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12/07/2017 | FRANCE | N°15NT03777

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 12 juillet 2017, 15NT03777


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...J...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 23 mai 2013 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision du 31 mai 2012 par laquelle les autorités consulaires françaises à Conakry ont refusé de faire droit à la demande de visa de long séjour au bénéfice de M. F...J....

Par un jugement n° 1306099 du 6 novembre 2015, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 23 mai

2013.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire, enregistrés le 21 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...J...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 23 mai 2013 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision du 31 mai 2012 par laquelle les autorités consulaires françaises à Conakry ont refusé de faire droit à la demande de visa de long séjour au bénéfice de M. F...J....

Par un jugement n° 1306099 du 6 novembre 2015, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 23 mai 2013.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire, enregistrés le 21 décembre 2015 et le 11 avril 2017, le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 6 novembre 2015 ;

2°) de rejeter la demande de première instance présentée par MmeJ....

Le ministre soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a estimé qu'il aurait dû solliciter une substitution de motifs, alors que la lecture de ses écritures permettait de constater qu'il défendait le motif de la décision contestée, tiré de ce que M. F...J...n'établissait pas avoir conservé un lien avec Mme D...J..., ni même être resté en contact avec elle et qu'il ne relevait d'aucune catégorie de demandeurs de visas susceptible de rejoindre un réfugié statutaire en France ;

- il est exact qu'une erreur d'homonymie commise par la commission avait conduit l'administration à conclure à l'existence d'un mariage entre Mme J...et une tierce personne ;

- il n'est pas établi que M. J...serait toujours le compagnon de MmeJ..., que celle-ci vivrait effectivement seule et qu'il aurait contribué à l'éducation et à l'entretien de ses deux enfants nés en France.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 mars 2016, Mme J...conclut :

1°) au rejet du recours ;

2°) à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer le visa de long séjour à M. J...dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous peine d'astreinte de 100 euros par jour de retard, subsidiairement, de réexaminer sa demande dans le même délai et sous la même astreinte ;

3°) à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le recours du ministre est irrecevable, faute d'établir que le signataire de ce recours, M. B... E..., dispose d'une délégation de signature à cette fin ;

- le tribunal n'a pas commis d'erreur de droit en estimant que la décision contestée était fondée sur le motif qu'elle était mariée avec M. G...et avait fondé avec lui une nouvelle cellule familiale ;

- les attestations produites démontrent qu'elle n'a jamais cessé d'entretenir sa relation avec M. J...depuis la reconduite à la frontière de ce dernier en 2006 ;

- la décision contestée est insuffisamment motivée ;

- cette décision est entachée d'une erreur de fait, résultant d'une homonymie avec Mme D...G..., épouseG... ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Mme J...a conservé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A...'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. F...J..., ressortissant guinéen, a lors d'un précédent séjour en France reconnu le premier enfant, né en 2004, de son union avec MmeJ..., laquelle était à nouveau enceinte de lui lorsqu'il fut reconduit à la frontière en février 2006 ; qu'il a sollicité un visa d'entrée en France qui lui a été refusé par une décision des autorités consulaires françaises à Conakry du 31 mai 2012, confirmée par une décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 23 mai 2013 ; que le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 6 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours du 23 mai 2013 ;

Sur la légalité de la décision contestée :

2. Considérant que les principes généraux du droit applicables aux réfugiés, résultant notamment de la convention de Genève, imposent, en vue d'assurer pleinement au réfugié la protection prévue par cette convention, que la même qualité soit reconnue à la personne de même nationalité ayant avec le réfugié, à la date à laquelle il a demandé son admission au statut, une liaison suffisamment stable et continue pour former avec lui une famille ;

3. Considérant que pour rejeter la demande de visa formée par M. F...J..., la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a retenu que " le lien familial du requérant avec la réfugiée ne correspond pas à l'un des cas qui lui permet d'obtenir une carte de séjour en qualité de membre de famille de réfugié. En effet, le dossier de demande de visa ne contient pas la preuve du lien familial avec la personne que le requérant présente comme sa compagne, alors qu'elle est mariée à M. G...et qu'ils ont fondé une nouvelle cellule familiale " ;

4. Considérant, en premier lieu, que le ministre reconnaît dans ses écritures l'erreur d'homonymie ayant conduit l'administration à conclure à tort à l'existence d'un mariage entre Mme J...et une tierce personne et, par suite, l'erreur de fait dont est entachée la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

5. Considérant, en second lieu, que si le ministre soutient que cette décision était également fondée sur le motif tiré du défaut de preuve du maintien du lien conjugal entre M. et MmeJ..., il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier de la rédaction même de la décision contestée, que la commission de recours aurait pris la même décision en se fondant sur ce seul motif alors qu'il n'est pas contesté que M. J...est le père des deux enfants de Mme J..., qu'il a été le concubin de celle-ci jusqu'à sa reconduite à la frontière en 2006 et que Mme J...produit une attestation de Mme H... C...faisant état du maintien du lien familial ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité du recours du ministre de l'intérieur, que ce dernier n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 23 mai 2013 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'eu égard aux motifs de la présente décision, l'exécution de celle-ci n'implique pas nécessairement la délivrance d'un visa à M. F...J...; qu'il y a lieu en revanche d'enjoindre, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, à l'autorité compétente de prendre à nouveau, après une nouvelle instruction, une décision concernant la demande présentée par M. F...J...; dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de prescrire que cette décision intervienne dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

8. Considérant que Mme J...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle ; qu'ainsi, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de M. F...J...dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à MeI..., conseil de MmeJ..., une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991 ;

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme J...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, à Mme D... J...et à M. F... J....

Délibéré après l'audience du 27 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président,

- M. A...'hirondel, premier conseiller,

- Mme Gélard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juillet 2017.

Le rapporteur,

M. K...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT03777


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT03777
Date de la décision : 12/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: Mme PILTANT
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS BREILLAT DIEUMEGARD MASSON

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-07-12;15nt03777 ?
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