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21/02/2014 | FRANCE | N°12NT03299

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 21 février 2014, 12NT03299


Vu la requête, enregistrée le 20 décembre 2012, présentée pour Mme C...E..., demeurant..., par Me A... ; Mme E... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101722 du 17 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 5 novembre 2010 par lequel le maire de Saint-Mars-du-Désert a accepté sa démission et de la décision du 3 février 2011 rejetant son recours tendant au retrait de cet arrêté et à l'indemnisation des préjudices subis, et d'autre part à la condamnation de la commune

à lui verser la somme de 29 734,48 euros au titre des préjudices qu'elle e...

Vu la requête, enregistrée le 20 décembre 2012, présentée pour Mme C...E..., demeurant..., par Me A... ; Mme E... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101722 du 17 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 5 novembre 2010 par lequel le maire de Saint-Mars-du-Désert a accepté sa démission et de la décision du 3 février 2011 rejetant son recours tendant au retrait de cet arrêté et à l'indemnisation des préjudices subis, et d'autre part à la condamnation de la commune à lui verser la somme de 29 734,48 euros au titre des préjudices qu'elle estime avoir subis ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2010 et la décision du 3 février 2011 du maire de Saint-Mars-du-Désert ;

3°) de condamner la commune de Saint-Mars-du-Désert à lui verser la somme de 29 734,48 euros assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Mars-du-Désert le versement à son avocat de la somme de 1 700 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la décision contestée n'avait pas à être motivée dès lors que, s'agissant d'une décision administrative défavorable, l'administration était soumise aux obligations de la loi du 11 juillet 1979 ;

- son consentement était vicié et elle ne pouvait, en raison de son état dépressif, apprécier la portée de sa démarche ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé qu'elle n'établissait pas que son état de santé avait altéré son discernement dans la mesure où elle était soignée pour syndrome dépressif avec asthénie ;

- elle ne souhaitait pas quitter de manière définitive l'administration et avait suivi des formations pour s'orienter vers la filière administrative ;

- l'administration ne lui a pas indiqué les conséquences de sa démission alors qu'elle se trouvait dans une situation financière précaire ;

- l'illégalité de la décision contestée constitue une faute ouvrant droit à réparation tant sur le préjudice économique que sur le préjudice moral ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 avril 2013, présenté pour la commune de Saint-Mars-du-Désert, représentée par son maire, par Me D..., qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la requérante la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761 du code de justice administrative ;

elle fait valoir que :

- en l'absence de tout vice de consentement l'arrêté du 5 novembre 2011 n'était pas une décision individuelle défavorable et n'avait pas à être motivé ;

- la requérante se borne à reprendre l'argumentation défendue en première instance ;

- les certificats médicaux qu'elle produit ne sont pas de nature à établir qu'au vu de son état de santé elle n'était pas en mesure d'apprécier la portée de sa décision ; ainsi son discernement n'a pas été altéré ;

- l'administration a informé Mme E... des conséquences de son acte ;

- la requérante souhaitait être employée sur un poste ne correspondant pas à ses aptitudes et n'a fait l'objet d'aucun harcèlement ;

Vu l'ordonnance en date du 29 novembre 2013 fixant la clôture d'instruction au 30 décembre 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu la décision du 27 février 2013 rectifiée le 4 avril 2013 du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes

admettant Mme E... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2014 :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

- et les observations de Me Berrezai, avocat de la commune de Saint-Mars-du-Désert ;

1. Considérant que Mme E..., agent technique territorial de 2ème classe employée par la commune de Saint-Mars-du-Désert, a présenté sa démission le 27 octobre 2010 ; que, par arrêté du 5 novembre 2010, le maire a accepté cette démission et l'a radiée des cadres à compter du 27 octobre 2010 ainsi qu'elle le sollicitait ; que, en vue d'obtenir le retrait de cet arrêté et la réparation du préjudice subi du fait de son illégalité, elle a présenté le 20 janvier 2011 une réclamation préalable que le maire a rejetée le 3 février suivant ; qu'elle relève appel du jugement du 17 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions susmentionnées du maire et à la condamnation de la commune à lui verser une somme de 29 734,48 euros en réparation des préjudices invoqués ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 96 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : " La démission ne peut résulter que d'une demande écrite du fonctionnaire marquant sa volonté non équivoque de cesser ses fonctions. Elle n'a d'effet qu'autant qu'elle est acceptée par l'autorité investie du pouvoir de nomination et prend effet à la date fixée par cette autorité. La décision de l'autorité compétente doit intervenir dans le délai d'un mois. L'acceptation de la démission rend celle-ci irrévocable. " ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. " ;

3. Considérant qu'eu égard à la portée d'une démission et à l'exigence qu'elle émane d'une volonté non équivoque de l'agent intéressé puis qu'elle soit explicitement acceptée, la décision prononçant régulièrement une telle acceptation ne constitue pas une décision défavorable au sens des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 et n'a dès lors pas à être motivée en application de cette loi ;

4. Considérant qu'il ressort de l'attestation de la directrice des moyens généraux de la commune que la requérante a été reçue en entretien par cette dernière et le maire le 26 octobre 2010 ; qu'elle a expressément manifesté sa volonté de ne plus exercer les tâches d'entretien afférentes à son grade d'agent technique et de quitter définitivement son emploi ; que Mme E... a confirmé sa position et remis en mains propres sa lettre de démission au maire le 27 octobre 2010, à la suite de la visite médicale constatant son aptitude à reprendre ses fonctions ; qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier des attestations non utilement contestées du directeur général des services de la commune, que celui-ci a reçu Mme E... lors de divers entretiens où ont été notamment évoquées les questions statutaires et les conséquences financières d'une éventuelle démission ; qu'il est constant que ce n'est que le 20 janvier 2011 que l'intéressée a entendu revenir sur sa décision à l'occasion de sa réclamation indemnitaire préalable ; que si elle soutient qu'elle se trouvait dans un état de santé ne lui permettant pas d'apprécier la portée de sa demande, les seuls certificats d'un médecin généraliste se bornant à faire état, sans autres précisions, d'un syndrome dépressif avec asthénie ne sont pas de nature à établir une telle atteinte à ses capacités de discernement, alors surtout qu'elle venait d'être déclarée apte à la reprise de ses fonctions par le médecin du travail ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction qu'elle aurait été victime de harcèlement de la part de son employeur dès lors qu'elle a pu suivre des stages en vue d'une évolution vers la filière administrative qu'elle sollicitait, que la suppression de sa prime technique, indûment perçue, a été compensée par une autre prime, que le refus de détachement sur un poste administratif qui lui a été opposé était justifié en l'absence d'emploi vacant et qu'enfin l'avertissement infligé en raison de son refus de remplacer un autre agent ne revêtait pas un caractère disproportionné ; que, dans ces conditions, Mme E... ne peut être regardée comme ayant présenté sa démission sous la contrainte ;

5. Considérant qu'en l'absence d'illégalité fautive de la part de la commune, les conclusions indemnitaires de la requérante ne peuvent qu'être rejetées ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Mars-du-Désert, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement, par application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée, à l'avocat de Mme E... de la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune de Saint-Mars-du-Désert et de lui allouer la somme demandée sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Mars-du-Désert tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E...et à la commune de Saint-Mars-du-Désert.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- M. Auger, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 février 2014.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. B...

La république mande et ordonne au préfet de Loire-Atlantique, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT03299


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT03299
Date de la décision : 21/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : AIBAR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-02-21;12nt03299 ?
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