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13/02/2015 | FRANCE | N°14NT00353

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 13 février 2015, 14NT00353


Vu la requête, enregistrée le 13 février 2014, présentée pour M. F... C..., demeurant..., par Me Eisenbeth, avocat, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1109083 du 3 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours contre la décision du consul général de France à Conakry du 12 octobre 2010 refusant de délivrer des visas de long séjour aux enfants MohamedC..., M

ariamC..., RamatoulayeC..., Fatoumata C...et N'KoyaA... ;

2°) d'annuler ...

Vu la requête, enregistrée le 13 février 2014, présentée pour M. F... C..., demeurant..., par Me Eisenbeth, avocat, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1109083 du 3 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours contre la décision du consul général de France à Conakry du 12 octobre 2010 refusant de délivrer des visas de long séjour aux enfants MohamedC..., MariamC..., RamatoulayeC..., Fatoumata C...et N'KoyaA... ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet contestée ;

3°) d'ordonner au ministre de l'intérieur de délivrer des visas de long séjour aux enfants MohamedC..., MariamaC..., Ramatoulaye C...et FatoumataC..., dans un délai d'une semaine à compter de la notification de l'arrêt à rendre et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- la décision contestée n'est pas motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit ;

- elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- les documents d'état civil présentés sont tous probants ;

- il justifie d'une possession d'état de père ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3, § 1, de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ont été méconnus ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2014, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est de nature à justifier l'annulation de la décision contestée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 janvier 2015 :

- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

1. Considérant que M. C..., ressortissant de la République de Guinée né en 1965, a obtenu en France la reconnaissance de la qualité de réfugié le 10 septembre 2002 ; qu'au titre d'une procédure de rapprochement familial de réfugié statutaire, il a, le 24 novembre 2009, sollicité l'introduction en France des jeunes MohamedC..., MariamaC..., Ramatoulaye C...et FatoumataC..., qui seraient nés en Guinée entre 1991 et 1999 de son mariage en premières noces avec Mme E...C..., ainsi que de l'enfant N'KoyaA..., qui serait née en 1999 de son mariage en seconde noce avec Mme A... ; que, par cinq décisions du 12 octobre 2010, le consul général de France à Conakry a, toutefois, refusé de délivrer des visas de long séjour à ces cinq personnes ; que, par une décision implicite née le 17 août 2011, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre ces décisions de l'autorité consulaire française en République de Guinée ; que M. C... relève appel du jugement du 3 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision implicite de rejet ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. Considérant que M. C... réitère en appel le moyen selon lequel la décision implicite de rejet dont il demande l'annulation n'est pas motivée ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs énoncés aux points 2 et 3 du jugement attaqué ;

En ce qui concerne la légalité interne :

3. Considérant que la circonstance qu'une demande de visa de long séjour ait pour objet le rapprochement familial de membres de la famille d'une personne admise à la qualité de réfugié ne fait pas obstacle à ce que l'autorité administrative refuse la délivrance du visa sollicité en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur un motif d'ordre public ; que figurent au nombre de ces motifs le défaut de valeur probante des documents destinés à établir le lien de filiation ou le lien matrimonial entre le demandeur du visa et le membre de la famille qu'il projette de rejoindre sur le territoire français ainsi que le caractère frauduleux des actes d'état civil produits ;

4. Considérant, en premier lieu, que les copies certifiées conformes présentées des volets n° 1 des actes de naissance des jeunes MohamedC..., MariamaC..., Ramatoulaye C...et Fatoumata C...mentionnent que les déclarations de naissance ont été reçues respectivement les 19 mai 1991, 13 janvier 1993, 27 mars 1999 et 27 mars 1999 par M. D... B..., indiqué comme étant, à ces dates, le maire de la commune Matam, alors qu'il est constant qu'aux mêmes dates, ce maire était une autre personne ; que les volets n° 1 concernant les enfants Ramatoulaye et Fatoumata mentionnent un même numéro pour les actes de naissance de ces deux enfants, sans qu'il soit établi qu'une telle anomalie ne serait le résultat que d'une erreur matérielle ; que les documents concernant ces deux enfants présentés comme étant des " extraits du registre de transcription (naissance) " n°s 516 et 517 du 14 novembre 2011, consécutifs à des jugements supplétifs et non, d'ailleurs, rectificatifs, non produits, du tribunal de première instance de Conakry 3 du 9 novembre 2011, sont dépourvus de caractère probant ; qu'en outre, les actes de naissance présentés indiquent que les quatre enfants sont nés à Ratoma, qui, à Conakry, constituait, lors des dates de naissance des quatre enfants, une commune distincte de celle de Matam ; que, dès lors et conformément à l'article 192 du code civil de la République de Guinée, les déclarations des naissances ne pouvaient être reçues que par l'officier d'état civil de la commune de Ratoma ; que, d'après les documents présentés, elles ont toutefois été reçues par celui d'une autre commune ; que, dès lors, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, qui n'a pas commis d'erreur de droit, n'a pas non plus commis d'erreur d'appréciation en estimant que les documents présentés destinés à établir le lien de filiation entre le requérant et ces quatre enfants sont dépourvus de valeur probante ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que l'article 311-14 du code civil dispose que " la filiation est régie par la loi personnelle de la mère au jour de la naissance des enfants " ; qu'il en résulte que la preuve de la filiation au moyen de la possession d'état entre un enfant mineur étranger et une personne ayant obtenu le statut de réfugié peut être accueillie si la loi personnelle de la mère au jour de la naissance de l'enfant admettait un mode de preuve comparable ; qu'en outre, l'article 311-1 du code civil énonce que la possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui révèlent le lien de filiation et de parenté entre une personne et la famille à laquelle elle est dite appartenir ; que l'article 311-2 du même code ajoute que " la possession d'état doit être continue, paisible, publique et non équivoque " ; que, si le requérant se prévaut de ses déclarations faites à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en 2001, de la circonstance que les quatre enfants portent le même patronyme que lui ainsi que de transferts de somme d'argent, adressés toutefois à des tiers dont aucun élément du dossier ne permet d'établir le lien avec ces enfants, une possession d'état continue, paisible, publique et non équivoque ne peut, toutefois, être regardé comme établie et ce, à supposer qu'aux dates de naissance de ces enfants, la loi guinéenne admettait un mode de preuve comparable à la possession d'état ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'en l'absence d'établissement du lien de filiation entre le requérant et les jeunes Mohamed C..., Mariam C..., Ramatoulaye C... et FatoumataC..., la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a méconnu, ni les stipulations du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution et que, dès lors, les conclusions tendant à ce que, sous astreinte, il soit ordonné au ministre de l'intérieur de délivrer des visas de long séjour aux jeunes Mohamed C..., Mariama C..., Ramatoulaye C... et Fatoumata C... ne sauraient être accueillies ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, le versement d'une somme à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 février 2015.

Le rapporteur,

A. DURUP de BALEINE Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT00353 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00353
Date de la décision : 13/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP de BALEINE
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : EISENBETH

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-02-13;14nt00353 ?
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