Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 2 avril 2015 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a refusé de délivrer à ses filles E...et Dina des visas de long séjour.
Par un jugement n° 1504163 du 1er juin 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 juin 2017, et son mémoire complémentaire enregistré le 24 octobre 2017, M. B..., représenté par MeD..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 1er juin 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 2 avril 2015 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;
3°) d'enjoindre à l'administration de réexaminer les demandes de délivrance de visas de Mmes E...et A...C...dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;
Il soutient que :
- il rencontre des difficultés pour obtenir des actes d'état civil compte-tenu de la désorganisation des services en Haïti ;
- les décisions attaquées méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il envoie régulièrement de l'argent à ses filles et se prévaut d'une possession d'état.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2017, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 août 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Sacher a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., ressortissant français d'origine haïtienne né le 16 décembre 1975, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 avril 2015 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a refusé de délivrer à ses filles E...née le 26 novembre 2003 et Dina née le 22 juillet 2005 des visas de long séjour.
2. Aux termes de l'article L. 111-6 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil (...) " ; aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Cet article pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère et il incombe à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question.
En ce qui concerne l'enfant Dina :
3. Plusieurs incohérences dans la production des actes d'état civil produits par le requérant ont été relevés par le ministère de l'intérieur et les premiers juges ont relevé que ces incohérences étaient de nature à remettre en cause le caractère authentique des actes d'état civil produits à l'appui de la demande de visa :
- l'acte de naissance et la copie délivrée par les archives nationales haïtiennes mentionnent une date de déclaration postérieure au délai légal d'un mois prévu à l'article 55 du code civil haïtien.
- la naissance enregistrée à Port de Paix, n'a pas été déclarée auprès de l'officier de l'état civil du lieu du domicile de la mère ou du lieu de naissance de l'enfant située à Gonaïves, en méconnaissance des mêmes dispositions.
- contrairement aux dispositions de l'article 35 du code civil haïtien, l'âge et la profession des personnes mentionnées dans les actes ne sont pas indiqués.
- le numéro de l'acte initial n'apparaît pas sur la copie délivrée, laquelle porte en outre un autre numéro et n'indique pas la même heure de naissance
4. M. B...ne présente aucun élément nouveau en appel permettant d'expliquer ces incohérences et il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre aurait commis une erreur d'appréciation en considérant que les éléments produits, eu égard à leurs incohérences, n'avaient pas de caractère authentique et ne pouvaient établir la filiation alléguée.
5. M. B...ne présente pas plus en appel qu'en première instance d'éléments probants permettant d'établir la possession d'état. L'existence de voyages en Haïti ou de quelques transferts d'argent à des proches en Haïti ne saurait être considérée en l'espèce comme des éléments de preuve d'une possession d'état à l'égard de l'enfant Dina.
6. En conséquence, la filiation entre M. B...et sa fille alléguée Dina ne peut être considérée comme établie. Dès lors, le requérant ne peut se prévaloir de ce que la décision litigieuse porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne l'enfantE... :
7. Plusieurs incohérences dans la production des actes d'état civil produits par le requérant ont été relevés par le ministère de l'intérieur et les premiers juges ont relevé que ces incohérences étaient de nature à remettre en cause le caractère authentique des actes d'état civil produits à l'appui de la demande de visa :
- l'acte de naissance et la copie délivrée par les archives nationales haïtiennes mentionnent une date de déclaration postérieure au délai légal d'un mois prévu à l'article 55 du code civil haïtien.
- la naissance enregistrée à Savanne-à-Roches, n'a pas été déclarée auprès de l'officier de l'état civil du lieu du domicile de la mère ou du lieu de naissance de l'enfant situés à Gonaïves, en méconnaissance des mêmes dispositions ;
- contrairement aux dispositions de l'article 35 du code civil haïtien, l'âge des personnes mentionnées dans les actes n'est pas indiqué ;
- les numéros figurant sur l'original de l'acte et la copie délivrée par les archives nationales ne sont pas les mêmes.
8. M.B..., qui n'avait par ailleurs pas mentionné l'existence de E...dans sa demande de naturalisation, ne présente aucun élément nouveau en appel permettant d'expliquer ces incohérences et il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre aurait commis une erreur d'appréciation en considérant que les éléments produits, eu égard à leurs incohérences, n'avaient pas de caractère authentique et ne pouvaient établir la filiation alléguée.
9. M. B...ne présente pas plus en appel qu'en première instance d'éléments probants permettant d'établir la possession d'état. L'existence de voyages en Haïti ou de quelques transferts d'argent à des proches en Haïti ne saurait être considérée en l'espèce comme des éléments de preuve d'une possession d'état à l'égard de l'enfantE....
10. En conséquence, la filiation entre M. B...et sa fille alléguée E...ne peut être considérée comme établie. Dès lors, le requérant ne peut se prévaloir de ce que la décision litigieuse porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
11. Il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction de réexamen de sa demande doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 6 juillet 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Mony, premier conseiller,
- M. Sacher, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 juillet 2018.
Le rapporteur,
E. SACHERLe président,
H. LENOIR
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT01798