Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge de l'amende à laquelle ils ont été assujettis sur le fondement du IV de l'article 1736 du code général des impôts au titre des années 2010, 2011 et 2012.
Par un jugement n° 1404610 du 8 décembre 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 28 janvier 2016 et le 26 septembre 2016, M. et MmeA..., représentés par MeC..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de faire droit à leur demande ;
3°) de condamner l'Etat aux dépens ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement est insuffisamment motivé faute d'avoir donné les raisons pour lesquelles l'amende ne serait pas hors de proportion par rapport à la gravité de l'infraction ;
- 1'amende n'était pas applicable dès lors que les comptes bancaires dont ils disposaient à l'étranger ont été déclarés spontanément le 11 juillet 2013 avant toute procédure de reprise dès qu'ils ont eu connaissance de cette obligation, qu'ils n'ont pas cherché à dissimuler des comptes, qu'aucun revenu occulte n'a transité sur ces comptes et que l'Etat n'avait subi aucun préjudice fiscal ;
- l'amende est hors de proportion avec la gravité de l'infraction et leurs revenus imposables résultant des comptes non déclarés comme il appartient au juge de le sanctionner au regard du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'amende est sans justification morale.
Par deux mémoires en défense enregistrés le 30 mai 2016 et le 20 octobre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les moyens invoqués ne sont pas fondés ;
- les conclusions tenant à la condamnation aux dépens sont dépourvues d'objet au regard de l'article R. 761-1 du code de justice administrative applicable.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Delesalle,
- et les conclusions de M. Jouno, rapporteur public
1. Considérant que M. et Mme A...relèvent appel du jugement du 8 décembre 2015 du tribunal administratif d'Orléans rejetant leur demande tendant à la décharge de l'amende prévue au IV de l'article 1736 du code général des impôts qui leur a été infligée au titre des années 2010, 2011 et 2012 pour un montant total de 13 500 euros ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'en rappelant le principe selon lequel l'article 1736 du code général des impôts assure la modulation des peines qu'il prévoit en fonction de la gravité des comportements réprimés en prévoyant deux montants forfaitaires distincts et le contrôle du juge sur son application, les premiers juges ont suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré du caractère disproportionné de l'amende ;
Sur le bien-fondé de la demande :
3. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 1649 A du code général des impôts : " Les personnes physiques (...) domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus (...), les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger. (...). " ; qu'aux termes du IV de l'article 1736 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 : " Les infractions aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 1649 A et de l'article 1649 A bis sont passibles d'une amende de 1 500 euros par compte ou avance non déclaré. Toutefois, pour l'infraction aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 1649 A, ce montant est porté à 10 000 euros par compte non déclaré lorsque l'obligation déclarative concerne un Etat ou un territoire qui n'a pas conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales permettant l'accès aux renseignements bancaires " ; que la loi du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012 a ajouté à ce IV un second alinéa aux termes duquel : " Si le total des soldes créditeurs du ou des comptes à l'étranger non déclarés est égal ou supérieur à 50 000 € au 31 décembre de l'année au titre de laquelle la déclaration devait être faite, l'amende par compte non déclaré est égale à 5 % du solde créditeur de ce même compte, sans pouvoir être inférieure aux montants prévus au premier alinéa du présent IV " ; qu'il résulte des dispositions de l'article 14 de la loi du 14 mars 2012 que ces dernières dispositions s'appliquent aux déclarations à souscrire à compter du 16 mars 2012 et, par suite, aux déclarations portant sur les revenus à compter de l'année 2011 ;
4. Considérant qu'à la suite d'informations transmises à l'administration des impôts sur le fondement de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, M. et MmeA..., domiciliés à Broue (Eure-et-Loir), ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces portant sur les années 2010, 2011 et 2012 ; que, par une décision du 17 décembre 2013, ils ont été assujettis, pour chacune de ces années, au paiement de l'amende prévue au IV de l'article 1736 du code général des impôts en raison de la dissimulation de trois comptes bancaires à l'étranger à raison de 1 500 euros par compte et par année ;
5. Considérant, d'une part, qu'il est constant que M. et Mme A...étaient titulaires de comptes bancaires ouverts à l'étranger qu'ils se sont abstenus de déclarer au moment de leur déclaration de revenus au titre des années 2010, 2011 et 2012 ; qu'ils ne peuvent utilement se prévaloir de ce qu'ils auraient ignoré être dans l'obligation de déclarer ces comptes, de ce qu'aucun revenu occulte n'aurait transité dessus, de ce qu'ils ont spontanément régularisé leur situation dès qu'ils ont eu connaissance de cette obligation avant toute procédure de reprise ou que l'Etat n'a subi aucun préjudice financier du fait de ces omissions ; que, par suite, l'administration a pu à bon droit appliquer aux requérants l'amende prévue au IV de l'article 1736 du code général des impôts ;
6. Considérant, d'autre part, que le IV de l'article 1736 du code général des impôts assure la modulation des peines qu'il prévoit en fonction de la gravité des comportements réprimés, en prévoyant deux montants forfaitaires distincts, selon que l'État ou le territoire dans lequel le compte est ouvert a ou non conclu une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales permettant l'accès aux renseignements bancaires ; que, pour chaque sanction prononcée, le juge décide après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, en fonction de l'une ou l'autre des amendes prononcées, soit de maintenir l'amende, soit d'en dispenser le contribuable si ce dernier n'a pas manqué à l'obligation de déclaration de l'existence d'un compte bancaire à l'étranger ; qu'il peut ainsi proportionner les pénalités selon la gravité des agissements commis par le contribuable ; que le IV de l'article 1736 du code général des impôts n'est, par suite, pas incompatible avec les stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'amende de 1 500 euros qui leur a été infligée pour chacun des comptes non déclarés détenus à l'étranger est disproportionnée par rapport à la gravité de l'omission commise et au montant des avoirs détenus sur ces comptes bancaires est inopérant et doit, en tout état de cause, être écarté ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande ;
Sur les dépens :
8. Considérant qu'en l'absence de frais exposés au titre des dépens, les conclusions de M. et Mme A...tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens sont dépourvues d'objet et doivent être rejetées ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par M. et Mme A...et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 16 novembre 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- M. Delesalle, premier conseiller.
Lu en audience publique le 7 décembre 2017.
Le rapporteur,
H. DelesalleLe président,
F. Bataille
Le greffier,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT00259