Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 mai et 21 juillet 2011, présentés pour M. Mourad A, demeurant ..., par Me Lebacq, avocat au barreau de Paris ; M. A demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1002215 du 24 mars 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du ministre de l'intérieur retirant quatre fois deux points de son permis de conduire à la suite des infractions commises les 21 octobre 2008, 31 mars 2009, 11 mars 2010 et 22 mars 2010 et de la décision en date du 18 juin 2010 l'informant de la perte de validité de son permis de conduire ;
2°) d'annuler lesdites décisions ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui restituer les points illégalement retirés ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 900 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu le code pénal ;
Vu le code de la route ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2012 le rapport de M. Etienvre, premier conseiller ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
1. Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues auxdits articles, lesquelles constituent une garantie essentielle permettant à l'intéressé de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information ;
2. Considérant, en premier lieu, que le ministre a produit les procès-verbaux des infractions commises les 21 octobre 2008, 31 mars 2009 et 11 mars 2010, signés par M. A et par les agents verbalisateurs, qui comportent la mention pré-imprimée selon laquelle le contrevenant reconnaît avoir reçu la carte de paiement et l'avis de contravention ; que ces avis de contravention, qui constituent le deuxième volet du formulaire utilisé pour la constatation et le paiement des contraventions soumises à la procédure de l'amende forfaitaire, conservés par M. A, comportent l'ensemble des informations exigées par les dispositions précitées du code de la route ; qu'il s'ensuit que l'administration doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant apporté la preuve qu'elle a satisfait à l'obligation d'information ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cette formalité lors des infractions des 21 octobre 2008, 31 mars 2009 et 11 mars 2010 doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que lorsqu'une contravention soumise à la procédure de l'amende forfaitaire est relevée avec interception du véhicule et donne lieu au paiement immédiat de l'amende entre les mains de l'agent verbalisateur, le contrevenant se voit remettre non les documents régis par les dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale mais, en application de l'article R. 49-2 du même code, une quittance de paiement ; que le modèle de cette quittance comporte une information suffisante au regard des exigences résultant des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, qui doit être regardée comme ayant été délivrée préalablement au paiement de l'amende dès lors que le contrevenant conserve la faculté de renoncer à la modalité du paiement immédiat de l'amende avant de procéder à la signature de la quittance ou, le cas échéant, d'inscrire sur celle-ci une réserve sur les modalités selon lesquelles l'information lui avait été délivrée ; qu'en conséquence, il incombe à l'administration d'apporter la preuve, par la production de la souche de la quittance dépourvue de réserve sur la délivrance de l'information, que celle-ci est bien intervenue préalablement au paiement ;
4. Considérant que s'il ressort des mentions du relevé d'information intégral relatif à la situation du permis de conduire de M. A que le paiement de l'amende forfaitaire relative à l'infraction du 22 mars 2010 est intervenu le même jour que son constat, le ministre de l'intérieur ne produit pas la souche de la quittance faisant apparaître que l'information a été délivrée à l'intéressé et n'établit pas, par suite, que celle-ci est intervenue préalablement au paiement ; qu'en conséquence, la décision de retrait de points consécutive à l'infraction du 22 mars 2010 est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière et doit être annulée ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 223-1 applicable au permis de conduire de M. A : "(...) II. - A la date d'obtention du permis de conduire, celui-ci est affecté d'un nombre initial de six points. Au terme de chaque année du délai probatoire défini à l'article L. 223-1, si aucune infraction ayant donné lieu à retrait de points n'a été commise depuis le début de la période probatoire, ce permis de conduire est majoré de deux points (...)" ;
6. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le permis de conduire probatoire de M. A était doté d'un capital de huit points le 17 janvier 2009 ; qu'eu égard à l'annulation du retrait de deux points intervenu à la suite de l'infraction du 22 mars 2010, le solde du capital de points du titre de conduite probatoire de M. A n'était pas nul lorsque le ministre de l'intérieur l'a, par sa décision contestée du 18 juin 2010, informé de sa perte de validité ; qu'il y a lieu de prononcer l'annulation de cette décision ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision portant retrait de deux points de son permis de conduire probatoire suite à l'infraction commise le 22 mars 2010 et, par voie de conséquence, de la décision du 18 juin 2010 constatant l'invalidité de son permis de conduire ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;
9. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le ministre de l'intérieur procède, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, à la restitution de deux points au capital de points affectés au permis de conduire de M. A, sous réserve que l'intéressé n'ait pas commis de nouvelles infractions de nature à constituer un obstacle à ladite restitution ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A de la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La décision du 18 juin 2010 du ministre de l'intérieur en tant qu'elle porte retrait de deux points du permis de conduire probatoire de M. A consécutif à l'infraction du 22 mars 2010 et l'informe de la perte de validité de son permis de conduire est annulée.
Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de reconstituer le capital du permis de conduire de M. A en lui restituant deux points dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous réserve que l'intéressé n'ait pas commis de nouvelles infractions de nature à constituer un obstacle à ladite restitution.
Article 3 : Le jugement en date du 24 mars 2011 du tribunal administratif d'Orléans est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mourad A et au ministre de l'intérieur.
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N°11NT01438 2
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