sont entachées la délibération du 16 février 2001 de la commission permanente du conseil général de Loire-Atlantique et la décision du 8 mars 2001 du président dudit conseil général et qui concerne le choix du cocontractant, l'annulation de cette délibération et de cette décision implique nécessairement la nullité du marché passé entre le département et la Compagnie d'exploitation des ports (CEP) sans que puisse y faire obstacle la circonstance que le marché a été entièrement exécuté ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'une telle nullité porterait une atteinte excessive à l'intérêt général ; que, dans ces conditions, il y a lieu d'enjoindre au département de Loire-Atlantique, s'il ne peut obtenir de la CEP qu'elle accepte la résiliation d'un commun accord, de saisir le juge du contrat afin de faire constater la nullité du marché litigieux, dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la SOCIETE MORBIHANNAISE DE NAVIGATION, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer au département de Loire-Atlantique la somme que ce dernier demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de condamner le département de Loire-Atlantique à payer à la SOCIETE MORBIHANNAISE DE NAVIGATION une somme de 1 500 euros au même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Nantes, la délibération de la commission permanente du conseil général de Loire-Atlantique en date du 16 février 2001 et la décision du président du conseil général de signer le contrat de gérance du service de transport par bacs sur la Loire en date du 8 mars 2001, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au département de Loire-Atlantique de convenir de la résolution amiable du contrat de gérance du service de transport par bacs sur la Loire et, à défaut, si elle n'y parvient pas, de saisir le juge du contrat pour que ce dernier prononce la résolution du contrat, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le département de Loire-Atlantique est condamné à payer à la SOCIETE MORBIHANNAISE DE NAVIGATION une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions présentées par le département de Loire-Atlantique au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE MORBIHANNAISE DE NAVIGATION, au département de Loire-Atlantique et à la Compagnie d'exploitation des ports. Une copie sera adressée au préfet de Loire-Atlantique et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
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N° 04NT00714
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