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27/12/2013 | FRANCE | N°13NT00616

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 27 décembre 2013, 13NT00616


Vu le recours, enregistré le 25 février 2013, présenté pour le ministre de l'intérieur, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105437 du 20 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 14 mars 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté la demande de réintégration dans la nationalité française présentée par M. A... ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris ;

il fait val

oir que :

- l'exactitude matérielle des motifs de la décision du 14 mars 2011 n'est pa...

Vu le recours, enregistré le 25 février 2013, présenté pour le ministre de l'intérieur, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105437 du 20 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 14 mars 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté la demande de réintégration dans la nationalité française présentée par M. A... ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris ;

il fait valoir que :

- l'exactitude matérielle des motifs de la décision du 14 mars 2011 n'est pas sérieusement contestée ;

- des faits d'exhibition sexuelle et de prostitution sont d'une gravité suffisante pour justifier un refus de naturalisation ;

- M. A... ne rapporte pas la preuve qu'il dispose de son autonomie matérielle ;

- à titre subsidiaire, il y aurait lieu de procéder à une substitution de motifs eu égard au

défaut d'insertion professionnelle du postulant, qui n'est pas dans l'impossibilité de travailler ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 2 avril 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes a constaté le maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle au bénéfice de M. A... ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 juillet 2013, présenté pour M. A... par Me Follope, avocat au barreau de Nantes, qui conclut au rejet du recours présenté par le ministre de l'intérieur ;

il fait valoir que :

- il ne saurait lui être imputé des allégations mensongères ;

- il n'a fait l'objet d'aucun jugement ni d'aucune condamnation ;

- les faits en cause sont particulièrement anciens ;

- la demande de substitution de motifs ne peut être accueillie ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 août 2013, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut aux mêmes fins que son recours, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 novembre 2013, présenté pour M. A..., qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 93-1362 du relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 décembre 2013 :

- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

- et les observations de Me Follope, avocat de M. A... ;

Sur le recours du ministre de l'intérieur :

1. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; que selon l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;

2. Considérant que, pour rejeter la demande de réintégration dans la nationalité française présentée par M. A..., ressortissant algérien né en 1962, le ministre de l'intérieur s'est fondé sur les circonstances, d'une part, que l'intéressé a séjourné irrégulièrement en France de 2001 à 2002 ainsi que de 2004 à 2005 et a fait l'objet en 1993 d'une procédure pour étranger en situation irrégulière et, d'autre part, qu'il a fait l'objet en 1987 d'une procédure pour exhibition sexuelle et en 1993 d'une procédure pour prostitution sur la voie publique ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier du rapport d'enquête émanant de la direction de la police générale de la Préfecture de police et qui présente un caractère probant, que M. A... a fait l'objet le 6 août 1993 à Clichy d'une procédure des services de police en raison de sa présence en France sans titre de séjour en cours de validité ; qu'en dépit de son affirmation selon laquelle il ne serait arrivé en France qu'en 2001, il ne conteste pas qu'il y séjournait irrégulièrement en 1993 ; qu'il y a également séjourné dans des conditions irrégulières entre le 18 janvier 2001 et le 19 février 2002 ; qu'en outre, il est également établi que le postulant a été interpellé à Paris le 22 août 1987 pour s'être livré à la prostitution avec exhibition sexuelle et qu'il l'a été à nouveau le 1er mai 1993 en raison de faits de prostitution sur la voie publique ; qu'eu égard à la nature et au caractère répété de ces faits, le ministre chargé des naturalisations n'a, dans l'exercice du large pouvoir dont il dispose pour apprécier l'opportunité d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite, pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ; que le ministre de l'intérieur est ainsi fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler la décision du 14 mars 2011, les premiers juges l'ont estimée entachée d'une telle erreur ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la connaissance par l'administration des faits mentionnés au point 3. ci-dessus, commis par M. A... en 1987 et 1993, résulte de l'enquête effectuée, conformément aux dispositions de l'article 36 du décret du 30 décembre 1993, par les services de police, qui sont placés sous l'autorité du ministre chargé des naturalisations et qui sont en droit, pour les besoins d'une telle enquête, de consulter leurs propres archives ; qu'il n'est pas établi que cette connaissance résulterait de la consultation d'un fichier automatisé établi et tenu dans des conditions irrégulières ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que les faits commis par M. A... en 1987 et 1993 n'auraient pas donné lieu à des poursuites ou à des condamnations pénales est sans influence sur la légalité de la décision contestée, qui est seulement fondée sur la matérialité de ces faits ;

7. Considérant, en troisième lieu, que, si le ministre ne conteste pas que M. A... aurait séjourné dans des conditions régulières en France en 2004 et 2005, il résulte toutefois de l'instruction qu'il aurait pris la même décision en se fondant sur les autres renseignements défavorables dont fait état la décision du 14 mars 2011 ;

8. Considérant, en quatrième et dernier lieu, que, si M. A... soutient qu'il a en France le centre de ses intérêts et qu'il satisfait aux conditions énoncées à l'article 21-23 du code civil, les circonstances ainsi invoquées sont toutefois sans incidence sur la légalité de la décision rejetant sa demande de réintégration ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions tendant à ce que, sous astreinte, il soit ordonné au ministre de l'intérieur de faire droit à la demande de réintégration dans la nationalité française présentée par M. A... ou de la réexaminer ne peuvent être accueillies ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 décembre 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Iselin, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 décembre 2013.

Le rapporteur,

A. DURUP de BALEINE

Le président,

B. ISELIN

Le greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT00616 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT00616
Date de la décision : 27/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ISELIN
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP de BALEINE
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : FOLLOPE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-12-27;13nt00616 ?
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