Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La commune de Dambron a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 25 mars 2013 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir a étendu le périmètre de la communauté de communes de la Beauce d'Orgères à l'effet d'y intégrer la commune isolée de Dambron.
Par un jugement n° 1301519 du 21 novembre 2013, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2014, la commune de Dambron, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 21 novembre 2013 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet d'Eure-et-Loir du 25 mars 2013 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué ne vise et n'analyse qu'imparfaitement les moyens soulevés, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;
- l'arrêté attaqué a été pris à la suite d'une procédure irrégulière dès lors que la commission départementale de coopération intercommunale a siégé dans une composition irrégulière au regard des prescriptions des articles R. 5211-19 à R. 5211-40 du code général des collectivités territoriales, que ses membres ont été irrégulièrement désignés, qu'ils n'ont pas bénéficié d'une information suffisante, notamment sur les sens des avis recueillis pendant la procédure ;
- la compétence de la commission départementale de coopération intercommunale a été méconnue dès lors que postérieurement à l'avis formulé par les collectivités, le préfet a apporté des modifications au projet de schéma départemental de coopération intercommunale présenté le 20 mai 2011 à la commission départementale ;
- l'avis de la commission départementale est vicié faute d'avoir obtenu préalablement l'avis du préfet du Loiret ainsi que le prévoit l'alinéa 4 de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales ;
- l'arrêté attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le rattachement de la commune a été décidé en méconnaissance des dispositions de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales puisque le rattachement de la commune à la communauté de communes ne se justifie par aucune considération d'ordre géographique, économique, sociale ou territoriale ;
- la logique de consensus que le législateur a fait prévaloir lors de l'adoption de la loi n° 2012-281 du 29 février 2012 visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale et rappelée dans la circulaire du 27 décembre 2010 du ministre de l'intérieur a été méconnue en dépit de l'opposition de la commune et de sa volonté exprimée d'un rattachement à la communauté de communes de la Beauce de Janville ;
- le principe de libre administration des collectivités territoriales a été méconnu.
Par un mémoire, enregistré le 6 novembre 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Une ordonnance du 9 octobre 2015 a fixé la clôture de l'instruction au 9 novembre 2015 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n°2010-1562 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Loirat,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.
1. Considérant que par application des dispositions de la loi susvisée du 16 décembre 2010, le préfet d'Eure-et-Loir a arrêté le 29 décembre 2011 le schéma départemental de coopération intercommunale, prévoyant notamment le rattachement de la commune de Dambron, commune de 90 habitants qui n'adhérait à aucun établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, à la communauté de communes de la Beauce d'Orgères ; qu'après avoir proposé, par arrêté du 19 novembre 2012, la modification du périmètre de la communauté de communes de la Beauce d'Orgères pour y inclure la commune de Dambron, le préfet d'Eure-et-Loir a, par arrêté du 25 mars 2013, procédé à cette extension du périmètre de cet établissement public de coopération intercommunale avec effet au 1er janvier 2014 ; que par la présente requête, la commune de Dambron relève appel du jugement du 21 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mars 2013 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir a étendu le périmètre de la communauté de communes de la Beauce d'Orgères à l'effet d'y intégrer la commune isolée de Dambron ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application... " ; que contrairement à ce que soutient la commune de Dambron, le jugement attaqué comporte une analyse exhaustive de ses conclusions et des moyens qu'elle a soulevés à l'appui de celles-ci ; qu'il en résulte que ce jugement n'est pas entaché de l'irrégularité alléguée résultant de la méconnaissance des dispositions précitées du code de justice administrative ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne l'exception d'illégalité du schéma départemental de coopération intercommunale :
3. Considérant que l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales issu des dispositions de la loi susvisée du 16 décembre 2010 : " I.-Dans chaque département, il est établi, au vu d'une évaluation de la cohérence des périmètres et de l'exercice des compétences des groupements existants, un schéma départemental de coopération intercommunale prévoyant une couverture intégrale du territoire par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et la suppression des enclaves et discontinuités territoriales. / II.-Ce schéma prévoit également les modalités de rationalisation des périmètres des établissements publics de coopération intercommunale et des syndicats mixtes existants. / Il peut proposer la création, la transformation ou la fusion d'établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, ainsi que la modification de leurs périmètres. / Il peut également proposer la suppression, la transformation, ainsi que la fusion de syndicats de communes ou de syndicats mixtes. / Ces propositions sont reportées sur une carte annexée au schéma comprenant notamment les périmètres des établissements public de coopération intercommunale, des syndicats mixtes, des schémas de cohérence territoriale et des parcs naturels régionaux. / (...). / IV.-Un projet de schéma est élaboré par le représentant de l'Etat dans le département. Il est présenté à la commission départementale de la coopération intercommunale. /Il est adressé pour avis aux conseils municipaux des communes et aux organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale et des syndicats mixtes concernés par les propositions de modification de la situation existante en matière de coopération intercommunale. Ils se prononcent dans un délai de trois mois à compter de la notification. A défaut de délibération dans ce délai, celle-ci est réputée favorable. / Lorsqu'une proposition intéresse des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale ou des syndicats mixtes appartenant à des départements différents, le représentant de l'Etat dans le département saisit pour avis le représentant de l'Etat dans le ou les autres départements concernés, qui se prononce dans un délai de trois mois après consultation de la commission départementale de la coopération intercommunale. A défaut d'avis rendu dans ce délai, l'avis est réputé favorable. / Le projet de schéma, ainsi que l'ensemble des avis mentionnés aux deux alinéas précédents, sont ensuite transmis pour avis à la commission départementale de la coopération intercommunale qui, à compter de cette transmission, dispose d'un délai de quatre mois pour se prononcer. A défaut de délibération dans ce délai, celle-ci est réputée favorable. Les propositions de modification du projet de schéma conformes aux I à III adoptées par la commission départementale de la coopération intercommunale à la majorité des deux tiers de ses membres sont intégrées dans le projet de schéma. / Le schéma est arrêté par décision du représentant de l'Etat dans le département et fait l'objet d'une insertion dans au moins une publication locale diffusée dans le département... " ;
5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le schéma départemental de coopération intercommunale constitue un document d'orientation et de programmation de l'organisation intercommunale dans le département, visant, au terme d'une large concertation entre le représentant de l'Etat et les élus locaux, à traduire dans chaque département les objectifs fixés par le législateur tendant à la couverture intégrale du territoire par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, la suppression des enclaves et discontinuités territoriales, la rationalisation des structures de coopération et le renforcement de la solidarité financière ; que la décision arrêtant le schéma de coopération intercommunale n'implique pas, par elle-même, la création, la modification ou la dissolution d'établissements intercommunaux, auxquels certaines communes seraient tenues d'adhérer, ni la définition des compétences obligatoirement transférées par les communes à ces établissements ; que le schéma ne comporte aucun effet prescriptif qui soit directement et immédiatement opposable aux communes et établissements publics de coopération intercommunale qu'il concerne, la traduction de ses orientations devant faire l'objet de décisions ultérieures du représentant de l'État, tant pour la création, la fusion, la suppression des établissements publics de coopération intercommunale que pour la modification de leur périmètre ; qu'ainsi, eu égard à l'absence de portée normative du schéma départemental de coopération intercommunale qui ne modifie pas l'ordonnancement juridique et qui ne constitue qu'un document de programmation issu de la concertation locale censé orienter les décisions du représentant de l'Etat en matière d'organisation intercommunale, l'arrêté du 25 mars 2013 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir a étendu le périmètre de la communauté de communes de la Beauce d'Orgères pour y intégrer la commune de Dambron ne peut être regardé comme pris pour l'application du schéma départemental de la coopération intercommunale et ce dernier document ne constitue pas davantage la base légale de l'arrêté préfectoral contesté ; qu'il suit de là que l'exception d'illégalité du schéma départemental de coopération intercommunale d'Eure-et-Loir ne peut, en tout état de cause, qu'être écartée ;
En ce qui concerne l'erreur manifeste d'appréciation entachant le rattachement de la commune de Dambron à la communauté de communes de la Beauce d'Orgères :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales : " III.-Le schéma prend en compte les orientations suivantes : / 1° La constitution d'établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant au moins 5 000 habitants ; toutefois, ce seuil de population n'est pas applicable aux établissements publics dont le territoire comprend des zones de montagne délimitées conformément à l'article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne ; par ailleurs, ce seuil peut être abaissé par le représentant de l'Etat dans le département pour tenir compte des caractéristiques géographiques particulières de certains espaces ; / 2° Une amélioration de la cohérence spatiale des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre au regard notamment du périmètre des unités urbaines au sens de l'Institut national de la statistique et des études économiques, des bassins de vie et des schémas de cohérence territoriale ; / 3° L'accroissement de la solidarité financière ; / 4° La réduction du nombre de syndicats de communes et de syndicats mixtes au regard en particulier de l'objectif de suppression des doubles emplois entre des établissements publics de coopération intercommunale ou entre ceux-ci et des syndicats mixtes ; / 5° Le transfert des compétences exercées par les syndicats de communes ou les syndicats mixtes à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ; / 6° La rationalisation des structures compétentes en matière d'aménagement de l'espace, de protection de l'environnement et de respect des principes du développement durable " ; qu'aux termes de l'article L. 5214-1 du même code : " La communauté de communes est un établissement public de coopération intercommunale regroupant plusieurs communes d'un seul tenant et sans enclave. Elle a pour objet d'associer des communes au sein d'un espace de solidarité, en vue de l'élaboration d'un projet commun de développement et d'aménagement de l'espace (...) " ;
7. Considérant que la commune de Dambron fait valoir que son rattachement à la communauté de communes de la Beauce d'Orgères n'est justifié par aucune considération géographique, économique, sociale ou territoriale, alors que la commune d'Orgères est plus éloignée et plus difficile d'accès que la commune de Janville, et qu'elle n'a aucune compétence partagée avec la communauté de communes de la Beauce d'Orgères ; qu'en revanche, la commune de Toury, membre de la communauté de communes de la Beauce de Janville, constitue pour elle un bassin d'emplois, qu'elle est rattachée à la subdivision de la direction départementale des territoires de Janville, aux services d'aide au maintien à domicile en milieu rural (ADMR) de la commune d'Ymonville, également membre de la communauté de communes de la Beauce de Janville, qu'elle est reliée à la commune de Janville pour le schéma régional du climat de l'air et de l'énergie de la région centre, et qu'un projet d'interconnexion des réseaux d'eau potable est à l'étude depuis 2009 avec le SIAEP de Janville/Toury/Le Puiset dont les compétences devraient être prochainement transférées à la communauté de communes de la Beauce de Janville ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commune de Dambron a en commun avec les communes limitrophes de Lumeau, Baingeaux et Poupry, d'être située dans l'aire urbaine d'Orléans, et que ces trois communes sont rattachées à la communauté de communes de la Beauce d'Orgères, laquelle conduit des projets communs interdépartementaux avec d'autres communes du Loiret, au rang desquels le développement de la zone d'activités d'Artenay-Poupry ou le traitement des ordures ménagères ; que le rattachement à la communauté de communes de la Beauce d'Orgères, laquelle est tenue au respect du même schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) de la nappe de Beauce que la communauté de communes de la Beauce de Janville et mène une politique comparable d'amélioration de la qualité des eaux, permettra à la commune de Dambron de mener à bien son projet d'interconnexion des réseaux d'adduction d'eau potable ; que la subdivision territoriale de la direction départementale des territoires sur la commune de Janville n'existe plus et que la commune de Dambron est désormais rattachée au centre d'exploitation des routes d'Orgères en Beauce ; que dans ces conditions, malgré son éloignement relatif de la commune siège de la communauté de communes de la Beauce d'Orgères, la commune de Dambron n'est pas fondée à soutenir que son rattachement à cet établissement public de coopération intercommunale serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales ;
9. Considérant que si la commune de Dambron soutient que l'arrêté préfectoral contesté du 25 mars 2013 méconnaît les dispositions de la loi n°2012-281 du 29 février 2012 visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale, par laquelle le législateur a décidé de proroger le délai d'adoption des schémas départementaux de coopération intercommunale afin de permettre une meilleure concertation entre les élus et les préfets et favoriser les propositions consensuelles, ces dispositions ne sont toutefois pas applicables à l'arrêté contesté, lequel est intervenu en application des dispositions de l'article 60 de la loi n°2010-1563 du 16 décembre 2010 ; que l'appelante ne peut davantage se prévaloir des dispositions de la circulaire ministérielle du 27 décembre 2010, laquelle est dépourvue de caractère réglementaire ;
10. Considérant, enfin, que si les dispositions du II de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010, en ce qu'elles permettent au représentant de l'Etat dans le département d'intégrer une commune dans un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre contre son avis, notamment dans le cas où elle a exprimée sa volonté de rejoindre un autre établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, affectent la libre administration des collectivités territoriales, la conformité de ces dispositions à la Constitution a été affirmée par le Conseil constitutionnel dans sa décision QPC n°2013-303 du 26 avril 2013 ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Dambron n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, verse à la commune de Dambron la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Dambron est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Commune de Dambron et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet d'Eure-et-Loir.
Délibéré après l'audience du 8 décembre 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- M.C..., faisant fonction de premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 décembre 2015.
Le rapporteur,
C. LOIRATLe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT00157