Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2010, présentée pour LA POSTE, dont le siège social est situé au n° 44, boulevard de Vaugirard à Paris Cedex 15 (75757), représentée par le président de son conseil d'administration, par Me Bellanger, avocat au barreau de Paris ; LA POSTE demande à la cour d'annuler le jugement n° 09-908 en date du 18 mars 2010 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision implicite par laquelle elle a rejeté la demande indemnitaire formée par M. Alain X et l'a condamnée à verser à celui-ci la somme de 8 000 euros, majorée des intérêts de droit à compter du 28 octobre 2008, en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par l'intéressé à raison des fautes qu'elle a commises en ce qui concerne l'avancement de ce dernier ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
Vu le décret n° 93-517 du 25 mars 1993 relatif aux dispositions statutaires applicables au corps des agents de maîtrise, techniques et de gestion de La Poste et au corps des collaborateurs et agents de maîtrise de France Télécom ;
Vu le décret n° 2007-1332 du 10 septembre 2007 relatif aux dispositions statutaires applicables au corps des agents techniques et de gestion de La Poste ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2012 :
- le rapport de M. Piron, président-rapporteur ;
- les conclusions de M. Martin, rapporteur public ;
- les observations de Me de Bailliencourt substituant Me Bellanger, avocat de LA POSTE ;
- et les observations de Me Martin-Mahieu, avocat de M. X ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 février 2012, présentée pour M. X ;
Considérant que, par un jugement du 21 novembre 2003, le tribunal administratif de Rennes a, à la demande de M. X, annulé le tableau d'avancement arrêté par le directeur départemental de LA POSTE des Côtes d'Armor pour l'accès au grade d'agent technique et de gestion de 2ème niveau en 2001 ainsi que les nominations qui en ont découlé, au motif que le tableau d'avancement litigieux avait été établi sur le fondement d'une décision et d'une note de service de LA POSTE faisant application du décret n° 96-285 du 2 avril 1996 relatif à la notation du personnel de LA POSTE et de France Télécom et que ce décret avait été annulé par le Conseil d'Etat statuant au contentieux par une décision du 4 octobre 2000 ; que, par le jugement du 21 novembre 2003, les premiers juges avaient également enjoint à LA POSTE de procéder à l'élaboration d'un nouveau tableau d'avancement dans le délai de 6 mois à compter de la notification de ce jugement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; qu'en l'absence d'exécution de ce jugement, M. X a saisi le tribunal administratif sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-7 du code de justice administrative afin que celui-ci procède à la liquidation de l'astreinte ordonnée par le jugement du 21 novembre 2003 ; que, par un jugement du 20 janvier 2005, ce tribunal a fait droit à la demande de l'intéressé et a condamné LA POSTE à verser à celui-ci la somme de 1 500 euros et au budget de l'Etat la somme de 3 500 euros en retenant une période d'inexécution dudit jugement allant du 25 mai 2004 au 22 septembre 2004, date à laquelle un nouveau tableau d'avancement a été publié ; que, par une décision n° 274469 en date du 24 janvier 2007, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a rejeté les conclusions de LA POSTE dirigées contre le jugement du 21 novembre 2003 du tribunal administratif de Rennes ;
Considérant que, saisi par M. X, le tribunal administratif de Rennes a, par un jugement du 22 juin 2006, annulé la décision du 22 septembre 2004 arrêtant un nouveau tableau d'avancement au grade d'agent technique et de gestion de 2ème niveau de LA POSTE au titre de l'année 2001 au motif que l'administration était tenue, pour établir ce tableau, d'accomplir à nouveau les procédures prescrites pour son élaboration et, notamment, d'organiser un nouvel examen professionnel, conformément aux dispositions du décret susvisé du 25 mars 1993, avant de consulter la commission administrative paritaire compétente et qu'en l'espèce, si cette commission avait effectivement été consultée, LA POSTE n'avait pas organisé un nouvel examen professionnel ; que, par une décision n° 296783 en date du 29 décembre 2006, le Conseil d'Etat statuant au contentieux n'a pas admis le pourvoi en cassation formé par LA POSTE contre ce jugement ; qu'en l'absence d'exécution dudit jugement, M. X a, le 3 octobre 2006, demandé au tribunal administratif de Rennes, sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, d'en assurer l'exécution ; que, par une ordonnance du 31 mai 2007, le président de ce tribunal a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle ; que, dans le cadre de cette instance, enregistrée sous le n° 0702137, LA POSTE a fait valoir que, face à la complexité du dossier, elle avait saisi la section du rapport et des études du Conseil d'Etat pour la consulter sur une solution consistant à élaborer un nouveau tableau d'avancement suivant les prescriptions du 2° de l'article 15 du décret du 10 septembre 2007 susvisé, qui prévoient que les agents techniques et de gestion de premier niveau de LA POSTE comptant au moins un an d'ancienneté au 9ème échelon de leur grade à la date de clôture des listes de candidatures, peuvent être promus au grade d'agent technique et de gestion de second niveau de LA POSTE par la voie d'inscription à un tableau d'avancement de grade établi après avis de la commission administrative paritaire ; que M. X estimait, pour sa part, que le nouveau tableau d'avancement devait être établi en fonction de l'ancienneté des promouvables ; que, par une décision n° 318341 du 19 juin 2009, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, auquel les conclusions de la demande d'exécution de M. X avaient été renvoyées par un jugement du 3 juillet 2008 du tribunal administratif de Rennes, a lui-même renvoyé à ce tribunal l'examen de ces conclusions ; que, par un jugement en date du 31 décembre 2009, ce dernier a constaté que l'exécution du jugement était impossible et a prononcé un non-lieu à statuer ;
Considérant que M. X a, par une réclamation préalable du 11 octobre 2008, reçue par LA POSTE le 28 octobre 2008, saisi cette dernière afin d'obtenir la réparation des préjudices qu'il estime avoir subis ; que LA POSTE relève appel du jugement en date du 18 mars 2010 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision implicite par laquelle elle a rejeté cette demande préalable et l'a condamnée à verser à l'intéressé la somme de 8 000 euros, majorée des intérêts de droit à compter du 28 octobre 2008, en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par celui-ci à raison des fautes qu'elle a commises à l'occasion de son avancement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu par LA POSTE, le jugement du 18 mars 2010 du tribunal administratif de Rennes est suffisamment motivé et n'est pas entaché de contradiction dans ses motifs ; que, par ailleurs, si les notes en délibéré produites les 11 et 12 février 2010 pour M. X devant ce tribunal n'ont pas été transmises à la société requérante, cette circonstance n'est pas de nature à affecter la régularité dudit jugement dès lors que ces notes ne contenaient pas d'éléments rendant nécessaire la réouverture de l'instruction ; que, dans ces conditions, les premiers juges ont pu, sans méconnaître le caractère contradictoire de l'instruction et le principe du respect des droits de la défense, statuer sans avoir communiqué à LA POSTE les notes en cause ; que, par suite, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité ;
Sur la réparation :
Considérant qu'en prenant les décisions illégales ci-dessus relatives au tableau d'avancement au grade d'agent technique et de gestion de 2ème niveau au titre de l'année 2001, LA POSTE a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité ; qu'il résulte de l'instruction que M. X, qui remplissait, en 2001, les conditions pour être promu à ce grade, a été privé de la possibilité de faire valoir sa valeur professionnelle pour être inscrit à ce tableau d'avancement ainsi que de celle d'établir, du fait de la destruction, en application d'une instruction interne en date du 1er septembre 2004, des dossiers administratifs des candidats, que ceux qui ont été retenus au tableau d'avancement arrêté le 22 septembre 2004 justifiaient d'une valeur professionnelle moindre que la sienne et ce, alors même que l'intéressé n'aurait pas eu de chances sérieuses d'obtenir une telle promotion et qu'il a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du mois de décembre 2002 ; qu'en estimant que M. X avait, en raison de ces fautes, subi un préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence et en fixant à la somme de 8 000 euros le montant de la réparation dû à cet agent, montant qui n'est pas sérieusement contesté par LA POSTE, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation de ces derniers ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que LA POSTE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes l'a condamnée à verser à M. X la somme de 8 000 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par l'intéressé à raison des fautes qu'elle a commises en ce qui concerne son avancement ;
Sur les conclusions d'appel incident de M. X :
Considérant qu'alors même que M. X a fait l'objet de très bonnes appréciations sur sa manière de servir en qualité de guichetier réceptionniste, nonobstant certaines remarques faites à l'intéressé quant à l'effort devant être mené en matière de respect de ses horaires de travail notamment au titre des années 1999 et 2000, et qu'il a été privé d'une chance de pouvoir être inscrit au tableau d'avancement au titre de l'année 2001 pour l'accès au grade d'agent technique et de maintenance de 2ème niveau, il ne résulte pas de l'instruction que cette chance puisse être qualifiée de sérieuse, seule de nature à établir l'existence d'un préjudice économique et financier né de la différence de traitement entre les deux grades en cause et de leur répercussion sur la pension de retraite de l'intéressé ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à demander à ce titre une indemnité d'un montant de 23 936 euros ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, en allouant à M. X une indemnité d'un montant de 8 000 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par l'intéressé à raison des fautes commises par LA POSTE en ce qui concerne l'avancement de son agent, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation des faits de l'espèce ; que, dès lors, les conclusions de M. X tendant à l'allocation d'une indemnité de 13 000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions incidentes présentées par M. X doivent être rejetées ;
Sur les intérêts et leur capitalisation :
Considérant que M. X a droit aux intérêts légaux sur la somme de 8 000 euros à compter du 28 octobre 2008, date de réception par LA POSTE de sa demande indemnitaire en date du 11 octobre 2008 ;
Considérant que, pour l'application des dispositions de l'article 1154 du code civil, la demande de capitalisation des intérêts peut être présentée à tout moment devant le juge du fond ; que celle-ci ne prend effet qu'à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date, il s'agisse d'intérêts dus pour au moins une année entière ; que M. X a demandé la capitalisation des intérêts dans son mémoire enregistré au greffe de la cour le 6 septembre 2010 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que les intérêts échus le 6 septembre 2010 doivent dès lors être capitalisés à cette date, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure, pour produire eux-mêmes intérêts ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de LA POSTE, qui doit être regardée comme la partie perdante pour l'essentiel dans la présente instance, le versement à M. Coatelven de la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de LA POSTE est rejetée.
Article 2 : Les intérêts au taux légal dus par LA POSTE sur la somme de 8 000 euros à compter du 28 octobre 2008 et échus le 6 septembre 2010 seront capitalisés à cette dernière date, ainsi qu'à chaque échéance annuelle, pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Les conclusions incidentes présentées par M. X sont rejetées.
Article 4 : LA POSTE versera à M. X la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à LA POSTE et à M. Alain X.
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N° 10NT01019 2
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