Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. L...J..., l'association pour la sauvegarde et la protection des cônes de vue remarquables de la commune de Saint-Rigomer-des-Bois et des communes limitrophes, l'association Vent Debout pour la sauvegarde des paysages, du patrimoine et de la qualité de vie de la commune de Champfleur et de ses communes limitrophes, la société civile immobilière Guyo, la société civile immobilière Guyoen, le groupement forestier de Courtilloles, M. M...E..., M. C...G..., M. N...H...et M. F...O...ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les trois arrêtés du 27 septembre 2011 par lesquels le préfet de la Sarthe a délivré à la société Eole Génération l'autorisation de construire six éoliennes et un poste de livraison sur le territoire des communes de Béthon, Champfleur et Chérisay, ainsi que la décision de rejet de leur recours gracieux.
Par un jugement n° 1203160 du 9 avril 2015, le tribunal administratif de Nantes a annulé ces permis de construire, transférés, le 13 novembre 2013, à la société Futures Energies.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 juin 2015 et le 1er septembre 2016, la société Futures Energies, représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 9 avril 2015 en tant qu'il annulé les trois arrêtés du préfet de la Sarthe du 27 septembre 2011 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. J...et autres devant le tribunal administratif de Nantes tendant à l'annulation de ces trois arrêtés ;
3°) de mettre à la charge de chacun des défendeurs une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Nantes, les permis de construire contestés n'ont été pris en méconnaissance ni de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ni de l'article 11 du règlement de la zone A du plan local d'urbanisme de la commune de Champfleur ; les lieux avoisinants ne présentent aucun intérêt ; le secteur d'implantation se caractérise par des paysages ouverts où se pratique l'agriculture intensive et est marqué par de nombreux signes d'anthropisation ; les éoliennes sont situées dans une cuvette ; elles ne seront pas visibles depuis 1'enceinte fortifiée de Bourg-le-Roi, ; le château de Courtilloles ne présente pas d'intérêt particulier autre que local et aucune atteinte ne sera portée à cet édifice ;
- les autres moyens invoqués devant le tribunal administratif ne sont pas fondés ; le projet architectural est complet ; l'étude d'impact est suffisante ; l'avis de la commission départementale des sites est régulier, l'enquête publique n'est pas entachée d'irrégularité.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 octobre 2015 et le 22 décembre 2016, M. J...et autres, représentés par MeD..., concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société requérante et de l'Etat d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir que les moyens invoqués par la société Futures Energies ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bougrine,
- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,
- et les observations de MeI..., substituant MeB..., représentant la société Futures Energies et de MeD..., représentant M. J...et autres.
Une note en délibéré présentée par la société Futures Energies a été enregistrée le 28 septembre 2017.
1. Considérant que la société Futures Energies relève appel du jugement du tribunal administratif de Nantes du 9 avril 2015 en tant qu'il a annulé les trois arrêtés du 27 septembre 2011 du préfet de la Sarthe portant autorisation de construire deux éoliennes, trois éoliennes ainsi qu'un poste de livraison, et une éolienne sur le territoire, respectivement, des communes de Béthon, de Champfleur et de Chérisay ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à éd(fier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. "; que l'article A 11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Champfleur dispose que " les constructions doivent présenter un aspect compatible avec le caractère ou l'intérêt des lieux avoisinants, des sites et des paysages naturels ou urbains. Le permis de construire peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte à ce caractère ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ;
3. Considérant que le projet litigieux consiste en la construction de six éoliennes, d'une hauteur de 146 mètres en haut de pale et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Béthon, Champfleur et Chérisay ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'étude d'impact produite, que le lieu d'implantation du projet litigieux se situe au sein de l'unité paysagère dite de la " plaine agricole du Nord ", qui comprend certaines infrastructures telles qu'une autoroute, une route nationale et une ligne à haute tension ; que, toutefois, ce secteur se caractérise par une ouverture complète des paysages qui préserve les images patrimoniales des paysages de bocages du plateau du Massif Ancien et des forêts du massif forestier de la Perseigne qui encadrent le site ; que se situent, à proximité, plusieurs édifices inscrits au titre des monuments historiques, parmi lesquels, notamment, à 2,5 kilomètres, l'ancienne enceinte fortifiée de Bourg-le-Roi et, à environ 3 kilomètres, à Saint-Rigomer-des Bois, le domaine et le château de Courtilloles, édifié au XVIIIè siècle, qui sont ouverts au public ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'avis du 31 mars 2010 de l'architecte des bâtiments de France du service départemental de l'architecture et du patrimoine (SDAP) de la Sarthe que les éoliennes apparaîtraient, s'agissant de Bourg-le-Roi, où les restes de sa vaste enceinte fortifiée, encore percée de ses portes Saint Rémy et Saint Martin, sont dominés par une motte féodale couronnée des ruines de son donjon, formant un cadre architectural " patrimonial majeur", " au coeur d'une structure paysagère (...) devenue des plus ouvertes ", comme " un élément perturbateur et discordant ", et que ces installations, compte tenu de la faible distance les séparant du site, " écraseraient visuellement les structures architecturales et boisées peu élevées du bourg ", " cet impact négatif " étant particulièrement notable tant depuis la promenade qui longe les remparts (...) que, plus encore, depuis la motte du donjon dont la mise en valeur constitue le point d'orgue pour la restauration générale des structures fortifiées de cette petite cité médiévale " ; que, s'agissant du château de Courtilloles, l'architecte des bâtiments de France précise que l'impact des éoliennes est " incontestable ", cet impact pouvant être atténué " sans doute (...) par la présence d'un boisement " mais surtout par un éloignement des installations qui aurait cependant pour effet d'aggraver les conséquences visuelles sur le site médiéval de Bourgle-Roi ; que l'architecte des bâtiments de France, estimant que les éoliennes porteraient " incontestablement atteinte " à ces édifices a émis un avis défavorable au projet ; que M. J...et autres ont également produit une lettre du 4 mai 2010 du directeur régional des affaires culturelles (DRAC) des Pays-de-la-Loire soulignant que la mise en oeuvre d'un champ éolien sur les communes de Champfleur et de Béthon aurait, de l'avis même de 1'architecte des bâtiments de France, un impact majeur sur le château de Courtilloles ; que l'autorité environnementale, dans son avis du 1er juin 2010 a estimé que la cité fortifiée de Bourg-le-Roi constitue " un cadre architectural patrimonial majeur ", " au coeur d'une structure paysagère (...) devenue des plus ouvertes " d'où " contrairement à ce qu'affirment les développements du dossier, les éoliennes seront particulièrement visibles ", le bocage ne permettant pas de les dissimuler ; que cet avis précise, également, que les impacts du projet " sont notables, contrairement à ce que le dossier établit ", pour le château de Courtilloles, en raison de " son implantation en balcon, qui lui fait bénéficier d'un très large panorama et représente un point focal pour les résidents et usagers de passage dans un périmètre étendu " et que " ce monument historique se trouverait en forte co-visibilité avec le parc éolien lui-même positionné dans un espace ouvert et sur un versant du plateau très visible " ; que le directeur régional de 1'environnement, de 1'aménagement et du logement (DREAL) des Pays-de-la-Loire, consulté sur " les éléments de réponse à l'avis de l'autorité environnementale " apportés par la société bénéficiaire, a précisé, dans une lettre du 19 octobre 2010, que ces éléments confirment " la co-visibilité entre le projet et les éléments du patrimoine, constitués par le château de Courtilloles et la petite cité de Bourg-le-Roi. Dans le premier cas, outre cette covisibilité latérale, l'implantation d'un parc amènerait une forte concurrence visuelle entre les deux éléments que constituent le château en situation de balcon et le projet de parc éolien qui serait implanté en position centrale de cette petite plaine du sud d'Alençon. Dans le deuxième cas, cette co-visibilité porte sur un site faisant l'objet d'un fort et long effort de rénovation de son enceinte fortifiée et devant bénéficier en outre d'un abattage du boisement de pins de sa butte médiévale avec les vestiges du château qui offrira de ce fait un point de vue encore plus intéressant " ; que cet avis indique, en outre, qu'au vu de ces éléments, 1'architecte des bâtiments de France " a confirmé (...) qu'il maintenait son appréciation initiale d'incompatibilité entre ces éléments patrimoniaux et le projet de parc éolien " ;
4. Considérant que la société requérante se borne à faire valoir que le secteur d'implantation se caractérise par des paysages ouverts où se pratique 1'agriculture intensive et est marqué par de nombreux signes d'anthropisation, tels que 1'autoroute A 87 et la ligne à haute tension, " la seule présence de monuments historiques " ne permettant pas " de considérer que les lieux avoisinants le projet présentent un intérêt paysager particulier " et en se référant à l'étude d'impact dont l'autorité environnementale, dans son avis du 1er juin 2010, a cependant souligné les insuffisances, que les éoliennes ne seront pas visibles depuis l'enceinte fortifiée de Bourg-le-Roi, que le château de Courtilloles ne présente pas d'intérêt particulier autre que local et qu'aucune atteinte ne sera portée au château ; que ce faisant, elle n'apporte pas d'éléments de nature à remettre en cause les appréciations concordantes de l'autorité environnementale, du service départemental de l'architecture et du patrimoine et du directeur régional de 1'environnement, de 1'aménagement et du logement des Pays-de-la-Loire sur les impacts du projet de parc éolien ; que, par suite, et alors même que la commission départementale des sites, qui a estimé que le projet était en partie masqué par le bocage depuis la porte de Saint-Rémy de l'enceinte fortifiée de Bourg-le-Roi et qu'il n'existe pas de confrontation visuelle directe avec la façade principale du château, a émis un avis favorable au projet, le préfet de la Sarthe, en délivrant les permis de construire trois éoliennes sur le territoire des communes de Bethon et de Cherizay, a entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme et, en délivrant le permis de construire trois éoliennes et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Champfleur, a méconnu les dispositions de l'article A 11 du règlement du plan local d'urbanisme de cette commune ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Futures Energies n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé les trois permis de construire délivrés par le préfet de la Sarthe le 27 septembre 2011 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge des intimés, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, le versement de la somme que la société Futures Energies demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la société Futures Energies, le versement à M.E..., M.O..., l'association pour la sauvegarde et la protection des cônes de vue remarquables de la commune de Saint-Rigomer-des-Bois et des communes limitrophes, l'association Vent Debout pour la sauvegarde des paysages, du patrimoine et de la qualité de vie de la commune de Champfleur et de ses communes limitrophes et la société civile immobilière Guyoen, de la somme globale de 1 500 euros ; qu'il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme que les intimés demandent au même titre ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par M.J..., M. H..., M.G..., la société civile immobilière Guyo et le groupement forestier de Courtilloles, dont l'intérêt à agir n'a pas été admis par le tribunal administratif, au titre des frais de même nature qu'ils ont exposés ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Futures Energies est rejetée.
Article 2 : La société Futures Energies versera M.E..., M.O..., l'association pour la sauvegarde et la protection des cônes de vue remarquables de la commune de Saint-Rigomer-des-Bois et des communes limitrophes, l'association Vent Debout pour la sauvegarde des paysages, du patrimoine et de la qualité de vie de la commune de Champfleur et de ses communes limitrophes et la société civile immobilière Guyoen la somme globale de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par M.J..., M. H..., M.G..., la société civile immobilière Guyo et le groupement forestier de Courtilloles sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de M. J...et autres tendant à la condamnation de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent jugement sera notifié à la société Futures Energies, à l'association pour la sauvegarde et la protection des cônes de vue remarquables de la commune de Saint-Rigomer des-Bois et des communes limitrophes, à l'association Vent Debout pour la sauvegarde des paysages du patrimoine et de la qualité, au Groupement forestier de Courtilloles, à société civile immobilière Guyo, à la société civile immobilière Guyoen, à M. L...J..., à M. M...E..., à M. C...G..., à M. N...H..., à M.F... O...et au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire.
Délibéré après l'audience 26 septembre 2017, à laquelle siégeaient :
M. Degommier, président,
M.L'hirondel, premier conseiller,
Mme Bougrine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 octobre 2017.
Le rapporteur,
K. BOUGRINELe président,
S. DEGOMMIER
Le greffier,
S. BOYERE
Le rapporteur,
M. L'HIRONDELLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
S. BOYERE
Le rapporteur,
M. L'HIRONDELLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT01756