Vu le recours, enregistré le 16 juin 2009, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT ; le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 06-2711 en date du 26 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a déchargé la SAS Roto Armor des compléments de taxe professionnelle auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2005 ;
2°) de rétablir la SAS Roto Armor au rôle de la taxe professionnelle 2005 à concurrence du dégrèvement prononcé en exécution du jugement ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mai 2010 :
- le rapport de Mme Coiffet, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Hervouet, rapporteur public ;
Considérant que par décision du 25 novembre 2004, la société JLA a, par application des dispositions de l'article 1844-5 du code civil, procédé, en sa qualité d'associée unique de la société SA Roto Armor, à la dissolution volontaire sans liquidation de cette dernière ; que par une réclamation du 15 novembre 2005, la SAS Roto Armor, antérieurement JLA, a contesté les cotisations de taxe professionnelle mises à sa charge au titre de l'année 2005 calculées conformément aux dispositions du IV de l'article 1478 du code général des impôts selon les bases déclarées par l'ancien exploitant et demandé que la valeur locative des équipements et biens mobiliers transmis soit déterminée à partir de leur seule valeur nette comptable ; que par une décision en date du 11 mai 2006, l'administration après avoir constaté que les bases d'imposition calculées dans les conditions rappelées par la contribuable étaient inférieures à la valeur locative plancher prévue par l'article 1518 B précité du code général des impôts, a substitué cette dernière à la valeur locative des immobilisations déterminée d'après leur valeur d'apport et n'a, ainsi, que partiellement satisfait à la demande de la société ; que par un jugement du 26 mars 2009, le Tribunal administratif de Rennes a fait droit à la demande de la SAS Roto Armor tendant à la réduction de la taxe professionnelle mise à sa charge au titre de l'année 2005 ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT interjette appel de ce jugement ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le Tribunal administratif de Rennes a fait droit à la demande de la SAS Roto Armor sans se prononcer sur le moyen, qui n'était pas inopérant, opposé en défense par l'administration et tiré de l'applicabilité aux opérations en litige des dispositions du 3° quater de l'article 1469 du code général des impôts ; que, par suite, le ministre est fondé à soutenir que le jugement est irrégulier et doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SAS Roto Armor devant le Tribunal administratif de Rennes ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par décision en date du 4 décembre 2006, postérieure à l'enregistrement de la demande, le directeur des services fiscaux des Côtes d'Armor a prononcé le dégrèvement à concurrence d'une somme de 133 119 euros, des cotisations de taxe professionnelle auxquelles la SAS Roto Armor a été assujettie au titre de l'année 2005 ; que les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur le bien fondé des impositions en litige :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1844-5 du code civil : La réunion de toutes les parts sociales en une seule main n'entraîne pas la dissolution de plein droit de la société. Tout intéressé peut demander cette dissolution si la situation n'a pas été régularisée dans un délai d'un an. Le tribunal peut accorder à la société un délai maximal de six mois pour régulariser la situation. (...) / En cas de dissolution, celle-ci entraîne la transmission universelle du patrimoine de la société à l'associé unique, sans qu'il y ait lieu à liquidation. Les créanciers peuvent faire opposition à la dissolution dans le délai de trente jours à compter de la publication de celle-ci (...) ; qu'aux termes de l'article 1478 du code général des impôts : (...) II. En cas de création d'un établissement autre que ceux mentionnés au III, la taxe professionnelle n'est pas due pour l'année de la création. / Pour les deux années suivant celles de la création, la base d'imposition est calculée d'après les immobilisations dont le redevable a disposé au 31 décembre de la première année d'activité (...) / (...) IV. En cas de changement d'exploitant, la base d'imposition est calculée pour les deux années suivant celle du changement, dans les conditions définies au II, deuxième alinéa (...) qu'aux termes de l'article 1518 B du code général des impôts : A compter du 1er janvier 1980, la valeur locative des immobilisations corporelles acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements réalisés à partir du 1er janvier 1976 ne peut être inférieure aux deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'apport, la scission, la fusion ou la cession (...) Pour les opérations mentionnées au premier alinéa réalisées à compter du 1er janvier 1992, la valeur locative des immobilisations corporelles ne peut être inférieure aux quatre cinquièmes de son montant avant l'opération (...) ; qu'aux termes du 3° quater de l'article 1469 dudit code : Le prix de revient d'un bien cédé n'est pas modifié lorsque ce bien est rattaché au même établissement avant et après la cession et lorsque, directement ou indirectement : a. l'entreprise cessionnaire contrôle l'entreprise cédante ou est contrôlée par elle ; b. ou ces deux entreprises sont contrôlées par la même entreprise ;
Considérant que les transmissions universelles de patrimoine entraînées, en vertu de l'article 1844-5 du code civil, par la dissolution sans liquidation d'une société dont toutes les parts ont été réunies en une seule main ne procèdent pas de cessions, ni ne constituent une fusion au sens que revêtent ces termes en droit civil comme en droit des sociétés ; que les fusions et cessions d'établissements visées par l'article 1518 B du code général des impôts, dont les termes renvoient à des catégories d'opérations définies et régies par le droit des sociétés, ne sauraient s'entendre comme incluant toutes autres opérations, non mentionnées par ce texte, qui, sans constituer des fusions ou des cessions proprement dites, ont pour conséquence la mutation patrimoniale d'un établissement industriel ou commercial ; que, par suite, c'est à tort que le service a fait application desdites dispositions pour fixer la valeur locative des immobilisations corporelles acquises par la SAS Roto Armor à la suite de l'opération de dissolution susdécrite ; que, contrairement, à ce qu'affirme le ministre, cette opération ne relève pas davantage des dispositions précitées du 3° quater de l'article 1469, lesquelles, sans qu'il soit besoin de se rapporter aux travaux préparatoires de la loi de finances rectificative pour 2004 dont sont issues les dispositions de cet article, doivent être regardées comme ne visant que les transferts de propriété consentis entre un cédant et un cessionnaire ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS Roto Armor est fondée à demander la réduction de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2005 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SAS Roto Armor et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement susvisé du 26 mars 2009 du Tribunal administratif de Rennes est annulé.
Article 2 : La base d'imposition de la SAS Roto Armor à la taxe professionnelle au titre de l'année 2005 sera calculée en excluant l'application de la valeur locative plancher prévue à l'article 1518 B du code général des impôts.
Article 3 : La SAS Roto Armor est déchargée des cotisations de taxe professionnelle correspondant à la réduction de la base d'imposition résultant de l'application de l'article 2 ci-dessus.
Article 4 : L'Etat versera à la SAS Roto Armor une somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT et à la SAS Roto Armor.
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N° 09NT01387 2
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