Vu la décision n° 334834 du 27 juin 2011, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes le 25 juillet 2011 sous le n° 11NT02024, par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté pour M. X, renvoyé le jugement de l'affaire devant la même cour, après annulation de son arrêt du 3 décembre 2009 ;
Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2009, présentée pour M. Michel X, demeurant ..., par Me Hérissé, avocat au barreau de Château-Gontier ; M. Michel X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 08-4341 du 5 février 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de la société Semg Veillé, la décision du 6 juin 2008 par laquelle l'inspecteur du travail de la 2ème section d'inspection de la Mayenne a déclaré M. X apte sous conditions à la reprise de son poste de travail dans la société Semg Veillé ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société Semg Veillé ;
3°) de mettre à la charge de la société Semg Veillé la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2012 :
- le rapport de M. Christien, président-assesseur,
- et les conclusions de Mme Specht, rapporteur public ;
Considérant que, par jugement du 5 février 2009, le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de la société Semg Veillé, la décision du 6 juin 2008 par laquelle l'inspecteur du travail de la 2ème section d'inspection de la Mayenne a déclaré M. X apte sous conditions à la reprise de son poste de travail au sein de ladite entreprise ; que M. X interjette appel de ce jugement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 241-10-1 du code du travail, alors applicable, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 4624-1 du même code : " Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs. L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail. " ;
Considérant que M. X, qui était employé par la société Semg Veillé depuis le 1er octobre 2000, a, au cours du dernier trimestre 2006, été victime d'une lésion des tendons de l'épaule gauche qui a été prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie de la Mayenne au titre de la législation sur les maladies professionnelles ; qu'après une intervention chirurgicale suivie de séances de rééducation, l'état de santé de M. X a été déclaré consolidé le 22 août 2007, son taux d'incapacité permanente étant fixé à 3 % ; que dans un premier certificat en date du 5 septembre 2007, le médecin du travail considérait qu'il était " apte à la reprise du travail avec restriction pour la manutention de charges supérieures à 20 kilogrammes, le travail bras levé et l'utilisation de marteau piqueur " et qu'il devait le " revoir dans quatre mois " ; que M. X a toutefois été convoqué pour un nouvel examen médical dès le 14 septembre 2007 à l'issue duquel le médecin du travail a estimé qu'il était " inapte à son poste " et préconisé la recherche d'un poste sans manutention de charges supérieures à 20 kilogrammes, sans travail bras levé et sans utilisation du marteau piqueur " ; que cet avis a été confirmé le 1er octobre 2007 ; que, saisi le 18 mars 2008 par M. X d'un recours contre cet avis d'inaptitude l'inspecteur du travail a, après avis du médecin inspecteur régional du travail, pris le 6 juin 2008, une décision aux termes de laquelle " M. X est apte à la reprise de son poste de travail sans manutention de charges supérieures à 20 kilogrammes sans travail bras levé et sans utilisation de marteau piqueur, dans l'attente d'examens complémentaires demandés au CHU d'Angers, rendez-vous pris le 16 juin 2008. Le salarié devra être revu par le médecin du travail avec les résultats de ces examens complémentaires " ;
Considérant que le médecin traitant de M. X l'a déclaré apte à la reprise du travail le 22 août 2007 en préconisant simplement une reprise progressive du travail ; que le 26 février 2008, un professeur de médecine et santé du travail, se fondant sur l'excellent résultat thérapeutique obtenu dans le traitement de l'affection de M. X, a confirmé cet avis ; qu'il ressort, en outre, des pièces du dossier, et notamment du certificat de travail établi par la société Semg Veillé, que M. X occupait au sein de cette entreprise les fonctions non pas de maçon cariste, ainsi que l'ont relevé à tort les premiers juges, mais de maçon chef d'équipe, poste qui ne comporte pas de gestes professionnels non spécialisés ; que les fonctions d'encadrement de M. X, qui avait vocation à être entouré d'une équipe de travail, ne nécessitaient pas le port de charges lourdes, le travail bras levé ou l'usage du marteau piqueur ; que, dans ces conditions, les restrictions prévues par l'inspecteur du travail n'impliquaient pas nécessairement, contrairement à ce que soutient la société requérante, une déclaration d'inaptitude ; qu'ainsi, en déclarant M. X apte, sous certaines restrictions, à la reprise du travail, l'inspecteur du travail n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 6 juin 2008 de l'inspecteur du travail de la 2ème section d'inspection de la Mayenne au motif que ladite décision était entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Semg Veillé devant le tribunal administratif ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. (...) " ; qu'il résulte toutefois des dispositions des articles L. 122-32-4, L. 122-32-5 et L. 241-10-1 du code du travail, devenus respectivement les articles L. 1226-8, L. 1226-10 et L. 4624-1 dudit code, que le législateur a entendu définir entièrement les règles de motivation qui s'appliquent aux décisions du médecin du travail et, le cas échéant, de l'inspecteur du travail se prononçant sur l'aptitude d'un salarié à la reprise de son poste à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ; que, par suite, ces décisions sont soumises, en matière de motivation, aux seules prescriptions de l'article L. 122-32-5 du code du travail devenu l'article L. 1226-10 du même code, à l'exclusion de l'application des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ; que, dès lors, l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 ne saurait être utilement invoqué à l'encontre de la décision par laquelle l'inspecteur du travail a déclaré M. X apte sous conditions à la reprise de son poste de travail au sein de l'entreprise Semg Veillé ;
Considérant en second lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 241-10-1 du code du travail, devenu l'article L. 4624-1 du même code, qu'en cas de désaccord concernant les propositions du médecin du travail, il appartient à l'inspecteur du travail, éclairé par l'avis du médecin-inspecteur, de prendre la décision finale, sans qu'il puisse enjoindre au médecin du travail de formuler de nouvelles propositions après avoir annulé celles qu'il a déjà émises ; qu'il résulte des termes précités de la décision attaquée du 6 juin 2008 que l'inspecteur du travail, contrairement à ce que soutient la société requérante, s'est effectivement prononcé sur l'aptitude de M. X à la date de cette décision et n'a pas renvoyé au médecin du travail le soin de la prendre ; qu'en revanche, dès lors qu'il est dépourvu de pouvoir hiérarchique à l'égard du médecin de travail, il a excédé ses compétences en prévoyant que ledit médecin devrait procéder à un nouvel examen de M. X, à l'issue d'examens complémentaires au CHU d'Angers ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision susmentionnée du 6 juin 2008 par laquelle, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'inspecteur du travail de la 2ème section d'inspection de la Mayenne l'a déclaré apte sous certaines conditions à la reprise de son poste de travail dans la société Semg Veillé ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la société Semg Veillé une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, lesdites dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. X qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société Semg Veillé demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Nantes du 5 février 2009 est annulé en tant qu'il a annulé la décision du 6 juin 2008 de l'inspecteur du travail de la 2ème section d'inspection de la Mayenne en tant qu'elle a déclaré M. X apte, sous certaines conditions, à la reprise de son poste de travail.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
Article 3 : La société Semg Veillé versera une somme de 2 000 euros à M. X au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la société Semg Veillé au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Michel X, au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la société Semg Veillé.
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