Vu la requête, enregistrée le 27 mars 2012, présentée pour Mme Ghislaine et M. Denis X demeurant ..., par Me Pillon, avocat au barreau de Caen ; Mme Ghislaine et M. Denis X demandent à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 12-83 en date du 9 mars 2012 par laquelle le vice-président juge des référés du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à ce que soit ordonnée une expertise ;
2°) d'ordonner une expertise médicale confiée à un neurologue en vue, d'une part, d'apporter tous éléments d'information permettant d'apprécier si des fautes ou des manquements ont été commis par le centre hospitalier universitaire de Caen lors de la prise en charge de
Mme X au sein de cet établissement hospitalier, et, d'autre part, d'évaluer les divers chefs de préjudice qu'elle a subis ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2012 :
- le rapport de M. Coiffet, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;
- et les observations de Me Pillon, avocat de Mme et M. X ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X, qui souffrait depuis deux mois de céphalées intermittentes, a, le 31 mai 2006, été hospitalisée en urgence au sein du centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen pour y subir un scanner qui a révélé une lésion tumorale de la fosse postérieure ; que l'IRM pratiquée le 1er juin 2006 dans cet établissement a montré qu'elle souffrait d'un méningiome rare du trou occipital avec compression bulbaire et atteinte des premières vertèbres ; qu'il fut alors décidé de pratiquer, dans un premier temps, une ventriculo-cisternostomie, réalisée le 6 juin 2006 au CHU de Caen ; que, le 29 septembre 2006, Mme X fut de nouveau hospitalisée au sein du même établissement pour que soit effectuée l'exérèse de la lésion ; qu'à la suite de cette intervention, la patiente est restée tétraplégique ; que Mme et M. X ont alors saisi la commission régionale d'indemnisation et de conciliation des accidents médicaux de Basse-Normandie qui, après avoir ordonné une expertise réalisée par le professeur Y, neurochirurgien, et le docteur Z, infectiologue, a émis l'avis qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'encontre du centre hospitalier et a exclu tout aléa thérapeutique susceptible d'engager la solidarité nationale eu égard à l'importance de l'état antérieur de la patiente dans la réalisation du dommage ; que Mme et M. X relèvent appel de l'ordonnance du 9 mars 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant à ce que soit ordonnée une nouvelle expertise médicale ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise (...) " ;
Considérant que, dans son rapport d'expertise établi le 2 septembre 2008, le docteur Y, neurochirurgien, a estimé " que l'intervention chirurgicale du 29 septembre 2006 était parfaitement justifiée compte tenu du volume du méningiome présenté par la patiente, ce méningiome refoulant le cervelet et le tronc cérébral et exerçant sur ce dernier une pression importante, les nerfs mixtes pouvant aboutir à court terme à des conséquences gravissimes ", l'expert ajoutant d'ailleurs " qu'il est tout à fait logique de traiter dans un premier temps de l'hydrocéphalie par une dérivation de liquide céphalo rachidien et secondairement de proposer l'ablation du méningiome " ; que, cependant, il n'a pas apporté d'indications suffisamment précises sur l'existence d'alternative thérapeutique, ni sur l'évolution prévisible de la tumeur après l'intervention chirurgicale du 6 juin 2006 et en l'absence de nouvelle intervention, ni d'ailleurs sur l'état de santé de la patiente avant l'intervention litigieuse du 29 septembre 2006, alors que Mme X soutient qu'à la suite de la première intervention au mois de juin 2006 elle ne souffrait plus de maux de tête et que l'intervention du 29 septembre 2006 n'était pas nécessairement justifiée ; que ces questions sont distinctes de celle du bien-fondé de l'indication thérapeutique sur laquelle s'est parfaitement prononcé l'expert concerné ; que, par ailleurs, si le docteur Y a indiqué que l'information de la patiente semblait avoir été correcte et que celle-ci avait été convenablement informée au cours des consultations et visites, et s'il se référe à cet égard à différents courriers qui font état de cette information, il est constant que les courriers en question ne sont pas annexés au rapport d'expertise, lequel ne comporte aucun récapitulatif des documents communiqués, alors que les requérants soutiennent pour leur part que Mme X n'a pas bénéficié d'une information préopératoire suffisante sur les risques de l'intervention du 29 septembre 2006 ; que, compte tenu de l'ensemble des éléments ainsi relevés, la mesure d'expertise sollicitée par M. et Mme X peut, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, être regardée comme présentant un caractère utile au sens des dispositions précitées de l'article R. 532-1 du code de justice administrative ; que, dans ces conditions, il y a lieu d'ordonner une nouvelle expertise médicale aux fins précisées par le dispositif ci-après ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 12-83 du juge des référés du tribunal administratif de Caen en date du 9 mars 2012 est annulée.
Article 2 : Il sera procédé à une expertise médicale contradictoire entre les parties. L'expert sera désigné par le président de la cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 de R. 621-14 du code de justice administrative.
Article 3 : Il aura pour mission :
- d'indiquer précisément quel était l'état de santé de Mme X après l'intervention - une ventriculocisternostomie - pratiquée le 6 juin 2006 au centre hospitalier universitaire de Caen ;
- de préciser, compte tenu du volume et de la localisation du méningiome dont était atteinte Mme X, quelle pouvait être l'évolution prévisible de sa tumeur après la première intervention subie le 6 juin 2006, en l'absence de toute nouvelle intervention ;
- de préciser, en cas d'évolution prévisible défavorable de la tumeur, s'il existait d'autres alternatives thérapeutiques que celle consistant en l'ablation du méningiome qui a été pratiquée le 29 septembre 2006 ;
- de répondre, notamment par la production de tout document permettant de l'établir, à la question de savoir si Mme X a été informée des risques opératoires liés à la localisation particulière de la lésion et de l'englobement de sa vertébrale.
Article 4 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Ghislaine et M. Denis X et au centre hospitalier universitaire de Caen.
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N° 12NT00929 2
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