La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/02/2017 | FRANCE | N°15NT02200

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 22 février 2017, 15NT02200


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les délibérations du 21 juin 2013 du conseil d'administration de l'Université de Bretagne Sud portant adoption du crédit - temps formation pour les enseignants et les enseignants chercheurs et la décision du 4 septembre 2013 du président de cette université rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1303870 du 19 juin 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Pa

r une requête et un mémoire, enregistrés le 17 juillet 2015 et le 31 janvier 2017, M. C...,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les délibérations du 21 juin 2013 du conseil d'administration de l'Université de Bretagne Sud portant adoption du crédit - temps formation pour les enseignants et les enseignants chercheurs et la décision du 4 septembre 2013 du président de cette université rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1303870 du 19 juin 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 juillet 2015 et le 31 janvier 2017, M. C..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 19 juin 2015 ;

2°) d'annuler les délibérations du 21 juin 2013 du conseil d'administration de l'Université de Bretagne Sud portant adoption du crédit - temps formation pour les enseignants et les enseignants chercheurs et la décision du 4 septembre 2013 du président de cette université rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Université de Bretagne Sud une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges n'ont pas répondu aux moyens tenant à l'incompétence du conseil d'administration de l'Université pour adopter ces délibérations et à la méconnaissance des dispositions de l'article 2 du décret du 23 décembre 1983 ;

- le conseil d'administration de l'Université de Bretagne Sud n'était pas compétent pour adopter ces nouvelles dispositions statutaires qui relèvent de la compétence du ministre et qui ne peuvent intervenir qu'après saisine préalable du conseil d'Etat pour avis ;

- ce dispositif méconnait les dispositions du décret n° 83-1175 du 23 décembre 1983 dès lors que les heures d'enseignement complémentaires qui sont reportées sur l'année suivante ne sont pas rémunérées ;

- le dispositif institué aboutit à ce que les enseignants chercheurs renoncent au paiement des heures complémentaires au taux applicables et à effectuer sur les heures reportées des fonctions qui leur sont réglementairement dévolues et qui participent pleinement de l'exécution de leurs obligations de service ; il méconnait en conséquence les dispositions de l'article 7 modifié du décret 84-431 du 6 juin 1984 ;

- les modalités d'application du dispositif sont contraires aux dispositions de l'article 3 du décret n° 2008-1136 portant création du compte épargne temps dans la fonction publique de l'Etat.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 23 mai 2016 et le 2 février 2017, l'Université de Bretagne sud conclut au rejet de la requête et demande en outre qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Rennes n'était pas recevable ;

- les autres moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de 1'éducation ;

- le décret n° 83-1175 du 23 décembre 1983 relatif aux indemnités pour enseignements complémentaires institués dans les établissements publics à caractère scientifique et culturel et les autres établissements d'enseignement supérieur relevant du ministère de l'éducation nationale ;

- le décret n° 84-431 du 6 juin 1984, modifié par le décret n° 2009-460 du 23 avril 2009, fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences ;

- le décret n° 2002-634 du 29 avril 2002 portant création du compte épargne-temps dans la fonction publique de l'Etat et dans la magistrature ;

- le décret n° 2007-1470 du 15 octobre 2007 relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie des fonctionnaires de l'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau,

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant l'Université de Bretagne Sud.

Une note en délibéré présentée pour l'Université de Bretagne Sud a été enregistrée le 7 février 2017.

1. Considérant que par deux délibérations 55-2013 et 56-2013 du 21 juin 2013, le conseil d'administration de l'Université de Bretagne Sud a approuvé un dispositif spécifique d'épargne-temps, applicable aux enseignants-chercheurs et aux enseignants exerçant au sein de l'établissement ; qu'aux termes de ces deux délibérations et des notes de cadrage jointes, il est prévu que les enseignants et les enseignants-chercheurs titulaires peuvent générer, par l'épargne d'heures complémentaires sur un maximum de six années universitaires, du crédit-temps, puis le convertir en congé pour mener une recherche, une conversion thématique, de l'innovation pédagogique ou encore acquérir de nouvelles compétences ; que M. D...C..., enseignant-chercheur maître de conférences à l'Université de Bretagne Sud, relève appel du jugement du 19 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces délibérations ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant que M. C...ne conteste pas qu'en raison de sa qualité d'enseignant-chercheur maître de conférences à l'Université de Bretagne Sud, la délibération 56-2013 ne porte pas atteinte à ses droits et que, par suite, il ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir et n'est pas recevable à en rechercher l'annulation ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que c'est en sa qualité d'enseignant-chercheur à l'université de Bretagne Sud et non de membre d'une organisation syndicale que M. C...a présenté sa demande devant le tribunal administratif de Rennes ; que, par suite, il n'avait pas à produire de mandat lui donnant qualité pour agir ;

4. Considérant, en troisième lieu et contrairement à ce que soutient l'Université de Bretagne Sud, qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...a produit à l'appui de sa demande de première instance, en application des dispositions de l'article R. 412-1 du code de justice administrative, une copie de la délibération 55-2013 relative au dispositif de crédit-temps pour les enseignants chercheurs ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 954-1 du code de l'éducation : " Le conseil d'administration définit, dans le respect des dispositions statutaires applicables et des missions de formation initiale et continue de l'établissement, les principes généraux de répartition des obligations de service des personnels enseignants et de recherche entre les activités d'enseignement, de recherche et les autres missions qui peuvent être confiées à ces personnels " ; qu'aux termes de l'article 7 du décret du 6 juin 1984 dans sa version en vigueur à la date de la délibération contestée applicable aux enseignants-chercheurs : " Les fonctions des enseignants chercheurs s'exercent dans les domaines énumérés aux articles L. 123-3 et L. 952-3 du code de l'éducation et L. 112-1 du code de la recherche. / I. Le temps de travail de référence, correspondant au temps de travail arrêté dans la fonction publique, est constitué pour les enseignants-chercheurs : / 1° Pour moitié, par les services d'enseignement déterminés par rapport à une durée annuelle de référence égale à 128 heures de cours ou 192 heures de travaux dirigés ou pratiques ou toute combinaison équivalente en formation initiale, continue ou à distance. Ces services d'enseignements s'accompagnent de la préparation et du contrôle des connaissances y afférents. Ils sont évalués dans les conditions prévues à 1'article 7-1 du présent décret ; / 2° Pour moitié, par une activité de recherche reconnue comme telle par une évaluation réalisée dans les conditions prévues à 1'article 7-1 du présent décret. / Lorsqu'ils accomplissent des enseignements complémentaires au-delà de leur temps de travail tel qu'il est défini au présent article, les enseignants-chercheurs perçoivent une rémunération complémentaire dans les conditions prévues par décret. (...) ; / III. - Dans le respect des principes généraux de répartition des services définis par le conseil d'administration en formation restreinte ou par l'organe en tenant lieu, le président ou le directeur de l'établissement arrête les décisions individuelles d'attribution de services des enseignants-chercheurs dans l'intérêt du service, après avis motivé, du directeur de l'unité de recherche de rattachement et du directeur de la composante formulé après consultation du conseil de la composante, réuni en formation restreinte aux enseignants. (...) / Le service d'un enseignant-chercheur peut être modulé pour comporter un nombre d'heures d'enseignement inférieur ou supérieur au nombre d'heures de référence mentionné au 1. / Cette modulation ne peut se faire sans l'accord écrit de 1'intéressé. / La modulation peut s'inscrire dans le cadre d'un projet individuel ou collectif, scientifique, pédagogique ou lié à des tâches d'intérêt général. Elle tient compte du caractère annuel ou pluriannuel de ce projet. / La modulation de service ne peut aboutir à ce que le service d'enseignement soit inférieur à 42 heures de cours magistral ou à 64 heures de travaux pratiques ou dirigés, ou toute combinaison équivalente. (...) " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le conseil d'administration d'une université siégeant en formation restreinte est compétent pour organiser les principes généraux de modulation à la baisse comme à la hausse des obligations de service d'enseignement d'un enseignant-chercheur sous réserve de l'accord de l'intéressé ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la délibération 55-2013 relative au dispositif de crédit-temps pour les enseignants chercheurs, adoptée le 21 juin 2013 par le conseil d'administration de l'Université de Bretagne Sud sur le fondement des dispositions de l'article 7 du décret du 6 juin 1984, crée un dispositif permettant aux enseignants-chercheurs, qui dispensent des heures d'enseignement au-delà de leur obligation de service, de choisir de ne pas solliciter l'indemnisation de ces heures d'enseignement complémentaires mais de les intégrer à un compte afin qu'elles soient regardées comme des heures effectuées au titre de l'obligation de service lors d'une année ultérieure ; que ce dispositif dit de " crédit-temps ", constitué pour une période maximale de six ans, a ainsi pour effet de priver irrégulièrement en fait l'agent de la rémunération des heures complémentaires effectuées au-delà de son obligation de service en méconnaissance des dispositions de l'article 7 du décret du 6 juin 1984 et des articles 1 et 2 du décret du 23 décembre 1983 ; qu'au surplus, le bénéfice du compte individuel de crédit-temps institué par l'Université de Bretagne Sud, alors même qu'il repose sur l'accord des enseignants-chercheurs, est conditionné à l'accumulation d'heures complémentaires non rémunérées en sus des obligations de service de ce personnel pendant les années précédentes ; que, dans ces conditions, la délibération en litige, qui ne peut être regardée comme ayant pour objet de moduler les heures d'enseignement correspondant aux obligations de service d'un enseignant-chercheur et qui ne relève pas, en conséquence, de la compétence du conseil d'administration de l'Université au titre de la détermination des principes généraux de répartition des services, méconnaît également pour ce motif les dispositions précitées de l'article 7 du décret du 6 juin 1984 ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la seule délibération 55-2013 du 21 juin 2013 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de M.C..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme sollicitée par l'Université de Bretagne Sud au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de cette dernière le versement d'une somme de 1 500 euros à M. C...au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 19 juin 2015 en tant qu'il statue sur les conclusions à fin d'annulation de la délibération 55-2013 du 21 juin 2013 de l'Université de Bretagne Sud et cette délibération sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.

Article 3 : L'Université de Bretagne Sud versera une somme de 1 500 euros à M. C...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et à l'Université de Bretagne Sud.

Une copie en sera adressée pour information au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Délibéré après l'audience du 7 février 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 février 2017.

Le rapporteur,

M-P. Allio-RousseauLe président,

L. Lainé

Le greffier,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT02200


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02200
Date de la décision : 22/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : HERIN

Origine de la décision
Date de l'import : 21/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-02-22;15nt02200 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award