Vu la décision n° 341194 du 10 octobre 2011, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes le 17 octobre 2011 sous le n° 11NT02761, par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté pour le comité d'établissement de la société Valéo Systèmes Electriques d'Angers, renvoyé le jugement de l'affaire devant la même cour, après annulation de son arrêt du 15 avril 2010 ;
Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2009, présentée pour le comité d'établissement de la société Valéo Systèmes Electriques d'Angers, dont le siège est situé 6, rue François Severt, BP 1014 à Angers (49015), par Me Berkouche, avocat au barreau de Paris ; le comité d'établissement de la société Valéo Systèmes Electriques d'Angers demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 05-5052 du 13 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 août 2004 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale refusant d'inscrire l'établissement Valéo "équipements électriques moteur" d'Angers sur la liste des établissements ouvrant droit au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante pour la période postérieure à l'année 1996 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;
3°) d'enjoindre à l'Etat d'inscrire l'établissement Valéo "équipements électriques moteur" d'Angers sur la liste des établissements ouvrant droit au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante à partir de l'année 1997, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;
Vu le décret n° 96-98 du 7 février 1996 modifié relatif à la protection des travailleurs contre les risques d'inhalation de poussières d'amiante ;
Vu le décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996 relatif à l'interdiction de l'amiante pris en application du code du travail et du code de la consommation ;
Vu les arrêtés du 1er août 2001 et du 12 août 2002 modifiant la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 octobre 2012 :
- le rapport de M. Millet, président-assesseur ;
- les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;
- les observations de Me Salquain, avocat du comité d'établissement de la société Valéo Systèmes Electriques d'Angers ;
- et les observations de Me Bonnard, substituant Me Bouthors, avocat de la société Valéo Systèmes Electriques ;
1. Considérant que le comité d'établissement de la société Valéo Systèmes Electriques d'Angers relève appel du jugement du 13 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 août 2004 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale refusant d'inscrire l'établissement Valéo "équipements électriques moteur" d'Angers sur la liste des établissements ouvrant droit au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante pour la période postérieure à l'année 1996 ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;
3. Considérant qu'aux termes du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable en l'espèce : "Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : / 1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante ; / 2° Avoir atteint un âge déterminé, qui pourra varier en fonction de la durée du travail effectué dans les établissements visés au 1° sans pouvoir être inférieur à cinquante ans ; / 3° S'agissant des salariés de la construction et de la réparation navales, avoir exercé un métier figurant sur une liste fixée par arrêté conjoint des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget. (...)" ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'établissement de la société Valéo Systèmes électriques situé à Angers, créé en 1973 pour la fabrication d'alternateurs, de régulateurs électroniques et de modules d'allumage pour les véhicules automobiles, s'est spécialisé à compter de 1990 dans la rénovation d'alternateurs et de démarreurs ; qu'à compter de l'année 1997, en raison de l'entrée en vigueur du décret du 24 décembre 1996 qui a interdit la fabrication, la transformation, la vente, l'importation, la mise sur le marché national et la cession à quelque titre que ce soit de toute variété de fibres d'amiante, l'établissement s'est réorganisé en triant les alternateurs et démarreurs pour isoler ceux contenant de l'amiante et procéder à leur désamiantage ; que cet établissement a été inscrit, en application des dispositions précitées du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante par un premier arrêté interministériel du 1er août 2000 pour une période allant de 1990 à 1996, laquelle a été élargie à la période de 1973 à 1996 par un second arrêté interministériel du 12 août 2002 ; que le comité d'établissement a sollicité du ministre chargé du travail la prorogation, au-delà de l'année 1996, de la période au titre de laquelle les salariés sont susceptibles, en vertu des dispositions du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, de bénéficier de cette allocation ; que, par une décision du 23 août 2004, le ministre a rejeté cette demande, aux motifs, d'une part, qu'au-delà de 1996, l'établissement avait été soumis à la réglementation interdisant l'utilisation de l'amiante et, d'autre part, que les salariés de l'établissement reconnus atteints d'une maladie professionnelle liée à l'amiante pouvaient à titre individuel, bénéficier d'une cessation anticipée d'activité ;
5. Considérant, toutefois, que ni les termes de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ni, d'ailleurs, les travaux préparatoires à l'adoption de cette disposition législative, ni aucune autre disposition ne conduisent à exclure que les périodes au titre desquelles le droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité est ouvert aux salariés concernés puissent comprendre des années postérieures à 1996, alors même qu'ont été adoptées, par les décrets des 7 février et 24 décembre 1996, des dispositions, assorties de sanctions pénales, visant respectivement à protéger les travailleurs contre les risques liés à l'inhalation de poussières d'amiante et à interdire, sauf à titre exceptionnel ou temporaire, la fabrication de fibres d'amiante ou leur incorporation dans des produits ; qu'ainsi, la décision contestée du ministre du 23 août 2004 est entachée d'une erreur de droit ;
6. Mais considérant que, pour établir que sa décision est légale, le ministre a invoqué, dans son mémoire en défense devant les premiers juges et dans son mémoire en défense devant la cour, lesquels ont été communiqués au comité d'établissement requérant, le motif tiré de ce que les activités développées à partir de l'année 1997 de tri des pièces et de désamiantage de celles contenant de l'amiante n'étaient pas des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante et ne revêtaient pas une importance significative ; qu'il résulte de l'instruction que les activités de démontage, de tri des pièces détachées de véhicules pour remplacer celles contenant de l'amiante par des composants neufs n'en comprenant pas, ne sauraient être regardées comme des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante au sens des dispositions du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ; que si le comité requérant soutient qu'en raison des défaillances du tri, des composants amiantés peuvent ne pas être identifiés et être utilisés pour la fabrication de pièces, il ne l'établit toutefois pas ; qu'il ressort des pièces du dossier que le ministre aurait pris la même décision s'il avait entendu initialement se fonder sur ce motif, qui était de nature à justifier légalement la décision litigieuse ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le comité d'établissement de la société Valéo Systèmes Electriques d'Angers n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fins d'injonction et d'astreinte :
8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête du comité d'établissement de la société Valéo Systèmes Electriques d'Angers, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions dudit comité tendant à ce qu'il soit enjoint sous astreinte à l'Etat d'inscrire l'établissement Valéo "équipements électriques moteur" d'Angers sur la liste des établissements ouvrant droit au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante à partir de l'année 1997, ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le comité d'établissement de la société Valéo Systèmes Electriques d'Angers demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du comité d'établissement de la société Valéo Systèmes Electriques d'Angers est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au comité d'établissement de la société Valéo Systèmes Electriques d'Angers, à la société Valéo Systèmes Electriques et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
''
''
''
''
2
N° 11NT02761