Vu la requête, enregistrée le 23 septembre 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Abdollahi Mandolkani, avocat au barreau de Paris ; M. B... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1110411 du 30 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 août 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande de naturalisation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
il soutient que :
- s'il a été titulaire d'une carte de séjour temporaire mention étudiant qui impose par définition une activité salariée accessoire à celle d'étudiant, opposer cette circonstance à sa demande de naturalisation serait contraire à la lettre de la loi et l'intention du législateur ;
- le jugement n'a pas tiré la conséquence de sa qualité de propriétaire qui l'exonère d'une charge telle que le paiement d'un loyer ;
- il exerçait une activité depuis 2008 lui permettant de subvenir largement à ses besoins et a déclaré environ 8 000 euros en 2011 au titre des revenus de 2010 ; il a obtenu un poste correspondant à sa formation universitaire en tant que professeur de musique pour une rémunération mensuelle brute de 1 876 euros ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2013, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;
il soutient que :
- la circonstance selon laquelle M. B... est propriétaire de son logement, en réalité en indivision, ne suffit pas à justifier qu'il disposait, à la date de la décision contestée, de ressources suffisantes pour subvenir durablement à ses besoins ;
- il est fondé à ajourner la demande d'un étudiant, qui n'a pas encore réalisé son insertion professionnelle et ne dispose pas de revenus autonomes stables, alors même qu'il aurait exercé une activité salariée temporaire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 modifié, relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa demande, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 mars 2014 :
- le rapport de M. Iselin, président-rapporteur ;
1. Considérant que M. B..., ressortissant tunisien, interjette appel du jugement du 30 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 août 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le degré d'insertion professionnelle du postulant, ainsi que le niveau et la stabilité de ses ressources ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui est entré en France, en octobre 2004, pour y poursuivre des études supérieures, a obtenu un diplôme de master mention musique et musicologie délivré par l'université Paris IV au titre de l'année universitaire 2005-2006 et qu'il était inscrit en doctorat à l'université de Rouen au titre de l'année universitaire 2010-2011 ; que, parallèlement à ses études, il était employé en qualité d'agent non titulaire par la Bibliothèque nationale de France, pour un horaire de 70 heures par mois, par contrat de trois ans à compter du 1er août 2008 puis pour une durée indéterminée à compter du 1er août 2011, cette activité professionnelle lui procurant une rémunération mensuelle nette d'environ 700 euros selon ses propres écritures ; qu'ainsi, les revenus tirés de son activité ne suffisaient pas à assurer son autonomie ; que la légalité d'une décision administrative s'appréciant à la date à laquelle elle a été prise, le requérant ne peut utilement se prévaloir du changement de sa situation professionnelle et de son embauche par le rectorat de Créteil en qualité de professeur non titulaire du 1er septembre 2012 au 31 août 2013 à temps incomplet pour une rémunération supérieure, intervenus postérieurement à la décision du 4 août 2011 ; que, dans ces conditions et en dépit du fait qu'il dispose de son logement et qu'il s'acquitte de ses obligations fiscales, en ajournant à deux ans sa demande de naturalisation au motif que ses revenus étaient insuffisants pour subvenir durablement à ses besoins, le ministre, qui a fait usage de son large pouvoir d'appréciation de l'opportunité d'accorder la naturalisation sollicitée, n'a pas entaché sa décision d'une erreur de droit ni d'une erreur manifeste ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande de M. B..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que par suite ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, le versement à M. B... de la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 7 mars 2014, à laquelle siégeaient :
- M. Iselin, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- M. Durup de Baleine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 mars 2014.
Le président-assesseur,
J.-F. MILLET
Le président-rapporteur,
B. ISELIN Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
''
''
''
''
2
N° 13NT02722