Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, sous le n°1608543, d'annuler l'arrêté de la préfète de Maine-et-Loire du 6 octobre 2016 ordonnant sa remise aux autorités italiennes, et d'autre part, sous le n°1608545, d'annuler son arrêté du même jour prononçant son assignation à résidence dans le département de Maine-et-Loire pour une durée de quarante-cinq jours et d'enjoindre à l'administration de procéder à un nouvel examen de sa situation.
Par un jugement n° 1608543 et n°1608545 du 14 octobre 2016 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2016 sous le n°16NT03683, M.A..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 octobre 2016 en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 octobre 2016 de la préfète de Maine-et-Loire ordonnant son transfert en Italie ;
2°) d'annuler cet arrêté du 6 octobre 2016 de la préfète de Maine-et-Loire.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 ; il n'a pas eu d'autre choix que de fuir son pays en raison des évènements qui s'y sont déroulés ; l'Italie n'est pas en capacité aujourd'hui d'examiner dans des conditions raisonnables sa demande d'asile, compte tenu de l'afflux massif de migrants auquel elle est confrontée et malgré les mesures de soutien décidées par l'Union européenne ;
- son renvoi dans ce pays portant une grave atteinte au droit d'asile, la préfète de Maine-et-Loire a commis une erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de faire usage de l'article 17 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 janvier 2017, la préfète de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
II. Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2016 sous le n°16NT03684, M.A..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 octobre 2016 en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 octobre 2016 de la préfète de Maine-et-Loire ordonnant son assignation à résidence dans le département de Maine-et-Loire et l'obligeant à se présenter tous les jours à 15 heures au commissariat de police d'Angers sauf les samedis, dimanches et jours fériés ;
2°) d'annuler cet arrêté du 6 octobre 2016 de la préfète de Maine-et-Loire.
Il soutient que :
- la mesure d'assignation à résidence n'est pas justifiée dès lors qu'en raison de sa contestation de la décision de transfert aux autorités italiennes, celle-ci ne présente pas de perspective raisonnable d'exécution ;
- l'obligation de pointage au commissariat est extrêmement lourde, d'autant qu'il n'a pas l'intention de quitter la France et qu'il a un domicile connu.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 janvier 2017, la préfète de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par deux décisions du 1er décembre 2016.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Tiger-Winterhalter, présidente-assesseure.
1. Considérant que les requêtes n°16NT03683 et n°16NT03684 de M. A...sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;
2. Considérant que M.A..., ressortissant guinéen, est entré irrégulièrement en France le 25 juin 2016 et a présenté une demande d'asile en préfecture de Maine-et-Loire le 3 août 2016 ; que la préfète, informée par le relevé d'empreintes digitales et la vérification du fichier " Eurodac " de ce que l'intéressé avait auparavant sollicité l'asile le 17 mai 2016 puis le 27 mai 2016 en Italie, a saisi les autorités de ce pays, le 5 août 2016, d'une demande de reprise en charge sur le fondement des articles 18 et 22-7 du règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ; que les autorités italiennes ont accepté implicitement le 5 octobre 2016 cette reprise en charge ; que par deux arrêtés du 6 octobre 2016, la préfète de Maine-et-Loire a, d'une part, ordonné la remise de M. A...aux autorités italiennes, et d'autre part, l'a assigné à résidence dans le département de Maine-et-Loire pour une durée de quarante-cinq jours ; que M. A...relève appel du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes du 14 octobre 2016 rejetant ses demandes tendant à l'annulation de ces deux arrêtés du 6 octobre 2016 ;
En ce qui concerne l'arrêté de remise aux autorités italiennes :
3. Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable " ; qu'aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) " ;
4. Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen complet et rigoureux de la situation de M. A... et des conséquences de sa réadmission en Italie au regard des garanties exigées par le respect du droit d'asile et se serait abstenue de tenir compte des difficultés de prise en charge des demandeurs d'asile dans ce pays confronté à un afflux massif de réfugiés ; qu'il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que la préfète aurait entaché sa décision de remise aux autorités italiennes d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations précitées du paragraphe 1 de l'article 17 du règlement n° 604/2013 ;
5. Considérant, d'autre part, que si l'intéressé fait état de la situation exceptionnelle dans laquelle se trouvent plusieurs Etats membres de l'Union européenne, notamment l'Italie, confrontés à un afflux sans précédent de réfugiés, il n'établit toutefois pas, par les pièces qu'il produit, que cette circonstance exposerait sa demande d'asile à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; qu'il ne démontre pas davantage qu'en raison notamment de ses problèmes de santé, il serait personnellement exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants en Italie, alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il est constant, en outre, que le requérant n'entre pas dans le champ du dispositif dérogatoire de relocalisation de l'examen des demandes d'asile prévu par la décision (UE) 2015/1601 du Conseil européen du 22 septembre 2015 instituant des mesures provisoires en matière de protection internationale au profit de l'Italie et de la Grèce ; qu'ainsi, doit être écarté le moyen tiré de ce qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile, la décision contestée aurait été prise en méconnaissance des dispositions des articles 3 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence :
6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5 que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision ordonnant sa réadmission en Italie ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : / 1° Doit être remis aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 ou L. 531-2 .. " ; que l'article L. 561-1 du même code dispose que " Lorsque l'étranger justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, l'autorité administrative peut, jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation, l'autoriser à se maintenir provisoirement sur le territoire français en l'assignant à résidence, par dérogation à l'article L. 551-1, dans les cas suivants : (...) 2° Si l'étranger doit être remis aux autorités d'un Etat membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 ou L. 531-2 ou transféré vers l'Etat responsable de sa demande d'asile en application de l'article L. 742-3 (...) " ;
8. Considérant que l'assignation à résidence prévue par les dispositions précitées de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile constitue une mesure alternative au placement en rétention prévu par les dispositions de l'article L. 551-1 du même code, dès lors qu'une mesure d'éloignement demeure une perspective raisonnable et que l'étranger présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à celle-ci ; que la circonstance que l'arrêté portant remise aux autorités italiennes était contesté devant la juridiction compétente par M. A...n'était pas de nature à ôter toute perspective raisonnable d'exécution à l'arrêté de remise ; que, par suite, la préfète de Maine-et-Loire n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
9. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'étranger astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés par l'autorité administrative doit se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie ; qu'aux termes de l'article R. 561-2 du même code : " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application de l'article L. 561-1 (...) est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence. Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'il fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés (...) " ;
10. Considérant que l'arrêté assignant M. A...à résidence lui impose de se présenter chaque jour à 14 heures, à l'exclusion des samedis, dimanches et jours fériés, au commissariat de police d'Angers ; que le requérant, qui se borne à soutenir qu'il s'agit d'une " fréquence extrêmement lourde ", n'invoque aucune difficulté particulière ou l'existence d'une activité qui serait spécialement affectée par cette sujétion ; qu'il n'est, dans ces conditions, pas fondé à soutenir que l'obligation de présentation mise à sa charge méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 6 octobre 2016 ;
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. A...sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise, pour information, au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 3 octobre 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 octobre 2017.
La rapporteure,
N. TIGER-WINTERHALTERLe président,
L. LAINÉ
La greffière,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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