Vu la requête, enregistrée le 12 juin 2012, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Cailar, avocat au barreau de Nîmes ; M. B... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 110738 du 6 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 août 2010 du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ajournant à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que de la décision du 27 octobre 2010 rejetant son recours gracieux ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;
3°) d'enjoindre au ministre chargé des naturalisations de procéder à l'examen de santé prévu par l'article 36 paragraphe 3 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 et de lui accorder le bénéfice de la nationalité française ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient :
- que la décision litigieuse du 5 août 2010 a été signée par une autorité incompétente ;
- que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que le ministre n'avait pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'en effet, son état de santé constitue le seul frein à l'acquisition d'une autonomie matérielle ; qu'il souffre de plusieurs affections qui ne lui permettent plus d'exercer une activité professionnelle normale ; qu'il a été reconnu comme travailleur handicapé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées pour la période du 1er avril 2008 au 1er avril 2013 ; qu'en outre, le tribunal de l'incapacité lui a reconnu un taux d'incapacité de 40 % et que le médecin expert désigné pour son action devant la cour nationale de l'incapacité lui a reconnu un taux d'incapacité de 60 % en indiquant qu'il n'est pas dans l'incapacité de se procurer un emploi dépourvu d'effort physique ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 septembre 2012, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient :
- que l'auteur de la décision du 5 août 2010 disposait d'une délégation de signature régulière ;
- que M. B... ne démontre pas être dans l'incapacité définitive d'exercer toute activité rémunérée ; qu'en outre, sa décision n'est pas fondée sur le défaut d'insertion professionnelle de l'intéressé mais sur son absence de ressources personnelles, dès lors que ses seules ressources sont constituées du revenu minimum d'insertion et de diverses prestations sociales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 janvier 2013 :
- le rapport de M. Iselin, président-rapporteur ;
1. Considérant que M. B..., de nationalité marocaine, interjette appel du jugement du 6 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 août 2010 du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ajournant à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que de la décision du 27 octobre 2010 rejetant son recours gracieux ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité externe :
2. Considérant qu'il ressort des pièces dossier que par une décision du 21 juillet 2009, régulièrement publiée au Journal officiel de la République française du 25 juillet 2009,
M. C..., directeur de l'accueil, de l'intégration et de la citoyenneté au ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, a donné délégation à M. Jean-Michel Giraudet, conseiller d'administration des affaires sociales au second bureau des naturalisations, pour signer, au nom du ministre, tous actes, arrêtés et décisions, à l'exclusion des décrets, dans la limite des attributions qui lui sont confiées, au nombre desquelles figure l'ajournement des demandes de naturalisation ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée doit être écarté ;
En ce qui concerne la légalité interne :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations d'apprécier l'opportunité d'accorder ou non la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le degré d'insertion professionnelle du postulant ainsi que le niveau et la stabilité de ses ressources ;
4. Considérant que pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation de
M. B..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé sur la circonstance que son autonomie matérielle n'est pas réalisée dans la mesure où ses ressources sont actuellement tirées, pour l'essentiel, de prestations sociales ;
5. Considérant qu'il n'est pas contesté qu'à la date des décisions litigieuses, le requérant n'exerçait pas d'activité professionnelle et ne tirait ses revenus, pour l'essentiel, que de prestations sociales ; que si M. B... soutient, pour justifier l'insuffisance de ses ressources, qu'il est âgé de 51 ans, qu'il a été reconnu comme travailleur handicapé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées pour la période du 1er avril 2008 au 1er avril 2013 et que le tribunal du contentieux de l'incapacité lui a reconnu un taux de 40 %, lequel a été estimé à 60 % par le médecin expert désigné par la cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis émis par ce médecin expert, que l'intéressé n'est pas inapte à l'exercice de toute profession, en dépit de la restriction substantielle pour l'accès à l'emploi qui lui a été reconnue ; qu'ainsi, le ministre a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, ajourner à deux ans la demande de naturalisation de M. B... en se fondant sur le motif tiré de son absence d'autonomie matérielle ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de M. B... , n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions présentées par l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de lui accorder le bénéfice de la nationalité française ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 11 janvier 2013 à laquelle siégeaient :
- M. Iselin, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- M. Durup de Baleine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er février 2013.
Le président-assesseur,
J.-F. MILLETLe président-rapporteur,
B. ISELIN
Le greffier,
F. PERSEHAYE
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N° 12NT01570 2
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