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30/09/2014 | FRANCE | N°13NT02270

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 30 septembre 2014, 13NT02270


Vu la requête, enregistrée le 1er août 2013, présentée pour l'association "Comité de liaison du camping-car", dont le siège est sis 3-5 rue des Cordelières à Paris (75013), par Me D... ; l'association "Comité de liaison du camping-car " demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201694 du 13 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Granville a refusé d'abroger les arrêtés des 22 juillet 2004, 10 avril 2007 et 15 avril 2011 réglementant la ci

rculation et le stationnement des véhicules habitables sur le territoire ...

Vu la requête, enregistrée le 1er août 2013, présentée pour l'association "Comité de liaison du camping-car", dont le siège est sis 3-5 rue des Cordelières à Paris (75013), par Me D... ; l'association "Comité de liaison du camping-car " demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201694 du 13 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Granville a refusé d'abroger les arrêtés des 22 juillet 2004, 10 avril 2007 et 15 avril 2011 réglementant la circulation et le stationnement des véhicules habitables sur le territoire de la commune ;

2°) d'annuler ces arrêtés et cette décision ;

3°) d'enjoindre au maire de Granville d'abroger les arrêtés précités dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et de procéder à l'enlèvement des panneaux de signalisation afférents ainsi que des barres de hauteur ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Granville une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens ;

elle soutient que :

- sa requête d'appel est recevable ;

- l'arrêté du 15 avril 2011 est insuffisamment motivé et n'apporte aucun élément sur les troubles et désordres rendant nécessaire une interdiction ;

- une discrimination est opérée entre les autocaravanes et les autres véhicules relevant de la catégorie M1 alors qu'ils ont le même gabarit pouvant comporter 8 places assises maximum ;

- la notion d'impact visuel sur laquelle s'appuie le maire est subjective et ne repose sur aucun fondement juridique ; la gêne pour les activités commerciales et l'atteinte à la sécurité des piétons, notamment en termes de gabarit, ne sont pas démontrées ;

- les éventuelles incivilités dues à des propriétaires de véhicules sommairement aménagés relèvent des dispositions de l'article R. 632-1 du code pénal ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'interdiction de stationnement ne revêtait pas un caractère général et absolu et n'était pas constitutive d'une rupture d'égalité ;

- aucun élément ne justifie les interdictions de stationnement tant de jour que de nuit ; les mesures édictées par le maire sont donc disproportionnées ;

- les panneaux d'interdiction installés en application des arrêtés contestés ne sont pas conformes à la réglementation applicable ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 février 2014, présenté pour la commune de Granville, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'association requérante la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle fait valoir que :

- l'arrêté du 10 avril 2007 ayant été abrogé par celui du 15 avril 2011, les conclusions à fin d'annulation le concernant sont sans objet de même que celles concernant les arrêtés précédents non produits en première instance ;

- au vu des dispositions de l'article L. 2213-4 du code général des collectivités territoriales, visées dans l'arrêté du 15 avril 2011, le maire pouvait prendre les mesures contestées au motif d'assurer la protection esthétique de la Pointe du Roc, site de qualité, inscrit à l'inventaire des sites ;

- contrairement aux autre véhicules relevant de la catégorie M1, les autocaravanes sont des véhicules habitables où leurs occupants peuvent passer la nuit et ont donc vocation à stationner plus longtemps, justifiant ainsi les interdictions contestées ;

- les falaises et la haute ville de Granville sont inscrits à l'inventaire des sites dont la conservation présente, au point de vue historique, scientifique, légendaire ou pittoresque un intérêt général, ce qui justifie une protection renforcée ; la pratique du camping et du caravanage y est interdite ; avant les mesures en litige, le stationnement de camping-cars portait atteinte à l'esthétique et au caractère paysager du site ;

- le caractère gênant pour les commerces, notamment l'aquarium, est avéré de même que la dangerosité pour les piétons ;

- l'arrêté litigieux ne revêt pas un caractère de généralité absolue et les propriétaires de camping-cars disposent d'emplacement dédiés ;

- la demande d'enlèvement des panneaux de signalisation et barres de hauteur est nouvelle en appel ;

- l'instruction ministérielle dont se prévaut l'association requérante est dénuée de valeur réglementaire ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 mars 2014, présenté pour l'association " Comité de liaison du camping-car ", qui conclut aux mêmes fins que précedemment, par les mêmes moyens ;

elle soutient en outre que :

- elle avait expressément demandé à la commune de Granville, par courrier du 26 avril 2012, l'enlèvement de la signalisation relative aux mesures contestées ;

- la photographie produite par la commune ne permet pas d'établir que le stationnement des camping-cars dégrade le parking de l'Arsenal ;

- la gêne vis-à-vis des commerçants dont se prévaut la commune n'est pas avérée ; elle ne peut fonder les interdictions contestées sur d'éventuels comportements individuels en ce qui concerne des nuisances dues à des vidanges sauvages ; la dangerosité vis-à-vis des piétons n'est pas établie ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2014, présenté pour la commune de Granville, qui persiste dans ses précédentes conclusions et fait également valoir que :

- la photographie qu'elle a produite est suffisamment parlante pour justifier de l'impact visuel dû à une concentration de camping-cars ;

- le document graphique qu'elle verse aux débats démontre que les mesures en litige ne concernent qu'une petite partie du territoire communal ;

Vu le courrier en date du 24 juin 2014 adressé aux parties en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 juin 2014, présenté pour l'association " Comité de liaison du camping-car ", qui conclut aux mêmes fins, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 juillet 2014, présenté pour la commune de Granville qui persiste dans ses dernières conclusions ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 septembre 2014 :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

- et les observations de Me B...pour l'association "Comité de liaison du camping-car" ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 30 janvier 2013, présentée pour l'association " Comité de liaison du camping-car " ;

1. Considérant que l'association "Comité de liaison du camping-car" relève appel du jugement du 13 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de la commune de Granville sur sa demande, reçue le 30 avril 2012, tendant à l'abrogation des arrêtés des 22 juillet 2004, 10 avril 2007 et 15 avril 2011 réglementant le stationnement des véhicules habitables sur le territoire de la commune ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance :

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales : " Le maire peut, par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement : / 1° Interdire à certaines heures l'accès de certaines voies de l'agglomération ou de certaines portions de voie ou réserver cet accès, à certaines heures, à diverses catégories d'usagers ou de véhicules (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2213-4 du même code : " Le maire peut, par arrêté motivé, interdire l'accès de certaines voies ou de certaines portions de voies ou de certains secteurs de la commune aux véhicules dont la circulation sur ces voies ou dans ces secteurs est de nature à compromettre soit la tranquillité publique, soit la qualité de l'air soit la protection des espèces animales ou végétales, soit la protection des espaces naturels, des paysages ou des sites ou leur mise en valeur à des fins esthétiques, économiques agricoles, forestières ou touristiques " ; qu'en application de ces dispositions, le maire de Granville a, successivement, interdit le stationnement des poids-lourds, caravanes ou autocaravanes et camping-cars sur le parking situé à la Pointe du Roc et sur le parking de l'Arsenal, interdit le stationnement des autocaravanes place Guépratte et Cale d'Hacqueville, interdit le stationnement de ces mêmes véhicules du 1er juillet au 31 août de chaque année rue du Port, quai Amiral Pléville-Lepelley ainsi qu'entre le quai du Pan Coupé et le rond-point d'Orléans et interdit leur stationnement de 21 heures à 7 heures du matin boulevard Vaufleury, place d'Armes, rue Le Mengnonnet, rue Saint-Pierre et rue Saint-Louis ;

3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 15 avril 2011 vise notamment les dispositions précitées et mentionne les exigences de la protection esthétique du site classé de la Pointe du Roc, l'existence d'une aire de stationnement d'environ trente places spécialement réservée aux autocaravanes rue du Roc, l'impact des véhicules à fort gabarit sur le promontoire du Roc, la gêne pour l'activité commerciale et la sécurité des piétons que constitue le stationnement répété d'autocaravanes formant écran dans certaines rues en raison de leur volume, le caractère spécifique de ces véhicules qui permettent à leurs occupants d'y passer la nuit et la circonstance que l'étroitesse de certaines rues ne permet pas le stationnement de véhicules à fort gabarit ; qu'il comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui le fondent et se trouve suffisamment motivé au regard des dispositions de l'article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que si la commune défenderesse n'établit pas que le stationnement des autocaravanes entraînerait des inconvénients significatifs pour l'activité commerciale et la sécurité des piétons, il n'est pas contesté que les falaises de Granville et la haute ville ont été inscrites à l'inventaire des sites par arrêtés des 5 février 1936 et 20 février 1976 pris sur le fondement de l'article 4 de la loi du 2 mai 1930, dont est issu l'article L. 341-1 du code de l'environnement aux termes duquel " Il est établi dans chaque département une liste des monuments naturels et des sites dont la conservation ou la préservation présente, au point de vue artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, un intérêt général (...) " ; qu'eu égard à l'intérêt de la protection de cet environnement et à son importance touristique, le maire de Granville n'a commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales en justifiant les mesures de restriction du stationnement des véhicules habités par la protection esthétique de la pointe du Roc contre les nuisances, en particulier visuelles, qu'un stationnement incontrôlé de camping-cars ou autres véhicules assimilés était susceptible d'entrainer ; qu'il ressort des pièces du dossier que le maire aurait pris les mêmes décisions s'il ne s'était fondé que sur ce dernier motif ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des deux documents graphiques produits par la commune, que l'interdiction estivale de stationnement est limitée au centre du secteur constitué par la partie est du port ; que l'interdiction du stationnement de nuit ne concerne que l'intérieur de la ville haute ; qu'une aire de stationnement d'une trentaine de places demeure réservée aux autocaravanes, rue du Roc sur le promontoire rocheux, sans qu'il soit démontré que les places disponibles seraient insuffisantes ; que, dans ces conditions, les limitations apportées au stationnement des véhicules habités ne revêtent pas le caractère d'interdictions d'une généralité excessive par rapport aux fins recherchées ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que l'arrêté du 15 avril 2011 interdit le stationnement de nuit des véhicules habitables à l'intérieur de la ville haute ; que le maire de Granville a pu, sans commettre de discrimination illégale, appliquer des règles de stationnement nocturne différentes de celles applicables aux autres véhicules ainsi que des horaires différenciés entre périodes diurnes et nocturnes dès lors que ces véhicules, en raison précisément de leur caractère habitable, permettent à leurs occupants d'y passer la nuit ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier ; qu'en raison de l'aménagement intérieur spécifique des camping-cars, les dispositions en litige n'ont donc pas établi de discrimination illégale par rapport aux autres véhicules de catégorie M1 au sens de l'article R. 311-1 du code de la route ;

8. Considérant, enfin, que si l'association requérante soutient que les panneaux d'interdiction utilisés pour matérialiser les interdictions édictées ne sont pas conformes à la réglementation applicable, cette circonstance, à la supposer même établie, est sans influence sur la légalité des arrêtés en cause ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association "Comité de liaison du camping-car" n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de l'association "Comité de liaison du camping-car" tendant à l'annulation du refus d'abrogation des arrêtés des 22 juillet 2004, 10 avril 2007 et 15 avril 2011 du maire de Granville n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction de l'intéressée ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Granville, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'association "Comité de liaison du camping-car" demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de l'association "Comité de liaison du camping-car" une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature exposés par la commune de Granville ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association "Comité de liaison du camping-car" est rejetée.

Article 2 : L'association " Comité de liaison du camping-car " versera à la commune de Granville une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association "Comité de liaison du camping-car" et à la commune de Granville.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M.C..., faisant fonction de premier conseiller,

- M. Auger, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 septembre 2014.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. A...

La république mande et ordonne au préfet de la Manche, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT02270


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT02270
Date de la décision : 30/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SELARL PEISSE DUPICHOT LAGARDE BOTHOREL ET ASSOCIES ; SELARL PEISSE DUPICHOT LAGARDE BOTHOREL ET ASSOCIES ; AMSON ; SELARL PEISSE DUPICHOT LAGARDE BOTHOREL ET ASSOCIES ; AMSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-09-30;13nt02270 ?
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